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Un article des « Cahiers du journalisme » propose une nouvelle définition de la profession

Le numéro des « Cahiers du journalisme » qui vient de paraître contient notamment mon article sur la question de savoir si le journaliste a le devoir ou non de « rechercher la vérité ».
L’occasion de proposer une nouvelle définition de la profession basée sur la pratique, l’épistémologie et la déontologie.

Tout le monde ayant aujourd’hui accès facile aux moyens d’expression de toute nature, chacun peut se croire journaliste. Et ce, d’autant plus facilement que les journalistes professionnels ne donnent pas toujours toutes les garanties souhaitées de rigueur, d’impartialité et de neutralité. Si bien qu’il devient difficile de déterminer ce qui distingue nettement l'information journalistique.

Et l’affaire s’aggrave quand on apprend que la Fédération internationale des journalistes (FIJ), vient d'acter (le 12 juin 2019) que "respecter la vérité" n'est plus le premier devoir du journaliste. Si le journaliste n’est plus attendu pour rechercher la vérité, de quel professionnel, ou de quel citoyen, cette exigence peut-elle alors être espérée  ?

Sur mon site et dans le dernier numéro des « Cahiers du journalisme » (été 2020), je m’élève contre cet abandon de la vérité comme horizon, abandon qui m’apparaît comme une démission de la part de la profession, au moins comme une facilité dommageable pour la citoyenneté.

Lire la suite sur le site des Cahiers.

J’y explique pourquoi, à mon sens, il faut garder cette exigence de vérité. Et comment on peut le faire. Ce qui me conduit à proposer au débat une définition épistémologiquement et déontologiquement construite.

Revue francophone de recherches et de débats

« Les Cahiers du journalisme », grande revue francophone de réflexion et de recherches sur le journalisme, « ont été conçus en 1995 à l’initiative de Patrick Pépin, alors directeur de l’École supérieure de journalisme de Lille, et du sociologue Pierre Bourdieu, qui en a signé le premier article. Dirigée par Bertrand Labasse, la nouvelle formule conjugue une partie « Débats », ouverte aux propositions des professionnels et des chercheurs sur le journalisme, et une partie « Recherches » qui accueille des travaux.

Publiée par les Presses de l’ESJ, désormais associées aux Presses de l’université d’Ottawa, les Cahiers rassemblent, en lien avec le Réseau Théophraste des centres francophones d’enseignement du journalisme, des équipes de l’École supérieure de journalisme de Lille, de l’Université d’Ottawa et l’Université Laval.

 

 

 

Face aux « fake news », savoir déceler chacun.e la vérité devient crucial

La confusion est telle, par la prolifération des sources d’information, qu’aucune d’entre elles ne peut être considérée comme entièrement fiable. D’où la nécessité, pour chacun.e de nous d’acquérir les techniques de base pour éliminer autant que faire se peut les risques d’erreur. Ce que propose la "démarche véritale".

Designer : Basile Morin.

Aujourd’hui, notamment face aux incohérences et contradictions révélées par la gestion de la pandémie en cours, la défiance est partout.

La population ne croit plus les instances officielles ni les médias classiques. Ces derniers, s’instituant « décodeurs » ou « débunkeurs » de l’information, prétendent trancher entre le "vrai ou le fake". Mais ils sont vus, souvent, comme des relais, voire des « complices », des pouvoirs politiques ou économiques.

Dans ce contexte, comment le citoyen peut-il s’y retrouver  ? Avide de savoir, il cherche et trouve alors sur Internet des personnalités combatives qui se disent lucides et non manipulées. Celles-ci diffusent articles et vidéos dévoilant des « faits cachés par les pouvoirs » et qui « prouvent » leurs mauvaises intentions à l’égard du « peuple ». Faut-il pour autant les croire entièrement  ?

Mon expérience de journaliste et de passionné d’épistémologie (l’étude des conditions qui président à l’élaboration d’un savoir fiable) me conduit à cette conclusion radicale  : ne vous fiez à personne, à aucun média ni à aucun pouvoir.

Apprenez à déceler par vous-même les critères d’une information crédible.

Mais également, ne vous défiez définitivement de personne, d’aucun média et d’aucun pouvoir. En effet, en chaque information, même manipulée, peut résider une part de vérité.

Et, en fin de compte, après ces efforts pour savoir ce qui est dit, apprenez à entendre et oser suivre votre for (guide) intérieur.

Pour vous aider, j’ai conçu la « démarche véritale », une méthode pour approcher au plus près de la vérité par le fait d’éliminer le plus possible les facteurs d’erreur. Car il est plus facile de prouver l’erreur que la vérité.

La démarche “véritale”, une méthode pour favoriser l’information responsable

 

Se former à l’esprit critique constructif

Le 1er mai 2020, j’ai tenu une vidéoconférence (voir le lien ci-dessous) devant une vingtaine de personnes, de tous âges et de différents milieux socioculturels, concernées par ces questions.


J’y ai partagé mon parcours personnel. Mon intérêt pour la déontologie et la recherche de la vérité (philosophique comme professionnelle) m’a conduit dès le début de ma carrière à m’intéresser à la qualité déontologique de l’information journalistique qui, malheureusement, est mal assurée dans notre pays.

J’explique mon combat pour la création d’un Conseil de presse (qui a vu le jour en décembre 2019 après des décennies de militance) et dont vous pouvez voir les différentes étapes dans cet article (Comment est né le tout nouveau Conseil de déontologie journalistique et de médiation).

Malheureusement, cette initiative arrive bien tardivement. Et je crains qu’elle n’ait qu’un assez faible impact sur le débat démocratique. Car, aujourd’hui, si la presse nationale et régionale conserve encore une légitimité, le doute qui s’est installé dans l’esprit des Français déplace les enjeux sur la question de la régulation (quasi inexistante) de l’information diffusée sur le Net (sites, blogs et réseaux sociaux).

C’est pourquoi j’invite chacune et chacun des mes compatriotes à se former à l’esprit critique constructif*, au doute et au débat méthodiques, ainsi qu’à la démarche véritale qui en contient l’essence.

* Par "esprit critique constructif", j’entends la capacité de recul et d’analyse par rapport aux données exprimées par autrui (personnes, médias, etc.), mais aussi – et d’abord – par rapport aux données (impressions, connaissances, croyances, certitudes, etc.) qui circulent dans mon propre cerveau.

Lettre ouverte à Dominique Pradalié, S. G. du Syndicat national des journalistes (SNJ), à propos de « la vérité »

Dominique Pradalié, secrétaire générale du Syndicat national des journalistes, s'étant offusquée de l'affirmation du président de la République regrettant que "la presse ne recherche plus la vérité", je lui fais part de la contradiction que je vois entre sa réaction et le fait que la profession elle-même, par le biais de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), vient d'acter que "respecter la vérité" n'est plus le premier devoir du journaliste.

« Chère Secrétaire générale, chère Dominique,

Tout d’abord, mes félicitations pour ta réponse, parue le 4 février 2020 sur le site d'Acrimed à propos de ses doutes concernant le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM).

On ne peut effectivement laisser dire n’importe quoi par nos confrères sur ce sujet. Et, à elle seule, la somme des contrevérités qu’ils ont publiées pour tenter de discréditer le nouvel organisme plaiderait précisément en sa faveur.

Le deuxième point que je voulais aborder avec toi est la contradiction qui m’est apparue dans ton texte entre une affirmation du président de la République (« nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité »), que tu qualifies "d'attaque choquante", et la récente position adoptée le 12 juin 2019 à Tunis par la Fédération internationale des journalistes (FIJ).

En effet, la FIJ a modifié l’article 1er de la Charte mondiale d’éthique des journalistes (« Respecter la vérité et le droit que le public a de la connaître constitue le devoir primordial du journaliste ») pour le transformer en : « Respecter les faits et le droit que le public a de les connaître constitue le devoir primordial d’un.e journaliste ».

Mais qu'est-ce que respecter les faits sinon respecter la vérité des faits ?

J’ai bien compris les motifs de cette décision, mais je la conteste, comme tu pourras le lire dans mon article qui fait état de la discussion que j’ai eue avec M. Bellanger, secrétaire général de la FIJ.

La quête de la vérité, qu’elle soit sa recherche ou son respect, est à mes yeux un devoir essentiel du journaliste, même s’il est difficile de définir ce qu’est cette valeur suprême.

D'une certaine façon, l’affirmation de M. Macron déplorant que « la presse ne recherche plus la vérité » vient d’être officiellement validée par la première organisation mondiale représentant 600 000 journalistes dans 146 pays, qui revendique, déontologiquement, ne plus avoir comme premier devoir de « respecter la vérité ».

Tu comprends que tout cela n’est pas que nuances mais choix épistémologique majeur dont la profession devrait bien, à mon avis, en étudier bien-fondé, enjeux et répercussions, afin de prendre une position plus claire sur le sujet.

Jean-Luc Martin-Lagardette
Carte de presse 36 261. »

(En Une : Image par Clker-Free-Vector-Images de Pixabay)

 

Faut-il ou non conserver le mot « vérité » dans la charte internationale des journalistes ?

Non, répond la Fédération internationale des journalistes. Oui, affirmé-je, au risque, sinon, de voir se dissoudre un des repères essentiels de notre déontologie professionnelle.

Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), première organisation mondiale, représentant 600 000 journalistes dans 146 pays, m’a envoyé ce mail à la suite de l’article que j’avais publié sur la nouvelle Charte adoptée par son organisation.

Il réagit notamment sur le paragraphe qui concluait l’article concernant mon regret d’avoir vu disparaître le concept de « vérité » :

Voici la réponse que je lui ai adressée :

« Merci pour votre réponse dont je comprends et apprécie chaque terme.

Ceci dit, je continue à penser qu’il est déplorable d’avoir fait disparaître le mot « vérité » de l’article 1 de la Charte, alors que tous reconnaissent que « la vérité est le fondement de notre profession ». C’est un peu comme si l’on disait que la liberté, l’égalité et la fraternité sont tellement difficiles à définir précisément qu’on décide de les abandonner et de les remplacer par « recherche de l’autonomie », « traitement équitable » et « attention réciproque » !

J’ai affronté une difficulté similaire au sein de l’Observatoire de déontologie de l’information (ODI) dont j’ai été membre au début de sa création. Une controverse m’avait opposé à mon confrère Y. Agnès (avec qui j’avais cofondé l’Association de préfiguration d’un conseil de presse – APCP) au sujet de l’objectivité journalistique. Il soutenait, appuyé par de nombreux confrères, qu’il fallait abandonner le mot et le remplacer par « honnêteté ».

J’ai posé mes arguments au sein d’un groupe de travail de l’ODI qui a fini par conclure qu’il fallait bien « remettre l’objectivité à l’honneur ». Nous en avons profité aussi pour approfondir le concept d’honnêteté.

Il me semble ainsi tout aussi important de remettre le mot « vérité » à l’honneur, tout en l’accompagnant d’une perspective épistémologique bien balisée, comme je pense l’avoir fait depuis des années. Je me permets de vous communiquer ce lien où vous trouverez mes explications du néologisme « vérital » qui signifie, non pas « vrai », mais au sujet duquel les méthodes exigées pour éviter au maximum les erreurs ont été employées pour la fabrication d’un article. Il pourrait s’appliquer de façon pertinence à l’information journalistique de qualité et déontologique.

Si nous chassons le mot vérité de nos chartes, nous abandonnons par là-même l’idéal professionnel qu’il faut toujours avoir en horizon et faire l’effort de poursuivre, quelles que soient les embûches à surmonter pour l’atteindre. La porte serait laissée alors ouverte à une confusion totale ou vérité, post-vérité, infox, intox, etc., pourront être placées sur un même niveau cognitif. Il suffit que ces « informations » comportent chacune un ou quelques faits exacts, vérifiés, pour avoir exactement le même statut

L’information journalistique, s’efforçant (et pouvant justifier cet effort) vers la vérité, ferait ainsi la différence et pourrait trouver une nouvelle crédibilité auprès des publics. »

 

 

 

Journalisme : l’épreuve de feu du contradictoire

Comment renverser le courant de défiance qui atteint la presse (journalistes + éditeurs) ? En faisant l'effort de mieux respecter les principes qui garantissent qualité et fiabilité de l'information. Et, parmi ces principes : le traitement contradictoire des faits.

Dans le Parisien, 24 janvier 2019.

Sondages après sondages, la méfiance envers les médias et les journalistes se confirme. Les professionnels semblent impuissants à enrayer cette crise.

Ceci dit, devant le déferlement des « infox » et autres dérives qui polluent l’actualité que les citoyens partagent sur leurs différents moyens de communication, l’idée de créer un « conseil de presse » commence à être prise au sérieux. Missionné par le ministère de la culture, l’ancien PDG de l’Agence France-Presse, Emmanuel Hoog, a remis son rapport le 26 mars 2019 en faveur de la création d’une telle instance d’autorégulation et de médiation de l’information. Ce projet associant éditeurs, journalistes ET citoyens, et pour lequel notre magazine milite depuis sa création il y a une douzaine d’années, sera bienvenu. Mais il risque d’être bien insuffisant !

En fait, si l’on espère pouvoir un jour bénéficier d’informations fiables sur l’actualité, il n’est pas d’autre voie que de donner un nouveau statut à la production de ces informations. La question n’a pas tant de déterminer quel média est crédible ou non, mais si tout a été fait dans les règles pour chaque article ou émission. Il faut que chaque producteur d’info, qu’il soit journaliste ou non, puisse prouver qu’il a respecté les étapes permettant de délivrer une information fiable et juste.

Crise du concept de vérité

Tout part de la crise que subit le mot « vérité ». Plus personne ne parle de LA vérité. Tout au plus peut-on viser « une » vérité », partielle et momentanée. Même la science. Même plus, un des critères les plus marquants de la scientificité est aujourd’hui le caractère réfutable d’une proposition : est vérité scientifique une donnée validée par la recherche qui peut être remise en cause par d’autres découvertes. Elle est crédible à l’instant T parce qu’elle a su répondre à toutes les objections qu’on lui a opposées soit en s’amendant, soit en démontrant sa justesse de vue.

Ainsi, contrairement à la science, une croyance religieuse, par exemple, est définitive et éternelle. C’est pourquoi elle est dite foi et non savoir. La foi, on adhère ou pas. Le savoir, on en discute et on peut le partager rationnellement. A la condition que je puisse le contester si j’ai de bonnes raisons. Sa fragilité est aussi sa force et le garant de son universalité.

Nous voyons par là comment la presse pourrait conquérir une plus grande crédibilité. Non pas en garantissant la vérité de ses productions, mais en prouvant qu’elle fait tout pour repérer et corriger ses erreurs. En garantissant qu’elle procède selon une méthode rigoureuse pour traquer les failles dans ses informations et minimiser les risques de pollution cognitive.

Et un des moyens qu’elle possède pour prouver sa bonne foi est de soumettre le résultat de ses recherches à la discussion par d’autres. Ce sont les pairs du chercheur qui peuvent confirmer ou infirmer le caractère de vérité des contenus qu’il produit.

La condition de l’objectivité réside donc, non plus dans le seul effort du chercheur, mais aussi dans le caractère collectif de fabrication du savoir.

Trois exigences

Bien sûr, la presse ne peut se calquer exactement sur la science qui a pour elle le temps et les moyens de vérifier, tester, expérimenter, etc. Et qui le fait de façon collective.

Mais la presse (ou tout producteur d'information) peut au moins garantir trois exigences :

- l’accueil du contradictoire (avant parution) puis de la critique (après parution) ;

- la séparation claire (autant que faire se peut) entre fait et commentaire

- la rectification systématique de ses erreurs.

C’est seulement en respectant ces principes qu’une information peut être dite « journalistique ». Qu’elle peut accéder à la dignité d’un « savoir ». Sans cela, elle ne vaut pas plus, au mieux, qu’une opinion (même si elle établie sur des faits) ou une croyance plausible ; au pire, elle est une publicité ou une propagande.

Une des dérives les plus fréquentes, et parmi les pires (parce qu’elles n’apparaissent pas comme des dérives au yeux du public non initié), est l’omission du débat contradictoire. On présente bien souvent des discussions présentées comme des débats mais en évitant de solliciter l’avis des contestataires ou des alternatifs.

Information ou propagande ?

Un exemple pris dans l’actualité : le magazine « C dans l’air » (France 5) fait un « débat » de près d’une heure (diffusion le 25 mai 2019) sur ce thème : « Homéopathie, la fin d'une passion française ? »

Quatre invités : Jean-Marc Daniel, économiste, Mélanie Gomez, journaliste, spécialiste des questions de santé sur Europe 1, Jean-Paul Hamon, médecin généraliste, président de la Fédération des médecins de France et Frédéric Saldmann, médecin cardiologue et nutritionniste. Alors que la polémique fait rage depuis des mois sur la question du remboursement de l’homéopathie, AUCUN des quatre invités (et pas plus les deux journalistes présentateurs Caroline Roux et Axel de Tarlé) n’y était favorable, ni même seulement « agnostique ». Tous contre, à part le Dr Saldman qui ne s’y oppose pas mais seulement sous contrôle et sous prescription médicale. Pas un seul avocat ni même représentant de cette approche thérapeutique. Pas une once de contradictoire dans la discussion, sur un sujet aussi important !
Comment s’étonner alors que le public, qui dans sa majorité utilise les fameuses granules, ne se sente pas lésé, sinon bafoué, dans son droit à se faire sa propre opinion ?

La science et l’institution ainsi préservées des critiques, parlant au micro d’une presse acquise à leurs thèses, renforcent l’impression des téléspectateurs – et des citoyens – d’être face à une propagande, en lieu et place de l’information critique et constructive que devrait leur offrir le service public...

En fait, c’est la méthode de l’informateur qui est en jeu, que celui-ci soit journaliste ou non. Pour distinguer une information à vocation journalistique, c’est-à-dire à valeur universelle, du moins dans une société donnée, de toute autre expression médiatisée, il est impératif d’exiger d’elle la garantie que ni les intérêts privés, ni les opinions personnelles, ni les systèmes institutionnels ne peuvent prévaloir sur la qualité « véritale » de son contenu.

Une qualité qui ne s’obtient qu’en passant l’épreuve de feu du contradictoire.

 

Face aux fake news et pour une information fiable : le label vérital

La lutte contre les fake news pourrait passer par l’engagement de tout informateur à respecter les règles déontologique et épistémiques de fabrication de l’information qui rendent celle-ci fiable et intégrant le plus grand degré de vérité possible : la démarche véritale.

Les fake news, notion qui englobe les fausses informations et les canulars, sont aujourd’hui à la une. Des initiatives ponctuelles, comme celles des Décodeurs de l’info, voient le jour pour tenter de les déjouer. Parfois utiles, elles ne vont guère plus loin, cependant, dans un grand nombre de cas, que le souci de re-coder autrement l’information.

Il y aurait bien un moyen simple, bien que demandant beaucoup de volonté pour être mis en place, d’apporter une certaine garantie de fiabilité de l’information : la démarche véritale.

L’originalité de cette démarche est qu’elle ne s’attache pas à décider si une information est vraie ou fausse, ce qui conduit à des débats et polémiques interminables, mais à savoir si l’informateur a procédé à toutes les étapes constitutives d’une information digne de ce nom. Autrement dit, ce n’est pas le produit lui-même qu’on examine pour savoir s’il est vrai ou faux, c’est la démarche de l’informateur, du fabricant de la nouvelle : satisfait-elle aux exigences présidant à la construction d’une information fiable ?

Un exemple simple : ferez-vous plus confiance à une ou à deux sources d’information sur un sujet donné ? Bien évidemment à deux. C’est ainsi que l’un des critères d’une information fiable est que cette information a été élaborée à partir de plusieurs sources, ou de plusieurs points de vue, notamment en cas de situation conflictuelle opposant nécessairement des protagonistes opposés.

Autre idée : ferez-vous plus confiance à une information émise par le témoin oculaire d’un événement ou par quelqu’un qui dit avoir entendu que, etc. ? Un autre critère sera donc de privilégier l’information de personnes qui sont allées « sur le terrain », qui ont assisté directement à l’événement dont il est question.

Troisième exemple : ferez-vous confiance à un informateur qui ignore les remarques ou revendications qu’on lui adresse, qui évite le débat sur son travail, qui ne corrige pas ses erreurs, etc. ? Un autre critère sera donc l’acceptation et même la mise en musique de la critique sociale sur le plan déontologique.

Et ainsi de suite.

La démarche véritale nomme les différentes étapes de la procédure que doit mettre en œuvre tout informateur sérieux et rigoureux, et qui espère conquérir la confiance de son public. Ces étapes – on le voit – ne concernent pas le FOND de l’article ( ou de l’émission), mais la façon dont cet article a été fabriqué. C’est pourquoi elle ne limite en rien la liberté d’expression. Et pourquoi elle peut être éventuellement vérifiée par des observateurs extérieurs. Ce qui permettrait de « labelliser » l’information ainsi élaborée.

En attendant, tout informateur sérieux pourrait s'engager à respecter l'essentiel de cette procédure, en tout cas dans son esprit.

On a compris en quoi cette démarche ne garantit pas la vérité de telle ou telle information. Seulement, elle certifie que l’informateur a honnêtement et sérieusement suivi toutes les étapes qui permettent de produire une information crédible. Et le degré de vérité de ce type d’information labellisée est assurément plus élevé que la plupart des autres informations qui ne donnent aucune assurance sur la qualité du processus de fabrication de l’information.

La démarche véritale réunit de façon exhaustive l’ensemble des éléments de cette procédure de qualité :

Plan factuel (descriptif, constat)

1 – Exactitude (vérité, conformité, justesse, cohérence, …)

2 – Précision (concision, rigueur, clarté, particularité, …)

3 – Complétude (logique, complexité, exhaustivité, circonstancié…)

4 – Vérification (sur le terrain, auprès des acteurs concernés,…)

5 – Recoupement (avec d’autres sources, auprès d’autres acteurs…)

6 – Distinction fait/opinion (dans la mesure du possible)

7 – Investigation (originalité, information recherchée ou rapportée, de première ou seconde main, etc.)

8 – Éléments fournis par le public (commentaires, rectifications,…)

Plan de la signification (interprétatif, jugement)

1 – Test du contradictoire (les thèses autres ou inverses ont été étudiées)

2 – Honnêteté intellectuelle (conscience, sincérité, bonne foi, hiérarchisation, absence de manipulation, etc.)

3 – Impartialité (neutralité, absence d’animosité, équité, objectivité…)

4 – Respect de la loi (en général + en particulier loi juillet 1881)

5 – Intégrité (ni pub ni autocensure, refus des cadeaux, du copinage masqué…)

6 – Indépendance rédactionnelle interne (pub, actionnaire) et externe (Etat, acteurs puissants,…)

7 – Relativisme (nuance, prudence, pas de jugement moral sur les personnes, se mettre à la place de l’autre, modestie,…)

8 – Tact, humanité (respect, sensibilité, ouverture d’esprit,…)

Toute information, même la plus descriptive et objective possible, comporte nécessairement une part de subjectivité : choix du sujet, de l’angle, du périmètre (lieu, temps, personnages, etc.), interprétation, etc. C’est pourquoi nous pouvons étudier toute information publiée sous ses deux aspects descriptif et interprétatif, factuel et significatif, du constat et du jugement.

>> Pour les articles d’opinion (éditorial, commentaire, critique, caricature, tribune libre, interviews, etc.), la tolérance envers l’aspect interprétatif est évidemment plus grande que dans le cas d’un article se voulant purement ou essentiellement informatif.

Pour en savoir plus :

- « L’information responsable, un défi démocratique » : Analyse et propositions pour une information fiable et responsable

- « Décryptez l’information ; pour ne plus vous laisser manipuler par les médias »

- « Le Guide de l’écriture journalistique » : Un classique référencé dans les écoles de journalisme

- « Ethique de l’information » Rubrique de réflexion et d’actualité sur Débredinoire + les fondamentaux

 

 

Le dialogue sur des questions existentielles est-il encore possible ?

Pour Emmanuel-Juste Duits, le choc des identités n’est qu’une conséquence du refus du dialogue socratique. Il faut réhabiliter la notion de vérité pour rendre possible de nouvelles agoras, où les différents acteurs se rencontrent – réellement et non superficiellement.

Par Emmanuel-Juste Duits

E-JD

Emmanuel-Juste Duits.

On est dans une société où l'on parle sans cesse de "rencontre", de "communication" et de vivre-ensemble et tout cela sonne faux. On se prétend "tolérants" mais la tolérance consiste la plupart du temps à aller au foot ou danser ensemble, sans discuter des sujets qui fâchent. Un lecteur du Monde diplo et un autre de Valeurs actuelles, une fille voilée et un laïc convaincu, pourront-ils être amis ? Rien n'est moins sûr !

Tolérance signifie désormais : "Tu peux penser ce que tu veux, moi je pense le contraire et on n'en discute pas."

On dit "chacun sa vérité". On est dans un mensonge profond. D'où le malaise partout palpable, les gens qui se croisent dans la défiance, les replis communautaires.

justeLa question principale de mon ouvrage est celle-ci : "Le dialogue avec l'Autre est-il réellement possible – ou illusoire ?"

Je ne parle pas d'un dialogue superficiel autour du sport ou du dernier film ; je parle du dialogue le plus profond et engagé, le dialogue qui porte sur les valeurs, les choix existentiels et politiques.

Cette question va très loin. Par exemple, le dialogue avec le fondamentaliste religieux, ou le complotiste, ou le créationniste, est-il possible – ou non ?

Notre société est tout sauf la société du dialogue existentiel. Rencontrer des gens pour prendre le thé, faire la fête ou aller au foot, c'est le contraire du dialogue - exigeant et dangereux pour les deux parties.

Il y a deux possibilités :

  • Soit le dialogue existentiel est impossible ; chacun est enfermé dans ses valeurs, sa culture, sa communauté ou ses intérêt. Chacun accède à certains fragments du réel, à certaines expériences, qu'il ne peut pas partager avec les autres atomes sociaux. Les différentes philosophies et cultures sont incommensurables. Dans ce cas, il ne reste que les affirmations identitaires. On ne peut ni partager ni comparer les options en présence ni trouver un terme de dépassement aux oppositions. C'est le choc des civilisations, des intérêts, des croyances.
  • Soit le dialogue existentiel est possible, on peut partager les faits, les expériences, puis chercher ensemble leur signification. Il est possible aux individus et aux collectifs de s'extraire de leur vision du monde. Un monde commun est possible. La notion de "vérité" (comme accord possible des esprits aux cultures différentes) fait sens.

Départager entre ces deux réponses n'est pas simple.

Je prétends que la plupart des Européens postmodernes ont intériorisés l'option "pessimiste", anti-socratique, celle qui prétend que le dialogue existentiel est impossible.

Ils cachent ce désespoir jeté sur la raison sous le mot de "relativisme" et de "tolérance". En réalité, par cet impossible dialogue, l'on va vers le choc des identités, qui n'est qu'une conséquence du refus du dialogue socratique.

Les relativistes contemporains ont intériorisés les idées suivantes :

  • les systèmes de valeurs ne peuvent pas être comparés rationnellement, ils relèvent de choix indécidables (Max Weber) ;
  • les questions religieuses, métaphysiques, ne relèvent pas de l'argumentation, mais de la "foi" et la non-"foi" tout aussi irrationnelles l'une que l'autre ;
  • les questions politiques relèvent d'intérêts ou de volontés de puissances opposées, et ne sont pas dépassées par un Bien commun.

Dans cet horizon, le dialogue ne sert plus à rien. Il ne reste au mieux que la juxtaposition des communautés (au sens large : la communauté des conspirationnistes, etc.) ou la guerre de tous contre tous.

Pour réhabiliter le dialogue, il faut reconduire une chaîne conceptuelle, qui inclut la notion de vérité, de monde commun, de partage possible des expériences, de dépassement des intérêts particuliers.

Il faut donc lutter sur sa droite et sur sa gauche contre de nombreuses vulgates, issues de Marx, Nietzsche, Weber.

C'est l'objet de mon livre. Réhabiliter la notion de vérité pour rendre possible de nouvelles agoras, où les différents acteurs se rencontrent – réellement et non superficiellement.

> Emmanuel-Juste Duits cumulé diverses expériences et métiers (de gardien de nuit à animateur de tchatches) avant de devenir enseignant en philosophie. Il a animé différentes associations-citoyennes, dont les Bistrots de l'info, et a publié plusieurs ouvrages sur la civilisation métissée et ses usages possibles.

Son dernier essai, "Après le relativisme", traite du désarroi de l'homme européen et des sources du nihilisme insidieux qui le ronge. Il propose des pistes pour sortir par le haut de notre crise de civilisation et renouer avec le projet socratique de "recherche de la vérité par la raison" - mais une raison ouverte et cosmopolite, dans le sillage d'Edgar Morin.

Sur la vérité : Bouveresse contre Foucault, au nom de Nietzsche

La « vérité » est un concept décidément très fécond. C’est intéressant de voir que les philosophes se disputent toujours autour de ce concept, comme le fait Bouveresse contre l’approche de Foucault en invoquant Nietzsche en figure tutélaire commune.

nietzsche2

Friedrich Nietzsche.

Chacun a son idée de la vérité, serait-ce de penser qu'elle n'existe pas. D'autres sont certains d'avoir la bonne définition. Quoiqu'il en soit, nul n'a jusqu'à aujourd'hui prouvé de toute évidence qu'il détenait l'équation ultime expliquant tout.

On pourrait dès lors penser que débattre autour du concept de vérité est inutile. Personnellement, je pense qu'au contraire, c'est passionnant, parce que cela nous indique où chaque interlocuteur se situe. Ses convictions, sa vision du monde influent sur son discours. Tâcher d'élucider les positions respectives, leurs présupposés et ce que cela implique aussi dans le domaine politique et social, c'est selon moi faire œuvre utile et sert à affiner notre propre perception de la réalité.

Ainsi, cette disputatio entre les philosophes Bouveresse et Foucault...

bouv fouc

Cliquer sur l'image pour lire l'article en entier.

...nous permet d'approfondir notre appréhension du monde comme objet indépendant de notre perception ou indissolublement lié à elle. Selon que nous adoptons l'une ou l'autre conception, notre attitude psychologique, morale, existentielle enfin, sera différente.

Bouveresse

Jacques Bouveresse.

foucault

Michel Foucault.

 

 

 

 

 

 

 

13 – L’Eglise catholique : des principes que la Miviludes pourrait classer « dérives sectaires »

Démonstration par l’absurde : si la Miviludes ne réservait pas ses critères de définition de «secte» ou de «dérive sectaire» aux seules minorités spirituelles, elle devrait logiquement inclure l’église catholique dans sa liste d’organisations à combattre. Et pas seulement elle…

Les reproches faits aujourd’hui aux « sectes » en France sont bien connus : déstabilisation mentale, prétention à détenir la vérité, rupture avec la famille, exigences financières, prosélytisme, etc.

Si l’on ne retenait que ces cinq “indices”, la Miviludes, qui veille sur les « dérives sectaires », devrait logiquement inclure dans sa ligne de mire la première religion française. Celle-ci affiche en effet tout à fait officiellement dans sa charte fondamentale, le droit canon, qui est sa “constitution” actuelle, des principes qui sont considérés ailleurs comme des critères de "dérives sectaires".

Mais la religion catholique n'a pas à craindre les foudres de la mission interministérielle puisque que, sans être officiellement "reconnue", elle l'est tout à fait officieusement, comme le sont les autres grands courants religieux traditionnels.

droit canonQu’apprend-on dans ce Code de droit canonique, réactualisé en 1983 ? En vrac, voici quelques extraits[1] :

- L’œuvre d’évangélisation ou activité missionnaire[2] est considérée comme un « devoir fondamental auxquels tous les fidèles, conscients de leur responsabilité, prennent leur part ». Non seulement le prosélytisme est accepté, mais il est un "devoir".

- L’Église possède son propre droit pénal auquel un livre entier est consacré avec 89 paragraphes sur les sanctions. Elle justifie l’existence de ce droit, « outre la tradition historique, dans le fait que l’Église constitue une société juridiquement parfaite tout comme l'état, et que le propre de toute société est de comporter un pouvoir coercitif sur ses membres ». Le canon 1311 « proclame le droit inné et propre de l’Église à contraindre, par des sanctions pénales, les fidèles qui violeraient ses lois ». On distingue les censures, qui peuvent être perpétuelles (excommunication, interdit, suspense), les peines expiatoires (interdiction de demeurer dans un territoire, privation d’un pouvoir, renvoi de l'état clérical, etc.), les remèdes pénaux (monitions, corrections), les pénitences. Une liste impressionnante décrit les différents délits passibles de répression.

De même, alors que le Christ commande clairement : « Tu ne jugeras pas ! », l’Église possède sa propre organisation judiciaire, très élaborée, qui « détermine avec précision les différents tribunaux ecclésiastiques, leurs compétences respectives et les règles générales de leur fonctionnement ». Seul le pape bénéficie du « privilège de juridiction » et « n'est jugé par personne ».

Apostasie

L'Association humaniste du Québec offre un "formulaire" d'apostasie à ceux qui désirent rompre avec la religion catholique.

- Parmi les délits sanctionnés par l’excommunication, on note l’apostasie (« rejet total de la foi catholique »), l’hérésie (« négation obstinée, après la réception du baptême, d'une vérité de foi ou le doute obstiné sur cette vérité ») et le schisme (« refus de soumission au pape ou de communion »).

- Le devoir de l’Église est de « garder saintement la vérité révélée, de la scruter profondément, de l’annoncer et de l’exposer fidèlement. Pour cela, elle est sûre de bénéficier de l’assistance de l’Esprit-Saint, garantissant son infaillibilité dans l’exercice de sa fonction d’enseigner ».

L'Eglise affirme donc toujours détenir LA vérité.

L’exercice de cette responsabilité de l’Église est « garanti par l’affirmation d’un droit de prêcher l’Évangile à toutes les nations, droit inné, affirme-t-on, pour marquer son caractère originaire par rapport aux pouvoirs humains ». Le canon 750 déclare : « On doit croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la Parole de Dieu écrite ou transmise par la tradition, c’est-à-dire dans l’unique dépôt de foi confié à l’Église »[3].

- Le Code « parle de l’obéissance chrétienne à ce que les Pasteurs sacrés, comme représentants du Christ, déclarent en tant que maîtres de la foi ou décident en tant que chefs de l’Église ». Tous les clercs « doivent révérence et obéissance envers le Pontife romain ».

On doit obéir au pape et à la hiérarchie de l'Eglise avant d'obéir à sa conscience.

denier- Le canon 222 § 1 « impose aux fidèles l’obligation de subvenir aux besoins de l’Église. Cette obligation fonde le droit de l'Église à exiger de ceux-ci ce qui lui est nécessaire. (...) Lorsque les offrandes spontanées ne suffisent pas, il revient à la Conférence des évêques de fixer les normes selon lesquelles les fidèles seront appelés à contribuer aux charges de l'Église. (...) Le Code prévoit aussi la possibilité pour l’évêque diocésain, et pour lui seul, de lever avec prudence un impôt pour les besoins du diocèse ».

- Plusieurs canons abordent la question de la vie dans les instituts de la vie religieuse (ordres, congrégations, sociétés de vie commune, etc.). Le canon 667 emploie clairement le mot « séparation du monde »[4], séparation qui « doit résulter des ruptures qui se réalisent dans la pratique de la chasteté, de la pauvreté et de l’obéissance ».

Rupture d’ailleurs évoquée dans les Evangiles : « Quiconque aura laissé maisons, frères, sœurs, père, mère, enfants ou champs, à cause de mon nom, recevra bien davantage et aura en héritage la vie éternelle ». (Mathieu 19, 29).

« Je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. »

Jésus-Christ : « Je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. »

Ou encore : « Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre : je suis venu apporter, non la paix, mais l’Épée. Je suis venu mettre la division entre [les parents] et le fils, entre le fils et les parents, entre les frères et les frères, pour dresser l’homme contre son père et la fille contre sa mère, et l’homme aura pour ennemi les gens de sa propre maison. Qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, ou qui aime son fils et sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. » (Mt 10, 34)

Quelle “secte” pourrait en France afficher publiquement un tel programme sans être immédiatement et violemment combattue, faute d'en saisir le sens profond, comme antisociale[5] ?

guide cathoL'église catholique est consciente des comportements répréhensibles qui peuvent apparaître chez certains de ses membres. Pour les combattre, elle a élaboré une grille d’identification des "dérives sectaires" à l’intérieur même de ses institutions. Si l'on peut regretter qu'elle reprenne à son compte la terminologie mal définie et propice aux amalgames destructeurs des adversaires de la diversité spirituelle, on peut en revanche la féliciter d'oser affronter ouvertement la question.

Et si chaque grande organisation humaine, pas seulement religieuse ou spirituelle, faisait de même ? En effet, la manipulation et l'abus de pouvoir sont fréquents dans pratiquement toute société humaine. Y compris dans les familles qui pourtant ne sont pas visées par les "antisectes". C'est pourtant là que les pires abus sont commis en nombre chaque année : femmes battues et tuées, enfants violés, aïeux escroqués, etc.

Enfin, last but not the least, l'Etat du Vatican, ne connaît pas la séparation des pouvoirs, telle qu'elle existe dans les démocraties. C'est une monarchie absolue. Voici ce que dit la loi fondamentale du 22 février 2001, la constitution de l'église catholique :

"Article premier

Le Souverain Pontife, souverain de l’État de la Cité du Vatican, a la plénitude des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire."

> Comprenons-nous bien. Si nous rappelons ces quelques vérités, ce n’est nullement pour critiquer la religion catholique. Nous ne prenons pas partie ici ni pour ni contre personne. Simplement, il est bon de rendre visible la différence injustifiée de traitement entre un groupe et un autre, selon que ce groupe est affublé d’une étiquette (religion) ou d’une autre (secte) tout en recouvrant à peu de choses près les mêmes réalités.

Si l’on (le gouvernement, les médias, l’opinion) se permet de faire ainsi deux poids deux mesures, c’est au nom de la tradition, de l'intolérance et du refus de la concurrence.

[1] Tirés du Précis Dalloz "Droit canonique".

[2] Passages en italiques = souligné par nous.

[3] La conviction que l’Eglise catholique est « l’unique véritable Église du Christ », notamment par rapport aux orthodoxes et aux protestants, a été réaffirmée à Rome, dans un document publié par le préfet de la Congrégation de la foi. Aucune autre église ne peut donc se considérer comme détentrice de la vérité.

[4] Cette « séparation » est proprement, d’ailleurs, parole d’Evangile : « Quiconque aura laissé maisons, frères, sœurs, père, mère, enfants ou champs, à cause de mon nom, recevra bien davantage et aura en héritage la vie éternelle ». (Matthieu 19,29). Cette parole, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, a été mal comprise. Elle n’incite nullement à séparer les familles (ce que les religions et certains mouvements ont malheureusement pris au pied de la lettre). Elle pourrait plutôt signifier que chacun, s’il veut vivre heureux et en harmonie au milieu de ses frères, doit faire triompher en lui l’amour de l’Amour.

[5] Si, par exemple, la circoncision n’était pas le fait de religions maintenant reconnues mais de nouveaux mouvements spirituels, quels cris d’orfraie, quelles dénonciations horrifiées de « mutilation physique sur enfants endoctrinés » n’entendrait-on pas !

> A suivre :

14 – Les “sectes” : des religions qui n’ont pas réussi ?

> Tous les articles parus.

 

« Penser contre soi-même », le regard d’Edito sur mon livre

Edito+Klartext, le magazine suisse des professionnels des médias, a publié une excellente critique de mon dernier ouvrage.

Voici la recension de mon livre "Décryptez l'information" parue dans le numéro 3/2401 du magazine Edito+Klartext, le magazine des journalistes suisses :

Edito Decrypter

J'apprécie beaucoup cette présentation de mon ouvrage qui en fait bien ressortir la substantifique moelle....

La Une de ce numéro d'Edito :

Edito Une