La Miviludes vient de publier son rapport 2016 dont la presse se fait écho. Alors que le mot « secte » n’a aucune définition juridique et n’est pas reconnu par le gouvernement, les médias (y compris l’AFP) continuent à l’employer, présentant même cet organisme officiel comme « Mission anti-sectes » et incitant ainsi le public à craindre et haïr les spiritualités minoritaires.
> Pour une bonne compréhension de cet article, il faut s'en tenir aux aspects déontologique et sémantique de la question des "sectes" dans les médias. Ce n'est pas une charge contre la politique "antisecte" du gouvernement, même si je suis obligé de montrer en quoi cette politique est critiquable pour faire ressortir l'importance du rôle des professionnels de l’information. Et donc la nécessité de s’astreindre à un usage rigoureux des termes, sous peine de dérapages aux dégâts humains considérables, particulièrement sous la pression émotionnelle d’événements tragiques comme nous en vivons aujourd'hui.
> Employer le mot juste : un devoir déontologique ! D'après un texte du groupe de travail sur le vocabulaire de l'Observatoire de déontologie de l'information (ODI)
Présenter la Miviludes (Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) comme la « Mission anti-sectes » constitue de fait une discrimination inadmissible. Les autorités ne luttent pas « contre les sectes » ! Celles-ci, dans leur acception de « nouvelles spiritualités », ne sont pas interdites, comme le croient beaucoup de Français en conséquence d'une mauvaise propagande. Elles ont les mêmes droits d’existence et d’action que n’importe quelle autre association.
En outre, le mot « secte » n'a pas de définition juridique : il a été banni (en théorie du moins) des discours officiels.
En ayant malgré cela recours à ce terme pour désigner des mouvements spirituels controversés mais pacifiques, la presse alimente de fait une haine publique envers des groupes de citoyens décrétés suspects à priori. Comme elle l'a fait entre les deux Guerres envers les Juifs.
Arbitraire
En France, ces mouvements spirituels sont bafoués, mis au pilori, calomniés, même s’ils n’ont pas été condamnés en tant que groupes par les tribunaux. L’exemple vient du sommet de l’Etat puisque la justification excipée par les médias et les lobbies anti-nouvelles-spiritualités (dits « anti-sectes ») réside dans la politique menée par un service du premier ministre nommé Miviludes. Cette mission interministérielle décrète que tel ou groupe est « à risque » de façon totalement arbitraire, jetant ainsi sur lui opprobre et suspicion. Et elle bafoue ainsi un principe fondamental de notre droit : la présomption d’innocence.
En effet, ses avis se basent sur des « signalements » (la plupart du temps des questions de citoyens du type : « Tel groupe est-il une secte ou non ? »), des rumeurs ou des coupures de presse. Ils ne résultent ni d’enquêtes de terrain, ni d’une confrontation directe avec ces groupes, ni de décision de justice, ni d’information scientifique (sociologique). Et la Miviludes refuse catégoriquement tout point de vue et tout débat public contradictoires.
Il est dès lors incompréhensible (sauf à admettre qu’elle est partie prenante dans cette volonté de discréditer les spiritualités minoritaires) et inadmissible que la presse reprenne son contenu sans aucun recul.
Infaillibilité quasi-papale
En vingt ans de politique nationale anti-nouvelles-spiritualités, pas un seul article ou reportage, dans les médias ou la presse, pas une seule émission sur le fonctionnement ou les méthodes de la Miviludes, sur la réalité des suspicions/accusations, sur le financement des associations soi-disant de victimes (en fait animées par des anti-nouvelles-spiritualités et subventionnées par l’État), sur l’influence de ces entités sur la justice elle-même, sur les victimes de cette politique discriminatoire, sur les bienfaits revendiqués par les membres de ces mouvements, etc.
Pour mes confrères, la parole de la Miviludes ou de l’Unadfi (ou du CCMM) est forcément vérité absolue. S’interroger sur sa validité, évaluer son action, enquêter sur la réalité du terrain en écoutant tous les interlocuteurs serait pour eux un crime : on ne conteste pas, dans un pays démocratique, une institution comme la Miviludes ("Pensez ! Elle défend les victimes des sectes"), dont les ukases bénéficient d’une infaillibilité quasi-papale.
Que des médias ouvertement partisans utilisent volontairement le mot « secte », on peut sinon l’admettre, du moins le comprendre. Mais que ce soit l’AFP, l’agence censée être neutre qui alimente tous les médias en nouvelles, qui le mette ainsi en avant, c’est un scandale que la profession devrait dénoncer.
Surveiller les dérives de la liberté d’expression ?
Si cet article ne suffisait pas à faire comprendre à mes confrères le scandale que représente le mode d'action de la Miviludes et le fonctionnement actuels de la politique française (et donc de la nécessité de garder son esprit critique face à ses avis et rapports), voici cet extrait d’un commentaire de maître Eolas sur son blog :
« [Ce qui fait] scandale (…), c'est l'existence d'une autorité (donc d'une dépense publique) dont le rôle est de surveiller des organisations religieuses considérées comme a priori suspectes. Imaginez, puisque vous vous voulez faire une analogie, qu'il existe une mission interministérielle chargée de surveiller les dérives de la liberté d'expression, chargée :
- D’observer et d’analyser le phénomène des organes de presse et des sites publics sur internet dont les agissements sont attentatoires aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ou constituent une menace à l’ordre public ou sont contraires aux lois et règlements ;
- De favoriser, dans le respect des libertés publiques, la coordination de l’action préventive et répressive des pouvoirs publics à l’encontre de ces agissements ;
- De développer l’échange des informations entre les services publics sur les pratiques administratives dans le domaine de la lutte contre les dérives de la liberté d'expression ;
- De contribuer à l’information et à la formation des agents publics dans ce domaine ;
- D’informer le public sur les risques, et le cas échéant les dangers, auxquels les dérives de la liberté d'expression l’exposent et de faciliter la mise en œuvre d’actions d’aide aux victimes de ces dérives ;
- De participer aux travaux relatifs aux questions relevant de sa compétence menés par le ministère des affaires étrangères dans le champ international.
Dans les deux cas, on touche à une liberté fondamentale : liberté d'expression, liberté de conscience. Et puisque dépense publique il y a, on peut aussi soulever qu'il existe un organe chargé de rechercher les dérives illégales et de lutter contre : le parquet, qui manque de sous pour ce faire, mais a déjà le personnel et les locaux. »
> J’ajoute deux choses :
- S’il faut effectivement surveiller les groupes à risque, pourquoi la Miviludes s’est-elle limitée toutes ces années (sauf depuis quelques mois) aux mouvements pacifiques en laissant un boulevard aux groupes dangereux, comme les salafistes, dont les dangers et l’infiltration sur le sol français étaient connus depuis longtemps (depuis le début des années 80 !) ?
- S’il faut effectivement offrir une aide aux victimes de manipulations préjudiciables, cela ne devrait pas se faire par des entités (Miviludes, Unadfi, etc.) qui, étant engagées contre les nouvelles spiritualités, sont à la fois juges et parties. Ce qui leur permet notamment d’influer sur le cours de la justice en présentant des dossiers déjà bouclés estampillés d’un sceau officiel. Au détriment des droits de la défense.
Propaganda against so called « cults » will be one day remembered as the same as the black propaganda made by Nazi against Jew, it has got the same stereotypes … « cult members » are no longer people o individuals, but robots, puppets … so, following this premise, they (the so called « cult members » deserve limitation of civil, political and human rights. The memory remains
Enfin un peu de raison dans ce sujet appréhendé avec si peu de raison jusqu’ici !
Merci à toi jean Luc pour ce travail nécessaire.