Jean-Marie Charon et les conseils de presse


Par Jean-Luc Martin-Lagardette

Le mercredi 18 juillet 2007, Jean-Marie Charon, sociologue de la presse, chercheur au CNRS, auteur de "Le Journalisme" (janv.2007, Milan) était l´invité de nouvelobs.com. Voici ce qu’il a répondu à la question de je lui avais posée.

 

Question : Jean-Marie Charon est contre la régulation des médias par une instance indépendante tripartite (éditeurs-journalistes-public), comme celle dont nous sommes quelques journalistes à tester la faisabilité. A mon avis, il n´a pas vraiment pris la mesure des dégâts dans l´esprit des citoyens de cette absence déloyale (la presse est un pouvoir sans contrepouvoir organisé) de règle du jeu - sauf à laisser faire les tribunaux. D´où la baisse des lecteurs et l´explosion du Net. Que propose-t-il (en dehors des médiateurs - juges et parties de toute façon) pour que le public puisse faire part en continu de ses doléances face aux dérives journalistiques et médiatiques ? Sans cette possibilité d´être remise en question en permanence par des tiers indépendants, la "grande presse" aura du mal à retrouver de la crédibilité...

Réponse : C´est vrai que je ne crois pas beaucoup aux instances tripartites qui ne sont pas à la mesure de l´ampleur et de la diversité des problèmes qui se posent. Je crains les phénomènes de boucs émissaires sur quelques affaires plus voyantes. Pour moi l´enjeu est celui du renforcement de la responsabilité des journalistes individuellement et collectivement (rédactions). Cela passe par la formation (notamment permanente), les structures de médiations (dont les médiateurs), le développement de la critique des médias, la multiplication de lieux de débat public et de mise en cause des problèmes qui se posent dans le traitement de l´information (soit aussi l´éducation aux médias). Si j´étais cynique je demanderais en quoi l´information est plus responsable et de meilleure qualité dans les pays qui disposent depuis des années de Conseils de presse. Le sujet est cependant trop sérieux. Il n´y a pas de réponse simple et surtout définitive au problème posé. Il s´agit de question de mobilisation tant des professionnels que de la frange la plus sensibilisé du public.

Question de Internaute : Le pluralisme de la presse exige l´indépendance envers les pouvoirs financiers et politiques : Comment y parvenir après des années de soumission et de compromission ?

Réponse : Le sujet n´est pas simple. Commençons par affirmer le principe d´une séparation souhaitable entre propriété des médias et activités industrielles, surtout lorsqu´elle dépend de la commande publique. En second lieu travaillons à des structures qui garantissent l´autonomie rédactionnelle de chaque titre, station, chaîne, service web. Pourquoi pas des formules de contrats entre directeurs de la rédaction et gestionnaires, qui fixent un cadre pluriannuel. Quid de sociétés de rédacteurs et de prérogatives les concernant, etc. Il faut aussi réfléchir à des formes de propriété qui donnent plus de place au public (sociétés de lecteurs, bonification fiscales pour investir dans son propre média), sans parler de structures telles que les fondations (dont le statut juridique devrait être modifié). Voici quelques pistes pour commencer. Le sujet est vaste et pas suffisamment investi par le politique, ni la société, ces dernières années.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.