Sans doute, l’un des pires « péchés » de la grande presse est d’ignorer que l’information est un bien d’intérêt public. C’est de considérer que seule l’équipe dirigeante (avec les actionnaires) sait ce qui est bon pour le journal, peuvent définir sa stratégie. Les lecteurs souhaiteraient être mieux pris en considération.
La rédaction du Monde ne supportait pas le « dirigisme » de la journaliste et plusieurs chefs d’équipe ont quitté volontairement leurs fonctions, provoquant une crise ouverte conclue par la démission de la directrice.
Mais ni la direction, ni les journalistes ne semblent avoir réalisé la vraie nature de ce conflit : la crise de confiance envers une presse « de référence » trop coupée autant de ses lecteurs que du public en général. L’ancien modèle de gestion d’une entreprise d’information ne peut plus se contenter de se reproduire à l’identique. A diriger un journal sans l'associer étroitement à son public dans sa réalisation même.
Fait significatif : un des points d’achoppement entre la directrice et ses équipes est la « transformation [du journal] liée au numérique ». Mais cette orientation n’est pas simplement technologique ou organisationnelle, elle est profondément sociétale. Elle est devenue indispensable parce que le lecteur/public veut aujourd’hui prendre place au cœur même de la gestion quotidienne du journal. Au moins être associé de façon plus intime aux enjeux de son développement.
C’est en tout cas ce qui ressort nettement des commentaires apposés par les lecteurs au bas de l’article annonçant la démission de la directrice. Beaucoup se disent frustrés de cette opacité maintenue sur le fonctionnement du quotidien.
Voici un étonnant florilège de commentaires allant tous dans ce sens :