Du 20 au 22 juin 2012 se tiendra au Brésil, à Rio, la Conférence des Nations Unies sur le Développement Durable dite « Rio+20 » ou « Rio 2012 ». L’occasion de fêter un développement durable dont le pétrole risque de retarder encore longtemps l’avènement.
En vingt ans, que d’espoirs soulevés et que d’attentes exprimées concernant la prise en compte de l’environnement et du développement durable ! De nombreuses lois spécifiques (eau, air, déchets, recyclage, économies d’énergie, etc.) ont été votées, des conférences internationales se sont tenues, suivies souvent d’engagements formels. La cause de l’écologie n’avait jamais été aussi clairement proclamée et défendue que durant cette période.
Et pourtant…
Et pourtant, en France, le ministère de l’écologie a été dissous. Le président de la République lui-même trouve que « l’environnement, ça commence à bien faire ! » Un scientifique de renom remet en cause le danger climatique. Les électeurs verts atteignent avec peine le score de 2,30 % de votes au premier tour de l’élection présidentielle.
L´hypocrisie d´un système
Bref, l’écart s’accroît entre les préoccupations de la population et la volonté politique. Entre l’urgence reconnue d’une action en profondeur pour protéger nos milieux et notre santé, et la boulimie des consommateurs soutenue par les décideurs au plus haut niveau.
Jamais sans doute n’a été si patent l’hypocrisie d’un système, à l’échelle mondiale, qui affiche des bonnes intentions et agit surtout pour le profit.
Symbole de cette tension, le pétrole, produit dont on imaginait qu’il allait disparaître et dont les réserves s’accroissent sans cesse, notamment grâce à la fracturation hydraulique.
Aux États-Unis, l’industrie du pétrole « est en plein boom après deux décennies de baisse de la production. L’industrie pétrolière extrait plusieurs millions de barils de plus chaque semaine, depuis les fonds marins du golfe du Mexique jusqu’aux prairies du Dakota du Nord. (…) En 2011, les États-Unis n’ont importé que 45 % des carburants liquides qu’ils ont consommés » contre un pic de 60 % en 2005 ! La production nationale, qui était de 4,95 millions de barils/jour en 2008 est remontée à près de 5,7 millions de barils/jour et pourrait atteindre 7 millions en 2020 (source New York Times, cité par Courrier International).
Le pétrole, nerf de la guerre et "sang de la paix"
Le président Obama, qui était pour la lutte contre le changement climatique, le développement des énergies renouvelables et la mise en place de quotas d’émission carbone, quand il était candidat, a, une fois élu, ouvert de nouvelles terres et eaux fédérales au forage et soutenu la construction d’un oléoduc en provenance du Canada, au grand dam des écologistes.
Ailleurs dans le monde, la soif de pétrole tue toujours des milliers de gens. Après la guerre Iran/Irak, et celle du Golfe avec environ 200 000 morts civils et militaires et la dévastation des puits du Koweit, c’est au Soudan que plusieurs régions frontalières riches en ressources pétrolières ont été, ces dernières semaines, le théâtre de violents combats, les pires depuis la partition du pays en juillet 2011.
Le pétrole, s’il est bien connu pour être « le nerf de la guerre », est devenu le « sang de la paix », selon la formule d’Edgar Faure, dans un livre intitulé « le Pétrole et la guerre ».
Faut-il désespérer ? Surtout pas ! D’innombrables associations et ONG luttent pour faire évoluer les mentalités, empêcher les projets les plus polluants, exiger l’application des lois existantes et la création de nouvelles. Les citoyens veulent prendre le destin du monde en mains. Les gouvernements ont montré leurs limites et leur mauvaise foi. C’est ce qu’a compris la société civile, qui présentera ses propres pistes de réflexion sur l’avenir de notre planète, à l’occasion du Sommet des peuples (voir encadré), parallèlement à Rio+20.
Malheureusement, ce sera une goutte d’eau face au flot de pétrole…
« Le temps est arrivé où la société civile ne doit pas seulement se limiter à protester dans un contre sommet. Elle a besoin de dessiner un stratégie de changement avec des perspectives claires et fortes, organisées autour d’un petit nombre de grandes mutations ayant fait l’objet d’une identification collective. Ni l’addition de centaines de problèmes, tous réels mais déconnectés les uns des autres, ni la recherche d’un bouc émissaire et d’une cause unique, comme « la mondialisation », nouvel avatar du « capitalisme » ne répond à cette nécessité stratégique. Le sommet Rio+20 peut idéalement déboucher sur une vision pluri-culturelle du soubassement éthique et politique capable de transformer l’architecture de la gouvernance mondiale. Il est impératif que les parties prenantes du processus reflètent la diversité des sociétés, que la plupart ne soient pas relégué encore une fois au rang de spectateurs impuissants. » |