Archives par étiquette : discrimination

« Amours hors cadre » : une expo photo pour dire non à l’homophobie

Allier l’art et la lutte contre les discriminations, ça vous dit ? Du 16 octobre au 14 novembre 2015 au Parc de Bercy à Paris se tient une expo photo pour dire non à l’exclusion des jeunes homos et trans, non à l’homo- et la trans -phobie. Une démarche originale soutenue par crowdfunding.

Florent P

Ces jeunes adultes n’ont pas de prénom, ils/elles n’ont pas tous un visage, car se montrer peut encore leur porter préjudice dans la vie courante, vis-à-vis de leur famille surtout. Leur orientation sexuelle ou genre n’est pas conforme à ce que leur famille attendait d’eux. Un jour, ils ont frappé à la porte de l’association Le Refuge, qui les a hébergés et soutenus plusieurs mois, le temps de reprendre pied. Et, parfois, de renouer avec leur famille.

Florent Pommier.

Florent Pommier.

Depuis 2013, mon confrère et camarade Florent Pommier travaille en lien avec l'association nationale Le Refuge. Désormais, tout est prêt pour exposer une sélection de clichés. Plus des 1750 € nécessaires ont été collectés auprès des internautes par le biais de Kiss Kiss Bank Bank.

Le surcroît de dons par rapport à ses attentes, Florent a promis de le reverser au Refuge.

Pourquoi dans un lieu public ? Pour que des personnes pas forcément sensibilisées au sujet s'y intéressent et se questionnent. Aller dans une galerie, ce n'est pas la même démarche.

Et puis à l'heure où les photos viennent à nous en nombre (sur les réseaux sociaux, etc.), il y a aussi un besoin que la photo rencontre le public dans la rue.

2 – Les « sectes », symptômes des maux et lacunes de notre société

La meilleure arme des ennemis de la diversité spirituelle, la plus puissante, celle qui a montré dans l’histoire des persécutions sa terrible efficacité, c’est l’amalgame que permet le mot indéfinissable de “secte”. On mélange tout dans cette notion injurieuse, bien pratique parce que sans définition précise et sans existence juridique, ce qui est pain bénit pour les calomniateurs.

pilori 1

Le pilori. Coutumes de Toulouse, 1296, BnF.
Les médias ont remplacé l'appareil en bois et démultiplié l'impact de la punition.

Végétarisme, nouvel âge, médecines naturelles, prière hors églises reconnues, désintérêt pour la télévision, scolarisation à la maison, appartenance à un groupe de taille international ou à un petit groupe local rassemblé autour d’une démarche originale, critique du système médical ou critique globale de la société, tout devient prétexte à stigmatiser l’original. En outre, le « coupable à priori » n’est même pas appelé à s’expliquer. Il suffit qu’il soit dénoncé comme « secte » ou suspect de « dérive sectaire » par une officine comme la Miviludes ou l’Unadfi pour être considéré comme ennemi de la nation. Et être exposé au pilori des médias...

Quelle régression au pays des Droits de l’homme ! Alors que nous avons été parmi les premiers à affirmer que tout accusé a le droit d’être confronté à son accusateur pour s’expliquer devant une cour impartiale, un homme ou un groupe d’hommes accusé en France d’être un gourou ou une “secte” est arbitrairement traîné dans la boue et socialement discriminé, sans jamais être entendu ! et avec la bénédiction (laïque !) de la majorité de nos concitoyens, des médias et des pouvoirs constitués.

La croyance en la culpabilité de l’autre fausse le jugement

À l’étranger d’ailleurs, on s’inquiète de cet esprit d’inquisition. Plusieurs pays plus respectueux de la liberté de penser, plus ouverts à la diversité des croyances et des pratiques sociales, protestent contre les pratiques françaises. En vain jusqu’à présent. Mais cela pourrait changer face à la volonté de la France d’exporter son "modèle" discriminatoire à l’échelle de l’Europe (nous y reviendrons).

Il n’est pas question, bien sûr, d’ignorer certains risques (inhérents à toute démarche spirituelle authentique) et certaines dérives. Encore faut-il combattre ces dérives dans tous les secteurs de la société – et pas seulement chez les minorités spirituelles !

Comment une "présomption de culpabilité" peut conduire à une immense erreur judiciaire.

L'affaire d'Outreau.- Comment une "présomption de culpabilité" peut conduire à une immense erreur judiciaire.

Encore faut-il également que ces délits soient effectivement constitués et prouvés. On a vu, dans l’affaire des « acquittés d’Outreau », par exemple, combien la croyance en la culpabilité de l’autre pouvait fausser complètement tout le processus judiciaire pourtant mis en œuvre par des professionnels et des organismes officiels. Que dire alors de culpabilités proférées sans information contradictoire, sans avoir suivi les circuits d’une telle instruction !

Au dire même de l’administration, et au vu de l’extrême rareté des condamnations, les cas avérés de dérives sectaires par les “sectes” sont exceptionnels. Ils ne justifient en aucune manière l’ostracisme dont les minorités religieuses ou thérapeutiques sont frappées dans leur ensemble.

C’est comme si l’on interdisait aux Français toute consommation de fruits et de légumes sous prétexte que 1 % de ces aliments contiennent des doses de pesticides supérieures aux normes admissibles…

Notre tâche, ici, va être de montrer qu’il est indispensable de manger des fruits et des légumes, quitte à se renseigner sur leur provenance et les conditions de leur production pour faire un tri. Les fruits et les légumes étant, dans notre métaphore, les enseignements spirituels différents.

Une chasse aux sorcières d’un autre âge

La chasse aux sorcières menée en France, digne d’un autre âge, masque une lutte contre des évolutions qui remettent en cause certains aspects du système en place. Cela est particulièrement visible dans le domaine de la santé.

Nos sociétés ont une conception très mécaniste du corps humain. Depuis Pasteur, le microbe est devenu un ennemi. L’essentiel de l’arsenal thérapeutique contre les maladies s’est donc orienté vers une éradication par tous les moyens de cet adversaire invisible. Au lieu de chercher à comprendre le pourquoi de son action néfaste, on le tue.

microbesAu lieu de chercher à savoir pourquoi le microbe, présent depuis l’origine dans l’organisme, se met soudain à le perturber. En cherchant seulement à éliminer le trublion, en oubliant le terrain dans lequel il végète, on s’abstient de décrypter le signal qu’il émet. On s’empêche ainsi d’agir efficacement sur les causes du déclenchement de la maladie. On se prive d’apporter une solution en profondeur aux maux que nous prétendons combattre. Tout en provoquant d’autres maux, comme les résistances aux antibiotiques et les empoisonnements chimiques par excès de médicaments.

De la même façon, les "sectes" sont, au pire, des symptômes des dysfonctionnements et des manques de notre société. Au mieux, elles annoncent des évolutions souhaitables, des préfigurations de paradigmes plus féconds. Dans un cas comme l’autre, les diaboliser et tenter de les dissoudre est injuste, vain ou contre-productif (elles se multiplient !). Les responsables, les décideurs et les intellectuels ont tous intérêt à étudier sereinement et sérieusement le problème - s’ils veulent vraiment aider à sa résolution.

Une certaine idée de la vérité

C’est par l'étude précise des faits, l’honnêteté intellectuelle, l’effort de penser par soi-même et le respect de l’autre que nous parviendrons à tisser entre nous tous les liens dont l’absence immobilise et sclérose notre pays. Et monte des catégories de population les unes contre les autres. La leçon de la dernière guerre ne sera-t-elle donc jamais apprise ? On dit : « Plus jamais ça ! » et chacun continue allègrement à taper sur ses boucs émissaires.

Il faut inviter chacun à rechercher lui-même le vrai (et non faire confiance à des entités qui ont intérêt à calomnier). Car le comportement d’une société, notamment vis-à-vis de ses marges, dépend en premier lieu du rapport qu’elle entretient avec la vérité, de la conception qu’elle a de la vérité. L’ensemble des lois, et des instances mises en place pour permettre leur application, a toujours pour base une certaine idée de la vérité. Que celle-ci soit expressément définie ou non. Qu’elle soit consciente ou non.

Par exemple, en France, seule la médecine « basée sur des preuves » est dite valable parce qu’elle est assimilée à la vraie médecine, tout le reste étant billevesées fuligineuses, voire criminelles. Or, assimiler connaissance scientifique et vérité est un abus cognitif.

Et si les "sectes", dans ce contexte, ont bien au moins une utilité, c’est celle de forcer notre réflexion sur la vérité et les modalités d’accès à cette (ou à ces) vérité(s), de nous pousser à approfondir notre connaissance de nous-mêmes, des autres, des fossés qui nous séparent comme des liens qui nous unissent, ainsi que des nos croyances, de nos illusions, de nos prétentions à connaître et… de nos atouts.

 > A suivre : 3 – Christianisme : des superstitions « exécrables » et « maléfiques ».

> Déjà paru : Sectes, religions et liberté de pensée : 1 – Une question éminemment politique

Liberté de pensée, sectes et religions : 1 – Une question éminemment politique

Débredinoire propose à partir d’aujourd’hui une série d’articles qui seront publiés chaque semaine. Le fil conducteur de ce long dossier est une approche originale de la question « sectaire », loin des clichés véhiculés par le pouvoir, les médias et quelques lobbies.

> Voir en fin d'article la liste de tous les articles parus.

Cette approche nous permettra de remonter loin dans le passé pour analyser comment la question de la « différence » (intellectuelle et spirituelle) a pourri nos relations sociales et politiques tout au long de notre histoire. La France sait mal gérer ce qui contrarie sa vision de la « vérité » et risque de concurrencer les monopoles et les intérêts en place.

La politique française envers les nouveaux mouvements religieux et thérapeutiques, baptisée « lutte contre les sectes, ou contre les dérives sectaires » pour se donner bonne conscience, peut aussi se comprendre comme le combat du pouvoir et des grands lobbies pour empêcher l’émergence de contestataires très convaincus ou de créatifs culturels. L’opinion, manipulée par les autorités tout autant que par la presse, qui n’a jamais fait la moindre enquête neutre et sérieuse sur le sujet, vit dans la crainte d’une menace largement irréelle.

Même le journal dit "de référence" n'hésite pas à créer une rubtrique spécialisée baptisée, non pas analyse du phénomène sectaire, mais "Lutte contre les sectes"...

Même le journal dit "de référence" n'hésite pas à créer une rubrique spécialisée baptisée, non pas "Analyse du phénomène sectaire", mais carrément "Lutte contre les sectes"...

La question du traitement à réserver à ces approches différentes et complémentaires est en fait une question majeure de société. C’est une question :

- philosophique (elle touche au problème crucial mais toujours non résolu des relations entre le corps et l’esprit)

- scientifique (comment faire le tri, dans le domaine de la santé, par exemple, entre les démarches valides et les autres)

- juridique et pénale (comment départager le crime et l’escroquerie de l’erreur ou de l’innovation en matière de soin)

- politique (qui est compétent pour décider en la matière ; quels mécanismes pour éviter tout conflit d’intérêt et abus de pouvoir)

- sociale (les deux tiers des Français ont recours aux médecines douces)

- médiatique : la presse relaie avec complaisance, quand elle ne l´attise pas, la propagande discriminatoire du pouvoir

- économique (trou de la sécurité sociale ; immense marché actuellement protégé par un monopole), etc.

La question des “sectes” : une question éminemment politique et philosophique

Elle touche à la fois aux rapports individu/groupe, minorité/collectivité, tradition/innovation ; aux rapports conscience/instincts/hérédité/conditionnements ; à la place de la transcendance et de la subjectivité dans une société matérialiste et soumise aux “pensée uniques” .

Elle réactualise avec insistance la question éternelle (que s’efforcent d’éluder tout à la fois les pouvoirs religieux, politiques et économiques) : qu’est-ce que penser par soi-même au milieu des autres ?

Nous développerons ici la thèse que, à rebours des idées reçues, la “secte” (communauté spirituelle, philosophique ou thérapeutique) naît d’une résistance multiforme à ce modèle. A ce titre, elle peut même constituer une étape positive sur le chemin de l’autonomie de la pensée. Et donc de l’individuation.

Ce thème fait peur et fait rarement l’objet de débats, tant il est définitivement entendu qu’il existe en France d’infréquentables sectes, toutes manipulatrices et malfaisantes, motivées seulement, sous le masque trompeur de la religion, par l’appât du gain et le fanatisme destructeur. Et conduisant à la mort.

Une autre analyse est possible. C’est l’objet de cette série d’articles.

« Sectes » : au-delà des clichés réducteurs et infâmants

Il faut aller au delà des clichés pour mieux appréhender la réalité et saisir l’intérêt de réfléchir sans passion sur l’essor de ces mouvements “différents”. Ces groupes qui sont méprisés en toute ignorance de cause et au sujet desquels l’information est donnée seulement par le seul biais de ceux qui ont intérêt (économique ou idéologique) à les réduire au silence (nous en reparlerons).

Commençons tout de suite par ce qui sera sans doute le plus désagréable à entendre à certains : ces “mouvements” sont appelés non seulement à durer mais à proliférer et s’étendre. Du moins, tant que la société n’a pas mûri, tant que des relations interpersonnelles confiantes et ouvertes ne sont pas établies entre les différentes opinions. Tant que le besoin de spiritualité ou de transcendance inhérent à tout homme n’est pas satisfait par les églises “reconnues” ou par les régimes politiques en vigueur.

De même, nous le verrons plus loin, le problème des “sectes” est aussi celui de la place de la “vérité” en démocratie.

De fait, ces mouvements ont historiquement toujours constitué - et constituent toujours aujourd’hui - des indicateurs de voies nouvelles, multiples, parfois convergentes, pour faire évoluer les positions dominantes et sclérosées. Mouches du coche, contestataires, en proposant d’autres modes de pensées et de comportements, ils appuient là où ça mal, là où la société et son organisation sont fragiles ou injustes. Ce faisant, ils font évoluer les mentalités, plus ou moins maladroitement, parfois de façon répréhensible (comme beaucoup d’acteurs dans notre société), mais de façon irrépressible.

Ces mouvements, écoles, groupes de personnes, communautés, églises (Scientologie, Témoins de Jéhovah pour nommer les plus connues), parfois individus (appelés par certains “créatifs culturels”), appliquent des techniques ou se réfèrent à des enseignements originaux, différents de la culture dominante. Ces voies impliquent généralement une vision globale de l’être humain et de ses rapports avec ses semblables, l’univers ou Dieu, que la vision soit thérapeutique, philosophique, spirituelle ou tout cela à la fois.

Elles sont toutes plus ou moins dans le collimateur des "antisectes" :

Acupuncture, Angélisme, Aromathérapie, Art thérapie, Auriculothérapie, Bio-énergie, Chanelling, Chiropraxie, Chromothérapie, Clarification, Communication non-violente, Danse sacrée, Décodage Biologique, Développement Personnel, Do-yin, Drainage lymphatique, Ennéagramme, Esotérisme, Etiopathie, Eutonie, Fleurs de Bach, Feng Shui, Géobiologie, Gestalt-thérapie, Graphologie, Homéopathie, Hypno-sophrologie, Hypnose thérapeutique, EMDR (Intégration par les Mouvements Oculaires), Kinésiologie, Magnétisme, Massages sensitifs, Massages ayurvédiques, Massages chinois, Meditation, Médecine chinoise, Micro-kinésithérapie, Morpho-psychologie, Musicothérapie, Myothérapie, Naturopathie, Nutrition, Ostéopathie, Phytothérapie, PNL, Prière, Produits biologiques, Psycho-généalogie, Psychologies, Psychologie, Retraites spirituelles, Qi Gong, Reiki, Rebirth, Réflexologie, Shiatsu, Sophrologie, Stress, Tantra, Thalassothérapie, Yoga, Zen, etc.

Pour bien des Français, ces mouvements n'ont rien à voir avec des "sectes". Qui, en effet, n’a pas au moins une fois bénéficié de ces nouvelles approches de la santé ou de la conscience au monde ? Popularisées par les magazines féminins, par certains magazines spécialisés, par de nombreux ouvrages, et présentées sur divers salons, objets de stages attirant un public sans cesse croissant, ces démarches répondent à un besoin de sensibilité, d’écoute attentive et de chaleur humaine qui est rarement satisfait par les acteurs “officiels” des grandes églises et de la médecine académique.

La dangerosité « sectaire » très largement surestimée

De même, et c’est là sans doute que se situe le nœud de la question des “sectes”, ces démarches permettent à l’individu une prise en charge personnelle de son destin et de sa santé. Echaudé par les excès et parfois l’inhumanité des pratiques conventionnelles, le citoyen cherche des voies qui ne soient pas uniquement dictées par l’Etat et la science “officielle”.

Quand le Conseil de l'ordre des médecins veut illustrer un dossier sur les "dé"rives sectaires", il présente une séance de méditation en une de son bulletin (n°21 janvier 2012).

Quand le Conseil de l'ordre des médecins veut illustrer un dossier sur les "dérives sectaires", il présente une séance de méditation en une de son bulletin (n°21 janvier 2012).

Si les “sectes” étaient toutes des groupes pseudo-religieux masquant en réalité des entreprises totalitaires destinées uniquement à détourner les avoirs et les biens de leurs adeptes ou à les conduire à la mort, ces pages n’auraient pas de raison d’être. Nous n’aurions aucune raison en effet de défendre ce type de comportements.

Or, la réalité sur cette question est bien différente des représentations qu’en véhiculent les médias, les associations dites “antisectes” (Unadfi, CCMM, Fecris, etc.) et les pouvoirs publics (Miviludes, ministère de la santé). Nous tâcherons ici de démontrer que la “dangerosité sectaire”, même si elle peut exister, est très largement surestimée. Elle s’est muée, en France, en mythe.

La propagation de ce mythe est contraire, non seulement à ceux qui en sont victimes, mais aussi à la société toute entière et même aux antisectes déclarés qui se privent ainsi de réel efficace. Une meilleure compréhension du phénomène et de ses enjeux nous rapprochera de la réalité. Et aiderait la France à renouer avec le rayonnement intellectuel et spirituel qui a fait, dans le passé, l’admiration du monde entier.

Ce qui est de moins en le cas aujourd’hui en raison de sa politique officiellement discriminatoire.

Il y a plusieurs façons d’aborder la question des “sectes” : de façon passionnelle ou rationnelle, de façon polémique ou philosophique, de façon idéologique ou en s’appuyant sur des faits. Tout ce qui sera dit ici s’appuiera sur des faits, la plupart du temps ignorés de tous, et notamment des adversaires des sectes. De même, une réflexion philosophique tâchera d’éclairer les enjeux de cette tension si vive en France, plus vive que n’importe quel autre pays au monde, si ce n’est en Chine et dans les pays soumis aux dictatures.

Mus par une farouche volonté d’inconnaissance, les antisectes ont gagné, apparemment, la bataille, médiatique et politique : plus des deux tiers des Français estiment qu’il existe des sectes dangereuses infiltrées un peu partout. Mais ils ont d’ores et déjà perdu la guerre puisque ces mouvements non seulement n’ont pas disparu, mais se sont professionnalisés, modifiés, diversifiés. Et multipliés, surtout, prouvant la vanité de la politique menée dans notre pays. Aujourd’hui, les sectes semblent partout, dans le milieu de l’entreprise comme dans celui de la santé, dans les administrations comme dans le champ culturel.

Le revers de cette lutte contre les pratiques soi-disant sectaires est que tout individu s’aventurant en une voie un peu originale, dans le domaine de la pensée, de la santé ou du spirituel, peut désormais être inquiété par des vigiles normalisateurs publics et privés, ces derniers étant de plus financés par nos impôts. De plus en plus nombreuses sont les personnes qu’une dénonciation calomnieuse au titre d’appartenance à une secte (que cela soit vrai ou non) a cassées, leur faisant perdre leur travail, leur famille, leurs enfants, les obligeant parfois à quitter le pays. Les conduisant même à la dernière extrémité (cf. affaire Yves Jullien, directeur du centre Epinoia, qui s'était suicidé en 2000 après une campagne de dénigrement orchestrée par l'Unadfi).

Est-il normal, dans le pays dit des « droits de l’homme », des citoyens soient officiellement discriminés pour leurs croyances sans qu’il soit prouvé qu’ils aient personnellement commis un quelconque crime ou délit ?

> Tous les articles de l'enquête :

21 - Penser par soi-même, un idéal encore lointain

20 – La pression du « religieusement correct » conforte le risque de sectarisme

19 – Paradoxalement, être membre d’une «secte» permet de résister à la pensée unique

18 – Déviance aujourd’hui, mœurs tolérées demain. Comment savoir ?

17 – Pour un « marché » libre des cultes et des convictions

16 – Du positif dans la chasse aux sorcières «antisecte» à la française

15 – L’imposant arsenal français contre les « sectes » est unique au monde

14 - Les "sectes : des religions qui  n'ont pas réussi ?

13 - L'Eglise catholique : des principes que la Miviludes pourrait classer "dérives sectaires"

12 – Désormais, après l’avoir combattue, l’Eglise profite de la liberté de conscience

11 - Hegel : « Ce droit inaliénable de l’homme de se donner ses lois du fond de son cœur »

10 - La foi contre la raison versus la foi en la raison

9 - « Ils osent refuser à l’Eglise le droit d’exercer la censure ! »

8 - Liberté de la presse, « liberté exécrable, la plus funeste » !

7 – L’Eglise : « Que chaque individu soit soumis aux puissances ! »

6 - La liberté de penser ? Un droit « chimérique et monstrueux » !

5 – Les mauvais comportements des croyants éloignent les « gentils » de Dieu

4 - Ce que tout Français et les catholiques doivent aux protestants

3 - Christianisme et protestantisme, deux ex-sectes aujourd'hui "fréquentables"

2 - Les « sectes », symptômes des maux et lacunes de notre société

1 - Sectes, religions et liberté de pensée : Une question éminemment politique

Journalisme et discriminations : une règle fondamentale à respecter

Tout journaliste désireux de participer à la construction de la paix sociale devrait abandonner sa propension à attiser les polémiques et les haines. Et se donner une exigence absolue : bannir toute généralisation discriminante.

Plus jamais

Affiche commanditée par la SFIO pour les élections législatives de 1928. Document : Bibliothèque de documentation internationale contemporaine/MHC.

« Plus jamais ça ! » disaient nos pères et déjà nos grands pères. Si l’on veut donner une garantie de réalisation à ce vœu, nous devrions nous aussi "désarmer" nos esprits, extirper tout germe de guerre en nous­-même en considérant chaque homme comme notre égal, et même comme un frère potentiel ainsi que nous y enjoint le troisième terme de notre devise nationale. Terme que l’on méprise trop aisément quand on se pense meilleur qu’un autre ou supérieur à lui d’une quelconque façon.

Telle est la condition d’un climat social apaisé et constructif, respectueux des différences et de la diversité.

Dans ce contexte, le journaliste et son média, en raison de leur pouvoir et de leur responsabilité, ont un rôle majeur à jouer.

Le ferment de toute guerre fratricide réside dans le fait d’apposer publiquement des étiquettes sur des individus et des groupes d’individus, ce qui permet et facilite la discrimination à leur encontre (“Tous les XXX sont des YYY”). En effet, toute généralisation dans la pensée et dans l’action, s’agissant d’humains et tout particulièrement de minorités (juifs, arabes, extrême droite/extrême gauche, immigrés, roms, fous, etc.), est nécessairement stigmatisante, arbitraire et abusive.

Les formules utilisées aujourd'hui dans les campagnes contre les "sectes", par exemple, ne sont pas sans rappeler celles qui avaient cours sous l’Occupation.

Le journaliste soucieux de la qualité du climat social évitera de recourir à ces catégorisations, à ces généralisations. Il renoncera dès lors aux étiquettes et s’efforcera, au contraire, d’étudier chaque fait, chaque situation dans le concret, au cas par cas et avec précision. Et ce, le plus objectivement possible, c’est­-à­-dire, professionnellement parlant, à charge et à décharge. Non comme un procureur, mais pour saisir contradictoirement une réalité complexe...

Si tous les journalistes adoptaient cette attitude, ils gagneraient en crédibilité et en image auprès du public. Et toute la société, qui aujourd’hui semble animée d’un étrange “Haïssez­-vous les uns les autres”, s’en porterait mieux.

Bien évidemment, beaucoup me traiteront de bisounours. Adopter cette proposition serait pourtant LE moyen de garantir le “Plus jamais ça !” de nos pères.

D’autres clameront que contribuer à la paix sociale n’est pas dans leur attribution. Ce serait oublier que, s’ils sont journalistes, ils sont aussi citoyens.