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« État de sujétion psychologique » : dialogue avec le président de la Fédération française de psychiatrie

Les décisions de justice doivent être prises sur des critères de droit, donc de rationalité. Or, l’« état de sujétion » d’une personne dont on abuse de la faiblesse, qui constitue la base de l’accusation de « secte », n’a pas été défini. Pas plus juridiquement que scientifiquement. J’ai posé la question au président de la Fédération française de psychiatrie.

Un article paru sur Ouvertures révèle les réponses de différents acteurs et institutions légitimes à s’exprimer sur la valeur de la notion d’« état de sujétion psychologique », incluse dans loi About-Picard de 2001, dite loi "antisecte". Le 7 septembre 2016, j'ai notamment interrogé Bernard Odier, le président de la Fédération française de psychiatrie.

Mme Picard, à l'origine de la loi qui porte son nom, actuellement présidente de l'Unadfi, et M. Fenech, ex-président de la Miviludes, en 2011, à l'occasion du 10e anniversaire du texte.

Je présente ce dialogue sous la forme d’une interview fictive mais tirée d’un échange réel par mails (septembre 2016).

J-L ML.- Pouvez-vous me dire s’il existe une base scientifique (médicale, psychiatrique, psychanalytique, psychologique, clinique, autre) au concept de "état de sujétion psychologique" (je ne parle pas de la suggestion).

Je n’arrive pas à trouver la moindre référence à ce sujet dans des travaux scientifiques, médicaux ou cliniques.

Je connais les explications de la Miviludes, l’organisme chargé de lutter contre les dérives sectaires. Mais celle-ci ne cite aucune base scientifique pour définir ce concept, hormis les affirmations de quelques psychiatres qui travaillent avec ou pour elle ou qui sont appelés à trancher sur ce point en tant qu’experts devant les juges. Par ailleurs, la Miviludes est un organisme administratif ; ses avis ne peuvent se substituer aux connaissances scientifiques.

Pouvez-vous m’indiquer s’il existe une définition précise de concept, ainsi que les références, études ou avis éventuels ​dont la profession de psychiatre disposerait sur l’état de l’art ?

Bernard Odier, président de la Fédération française de psychiatrie.- Vous posez une question dont les développements psychiatriques sont actuels et à venir. Le terme est administratif, juridique, avant d’être psychologique ce qu’il est aussi. Le terme sujétion décrit plutôt une relation qu’un état, tandis que la clinique psychiatrique est surtout individuelle. Cependant l’intérêt de la psychiatrie pour les aliénations conduit à ce que les psychiatres se penchent sur ces états de soumission, souvent de servitude volontaire.

JL ML.- Je partage le fond de vos remarques. Le problème est que, précisément dans le cas de la loi dont il est question, le terme de sujétion est pris non pas comme une relation mais comme un "état".

Je ne questionne pas sur le problème de "l’abus de faiblesse", qui existe depuis un certain temps dans notre arsenal juridique mais sur l'abus de faiblesse d'une personne en état de sujétion. C’est cette formulation qui me paraît problématique. D’autant plus qu’elle est validée par des psychiatres (les experts des tribunaux) qui vont jusqu’à cautionner l’idée de "captation du libre arbitre" d’une personne par une autre.

​Les problèmes de dépendance, soumission, etc., sont une chose ; autre chose est l’état psychologique d’une personne dont une autre personne aurait annihilé le libre arbitre pour se la soumettre, ce qui me paraît impossible à prouver comme à réaliser.

La loi crée un nouveau crime qui s'appuie sur un concept que les psychiatres et les psychologues sont chargés devant les tribunaux de déterminer, avec toutes les conséquences qu’un jugement peut entraîner sur la vie des personnes concernées.

"L’état de sujétion" d'une personne (ce qui est autre chose, pour la loi et pour les professionnels du psychisme convoqués, que l’état de dépendance) existe-t-il vraiment ? Est-il seulement possible ? Comment déterminer cliniquement cet état, comment le définir ?

Bernard Odier.- Sous réserve que vous ne fassiez pas une interprétation restrictive du terme "état de sujétion" (qui implique implicitement l’existence d'une relation aliénante), vous serez peut-être intéressé par le texte ci-joint [voir ci-dessous] d'une communication scientifique ».

> 2013 colloque de la Miviludes, psychiatre des hôpitaux, Centre psychiatrique du Bois de Bondy au colloque de la Miviludes du 23 novembre 2013.

JL ML.- D’accord avec les recommandations de l’auteur psychiatre quand il écrit : « Je me méfie beaucoup des concepts flous et de leur extensivité abusive. Je comprends donc la méfiance de nombreux juristes autour des notions d’emprise, de perversion narcissique, de manipulation mentale… Il faut à tout prix récuser la toute-puissance de l’expert auquel on confierait la tâche de qualifier à lui seul l’infraction. »

C’est précisément l’objet de [notre] démarche : mettre en question ces notions floues, comme celle d’ailleurs de « l’état de sujétion », et éviter, contrairement à ce qui se passe aujourd’hui dans les tribunaux, de fonder la décision de justice sur l’avis de l’expert.

Ensuite, [nous contestions] que l’on puisse tenir ce genre de propos : « Il ne s’agit pas simplement de sujets sous emprise, sous influence, objets de manipulation mentale mais de victimes d’asservissement psychique, d’esclavage relationnel, d’emprise totalitaire, de déni d’autonomie, d’exploitation psychique de l’homme par l’homme. »

Et : « Chacun se trouve en position de régression infantile, de sujétion. Ainsi disparaissent la rationalité, la logique, l’intelligence, la capacité critique ou tout simplement l’autonomie de pensée. »

La rationalité, l’intelligence, l’autonomie de pensée ne disparaissent jamais, elles sont, au pire, trompées, orientées, abusées. Cette chosification possible de la conscience de l’homme par un autre que suppose cette notion d’état de sujétion est, [pour nous], une aberration très dangereuse individuellement et socialement parlant.

La conscience (le « je » d’une personne) n’est accessible qu’à cette seule personne (…). Le sujet n’est toujours que sujet [jamais objet], il ne peut jamais être perçu, touché et encore moins manipulé par quiconque.

Tout ce que peut faire une personne extérieure, c’est bien sûr l’influencer, l’effrayer, le contraindre physiquement, le tromper, abuser de lui, etc.

​Tout cela est possible, mais ​EN AUCUN CAS, ​cette personne ne peut lui ôter son autonomie, mettre son moi en esclavage, etc. Il y a toujours de la part du sujet victime une liberté qui adopte ou refuse la proposition extérieure, en fonction de ses critères, de ses connaissances, de ses croyances, de ses illusions, de ses attentes, etc. Car un sujet (une conscience) est une « monade » [au sens leibnizien du terme] maîtresse en sa demeure et intangible DE L’EXTERIEUR.

C’est ce contresens qui est fait par la plupart, y compris par les professionnels du psychisme, et qui est inscrit désormais dans la loi. [Nous pensons] que c’est une très grave et très dangereuse erreur. Et [nous nous étonnons] que la profession n’ait pas plus approfondi sa réflexion sur ce sujet capital. »

> Faute de réponse à ce dernier commentaire, notre dialogue s’est arrêté là.

L’« abus de faiblesse en état de sujétion psychologique » : une manipulation parlementaire ?

La formulation « abus de faiblesse en état de sujétion psychologique » est elle-même le fruit d’une manipulation. Elle a été inscrite dans la loi en lieu et place des termes « emprise » ou « manipulation mentale ». Ces termes-là, pressentis au départ par le législateur, ont été récusés car leur réalité était impossible à prouver et qu’ils pouvaient s’étendre à l’infini sur toute activité humaine.

Or, les parlementaires voulaient n’atteindre que les « sectes ». Mais, autre problème pour eux, le terme de « secte » n’a aucune existence juridique. Il est impossible de l’inscrire dans un texte de loi.

Comment faire pour quand même condamner des groupes de pensée alternative sans attenter à la liberté de penser ? Les antisectes ont trouvé une arme à double détente :

- Un : prétendre ne pas s’intéresser au contenu des enseignements diffusés par ces groupes mais ne réprimer que les actes contraires à la loi. D’où les fameux critères de la Miviludes. Le problème est que ces critères, généralistes, peuvent concerner toutes catégories de citoyens. Un délit spécifique restait nécessaire pour caractériser non plus une « secte » mais une « dérive sectaire » (qui n’a pas plus, soit dit en passant, de définition légale que la « secte »).

- Deux : concevoir un délit spécifique proche de l’idée que se fait l’opinion d’une « secte » : un groupe dont le véritable objectif est de gruger des personnes faibles pour les exploiter financièrement ou sexuellement. Le délit consisterait dans le fait de piloter la conscience d’autrui grâce à des méthodes frauduleuses, de capter son libre arbitre et de se le soumettre entièrement. Cela tombe bien, la loi condamne déjà l’abus de faiblesse. On va donc aggraver ce délit par le fait d’abuser de la faiblesse d’une personne « en état de sujétion psychologique », mais sans jamais définir ce qu’est cet « état » de sujétion.

Ce fut un coup habile, car, jointe à l’abus de faiblesse, cette formulation consacrait la croyance populaire en la maîtrise d’une conscience par une autre conscience. Personne n’a protesté jusqu’à aujourd’hui que cette maîtrise totale était impossible, puisque personne ne peut penser à la place d’un autre : personne ne peut dire je à la place d’un autre je !

On peut tromper la vigilance de quelqu’un (comme le fait le prestidigitateur), on peut profiter de son ignorance ou abuser de son amour du gain, comme dans les pyramides de Ponzi (affaire Madoff, par exemple), on peut l’escroquer en profitant de sa naïveté (personnes âgées…), etc. Tout ça, c’est de l’abus de faiblesse.

Mais affirmer qu’une personne ou une autre est en "état de sujétion psychologique" : impossible ! Et si certains psychiatres ont pu le faire lors de procès, c’est en outrepassant leur prérogative et en cautionnant une croyance qui n’a aucune base scientifique. Il suffit en effet au psychiatre de croire en la fable de la captation du libre arbitre pour orienter le dossier d’un prévenu vers une incrimination d’abus de faiblesse d’une personne en état de sujétion. Tandis qu’un autre, à mon avis, plus rigoureux, se dira incompétent et donc incapable de se prononcer sur ce point précis.

 

15 – L’imposant arsenal français contre les « sectes » est unique au monde

La France est en pointe dans la lutte contre les « dérives sectaires ». En effet, l’imposant dispositif institutionnel et législatif qu’elle a mis en place est unique au monde. Dommage qu’il soit utilisé dans l’arbitraire et la partialité. Même les faits sont manipulés pour justifier l’intolérance et la discrimination.

Dans la plupart des pays du monde, la lutte contre ce qu’on appelle en France les « dérives sectaires » entre dans le droit commun. L’action publique sanctionne les abus de groupes ou d’individus qui abusent de la crédulité des gens et commettent des infractions caractérisées. Mais, en règle générale, elle respecte les minorités de conviction. En France, celles-ci sont très mal vues et qualifiées de « sectes », ce qui permet de les persécuter du seul fait de cette étiquette, sans attendre qu’elles aient commis de délits manifestes.

A titre préventif, en quelque sorte. Alors que nul, selon la loi française, ne devrait être inquiété pour ses opinions, ses croyances ou ses convictions.

Ce n° du département Recherche & Documentation de l'ENM est consacré au thème des "dérives sectaires" en lien avec le droit et la justice.

Ce n° du département Recherche & Documentation de l'ENM est consacré au thème des "dérives sectaires" en lien avec le droit et la justice. Bien que l'emploi du terme de "secte" soit contraire au droit français, le mot est constamment utilisé dans ces colonnes.

Pour ce faire, depuis plus de vingt ans, toute une série de décisions ont été prises pour surveiller les contestataires et les originaux qui professent une foi ou une pratique « pas catholique ».

Dans cet article, nous vous présentons l’arsenal mis en place dans notre pays, arsenal qui suspend une épée de Damoclès au dessus de tous les mouvements « différents » liés à la spiritualité, au naturel ou à la santé. Des instances ad hoc ont même été crées pour mettre le territoire sous surveillance et influencer dans un sens d’intolérance la plupart des administrations et notamment la justice.

Nos informations sont tirées d’un document récent, le n° 8/2013 de la revue Justice Actualités, réalisée par le département Recherche et Documentation de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) et consacrée aux « dérives sectaires ».

« L’offensive française » contre les « sectes » a réellement démarré fin 1995 avec la publication d’un rapport de l’Assemblée nationale, intitulé « Les sectes en France ». L’événement connait un retentissement international.

Dans leur rapport, les parlementaires dressent, sur la base des informations collectées par les renseignements généraux, une liste de 172 « sectes » et définissent dix critères permettant de les identifier. Parallèlement, l’Observatoire interministériel sur les sectes est créé le 11 mai 1996.

Face aux véhémentes critiques « suscitées par son caractère arbitraire », la liste des 172 organisations sectaires a progressivement été abandonnée, abandon officialisé par une circulaire du 27 mars 2005.

Quatre commissions d'enquête parlementaires !

A partir de la fin des années 1990, les commissions d’enquête parlementaires se succèdent, sur les sectes et l’argent, les sectes et les mineurs et, très récemment, les dérives sectaires en matière de santé. A la notion de « secte », se substitue celle de "dérives sectaires ». Parallèlement, l’Observatoire interministériel sur les sectes, devenu en 1998 la Mission interministérielle sur les sectes (MILS), laisse place en 2002 à la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).

L’attention des pouvoirs publics portée aux « dérives sectaires » s’est aussi concrétisée par le vote de la loi About-Picard, le 12 juin 2001, qui ajoute à l’arsenal répressif français un article 223-15-2 et une nouvelle catégorie d’abus de faiblesse, l’abus de faiblesse par sujétion psychologique.

Au fil des années, la France s’est ainsi dotée d’un dispositif complet de lutte contre les « dérives sectaires ». Elle a créé un réseau institutionnel chargé de détecter les pratiques à risques et de les signaler aux institutions judiciaires à la disposition desquelles elle met des moyens juridiques diversifiés. Spécificité française, ce dispositif n’a pas d’équivalent à l’étranger.

Le dispositif mis en place au niveau national

Des correspondants « dérives sectaires » au sein des ministères

La circulaire du 27 mai 2005 du premier ministre enjoint chaque ministère à se doter de correspondants chargés des « dérives sectaires ». Au sein du ministère de la justice des référents ont été nommés dans les différentes directions du ministère (DACG, DACS, DAP, DPJJ).

Une mission interministérielle : la Miviludes

MiviludesLa Miviludes a une mission d’information, d’alerte et d’animation du réseau des acteurs intervenant dans la lutte contre les « dérives sectaires ». Elle publie chaque année un rapport d’activité et, périodiquement, des guides pour "sensibiliser" les différents acteurs sociaux (collectivité territoriales, entreprises, santé, formation professionnelle, mineurs, finances, etc.)

Elle dépend du premier ministre.

Serge Blisko a succédé à Georges Fenech à la présidence de la Miviludes.

Serge Blisko a succédé à Georges Fenech à la présidence de la Miviludes.

Sous l’autorité d’un président nommé pour trois ans [actuellement un médecin, Serge Blisko], la Miviludes est constituée d’une équipe permanente interdisciplinaire dirigée par un secrétaire général qui est un magistrat de l’ordre judiciaire. Elle est composée de conseillers mis à disposition par les ministères concernés par la lutte contre les dérives sectaires : intérieur, justice, santé, éducation nationale, affaires étrangères, économie et finances. Elle dispose par ailleurs de correspondants régionaux sur l’ensemble du territoire.

Fait notable, elle intervient dans les formations de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM).

La Miviludes a également établi différents partenariats avec l’Ecole des hautes études de la santé publique de Rennes, la Protection judiciaire de la jeunesse, les écoles de formation des officiers de gendarmerie et de police.

Elle a même passé une convention avec La Chaîne Parlementaire (LCP) [pour s’assurer que les journalistes comprennent bien comment il faut parler des « dérives sectaires »].

Elle intervient aussi auprès de l’Institut national de lutte contre le cancer, la Mutualité française, les unions régionales interfédérales des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux, notamment auprès des maisons de retraite dans le cadre d’actions de prévention en direction des personnes âgées...

La revue Justice Actualités précise que « les conseillers de la Miviludes n’ont pas la qualification d’« experts » au sens juridique du terme, mais peuvent être considérés comme des «sachant».

La Miviludes est informée par les administrations des données qu’elles détiennent sur les « mouvements à caractère sectaire » [périphrase inventée pour pouvoir nommer les « sectes » sans dire le mot, ce que serait une discrimination de fait]. Elle peut parallèlement demander des études ou de recherches aux services centraux des ministères.

Dans l’autre sens, la Mission signale aux administrations les agissements des « groupements sectaires » portés à sa connaissance. Elle dénonce aux services des procureurs les faits qui lui paraissent susceptibles de revêtir une qualification pénale et en avertit le garde des sceaux.

Interviewé, Serge Blisko remarque que « certains magistrats, juges d’instruction notamment, se refusent absolument à solliciter la Miviludes, au nom du secret de l’instruction et du lien existant entre la Miviludes, mission rattachée au premier ministre, et le pouvoir exécutif ».

Bien malheureusement, beaucoup d’autres juges ne sont pas gênés par ce lien effectivement très contestable.

Enfin, le président de la Miviludes annonce qu’il va « réfléchir à un partenariat avec l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc). De nombreux dossiers de dérives sectaires ont une dimension financière extrêmement importante et cet aspect des procédures ne doit pas être négligé ». En passant, il suggère d’affecter les sommes saisies… à la Miviludes.

Des services d’enquêtes spécialisés

La direction de la police nationale

Dans le domaine du renseignement, une sous-direction de l’information générale (SDIG) a été créée au sein de la direction centrale de la sécurité publique. Mission : informer les services de l’Etat de toutes matières susceptibles d’intéresser l’ordre public, parmi lesquelles les « dérives sectaires ».

Les dossiers sont transmis à la Cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires (Caimades), qui dépend de l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) de la police judiciaire. Créée en2009, la Caimades est actuellement composée de six enquêteurs spécialisés dans les « dérives sectaires ».

L’objectif principal de cette nouvelle police spécialisée était de trouver des affaires en correspondance avec la loi About-Picard. Elle fournit également une assistance aux services territoriaux saisis de faits de nature « sectaire ». Elle coordonne les procédures judiciaires en cours et les informations en lien avec les « groupes sectaires ».

70 gendarmes pour envahir un petit centre de formation au biodynamisme, dangereuse dérive sectaire, c'est bien connu...

70 gendarmes, accompagnés d'"experts" de la Caimades, ont envahi en 2011 un petit centre de formation au biodynamisme, dangereuse dérive sectaire, comme chacun sait...

La Camaides avait été fortement mobilisée pour "prévenir les risques de suicide collectif" avant le 21 décembre 2012 (date d'une fin du monde annoncée à Bugarach). C'est encore la Caimades qui accompagne quelque 70 gendarmes en descente dans un centre de formation au biodynamisme à Nyons en 2011 (voir la vidéo du Cicns).

A quoi servent nos impôts, quand même !

Le professeur Philippe-Jean Parquet, professeur de psychiatrie et d’addictologie, a construit pour elle un « canevas d'audition d'une personne sortie de l'emprise psychologique et souhaitant dénoncer les faits ». Ce canevas reprend les différents critères de « l'emprise mentale » (selon la Miviludes), pour pouvoir « matérialiser l'état de sujétion psychologique ».

La direction de la gendarmerie nationale

La gendarmerie nationale dispose de différentes structures spécialisées dans des domaines susceptibles d’être concernés par les dérives sectaires. Deux services sont par ailleurs spécifiquement en charge des dérives sectaires.

Les structures spécialisées de la gendarmerie nationale intervenant dans la lutte contre les dérives sectaires

- L’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) travaille sur tout ce qui touche aux pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique, « terrain propice aux dérives sectaires ».

- L’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) peut apporter son appui lors d’enquêtes liées aux « dérives sectaires » dans lesquelles apparaissent des faits de travail illégal.

- Le Service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD) dispose :

- d’une cellule « dérives sectaires » qui assure le suivi global des enquêtes diligentées par les services de gendarmerie ;

- d’un département des sciences du comportement qui peut appuyer les enquêteurs avec son équipe constituée notamment d’analystes comportementaux spécialisés dans les atteintes aux personnes ;

- d’une division de lutte contre la criminalité qui effectue la veille des sites internet "sectaires" jugés les plus dangereux.

La Miviludes, qui accuse les "sectes" de faire de l'entrisme dans les rouages de l'Etat, est partout dans le système administratif. Elle a même réussi à diffuser sa propagande (qu'elle présente comme une "information") au sein de l'université Paris Descartes.

La Miviludes, qui accuse régulièrement les "sectes" de faire de l'entrisme dans les rouages de l'Etat, est présente dans la plupart des grandes administrations françaises. Elle a même réussi à diffuser sa propagande (qu'elle présente comme une "information") au sein de l'université Paris Descartes.

L’officier référent national est secondé dans sa mission par deux sous-officiers de la cellule « dérives sectaires » du département « atteintes et trafic de personnes ». A noter que ces personnels doivent avoir suivi le diplôme universitaire de 3ème cycle « Emprise sectaire et processus de vulnérabilité » mis en place en décembre 2011 à l'université Paris Descartes, à l'initiative de… la Miviludes. Cette cellule est chargée du suivi des affaires judiciaires impliquant un mouvement sectaire, de l’analyse et du classement des fiches de renseignements émanant des référents « dérives sectaires » placés au sein des cellules de renseignements de la gendarmerie, des fiches du Service central de renseignement territorial (ex-SDIG), en source ouverte sur Internet, dans les magazines, etc.

- Le groupe national de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (GNVLDS) est chargé de la mise en cohérence des pratiques locales à l’échelon national de la gendarmerie.

La cellule est en contact permanent avec les institutions judiciaires, les référents «dérives sectaires» placés dans les groupements et régions de gendarmerie, les conseillers du pôle « sécurité » et les conseillers du « pôle santé » de la Miviludes, les services de renseignements de la police nationale, la Caimades, mais aussi avec les associations de défense des victimes de « dérives sectaires » tels l’Unadfi, le CCMM et l'Afsi (Association des faux souvenirs induits), etc.

Les éléments du dispositif à l’échelon local

Un référent « dérives sectaires » au sein de chaque parquet général

Il coordonne au niveau régional l’action de la justice avec les autres services de l’Etat (police, gendarmerie, direction régionale du travail, direction départementale de la PJJ, rectorat, direction départementale de la jeunesse et des sports, direction régionale des services fiscaux, procureurs du ressort, conseil général). Il articule leur action avec celle des préfectures et de fait remonter les informations à son homologue au sein de la DACG.

Des groupes de travail au sein des préfectures

La question des « dérives sectaires » peut être envisagée dans différentes instances préfectorales :

- Les groupes de travail des conseils départementaux de prévention de la délinquance, d’aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les dérives sectaires et les violences conjugales

- Les réunions des états-majors de sécurité

- Les conférences départementales de la liberté religieuse et de la laïcité.

Le réseau associatif

Différentes associations prennent en charge les victimes de dérives sectaires. Les deux principales sont l’union nationale des associations de défense des familles et de l’individu (Unadfi) et le Centre contre les manipulations mentales (CCMM). La première est reconnue d’utilité publique et peut donc se porter partie civile [elle est souvent déboutée en fait]. Elle regroupe 29 ADFI dans toute la France avec 55 salariés dont 4 documentalistes et des bénévoles.

Le réseau associatif fait remonter les informations [les fameux « signalements] qui sont portées à sa connaissance à la Miviludes, à la DACG ainsi qu’aux parquets de leurs ressorts. Les associations sont en lien avec l’ensemble des partenaires en charge de la lutte contre les « dérives sectaires ».

Ce réseau prétendûment "associatif", auquel il faut ajouter une pléthore de petites structures (dont une européenne financée par la France, la Fecris), est en fait essentiellement financé par l’Etat et animé par des farouches militants "antisectes" et quelques représentants des familles déboussolées par le choix de leurs enfants ou ou de leurs conjoints devenus "adeptes"...

« Sectes » et justice

« Ne pouvant être définies, les sectes ne peuvent être prises en compte en tant que telles par le droit. Seuls les comportements qu’elles suscitent et les conséquences qu’elles entraînent peuvent entrer dans le champ du droit. Comportements et conséquences qui constituent les « dérives sectaires ». Ces dérives sont en très grande majorité régies par le droit commun, qui ne les prend en compte qu’à travers les concepts généraux auxquels elles portent atteinte. Seule la matière pénale prévoit une répression spécifique par le biais de l’article 223-15-2 du Code pénal. (…) cet article ne vise pas uniquement les dérives sectaires et n’est pas le seul outil de leur répression. »

Une infraction spécifique : l’article 223-15-2 du Code pénal

• L’incrimination :

« L’article 313-4 du Code pénal réprimait l’abus de faiblesse concernant « soit un mineur, soit une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente et connue de son auteur ». L’article 223-15-2 alinéa 1 est venu préciser que, désormais, la victime peut aussi être «une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement ». Ces pressions ou techniques doivent avoir été mises en œuvre « pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ».

Le deuxième alinéa de l’article 223-15-2 prévoit une circonstance aggravante « lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ses activités ».

Ce texte vise, notamment mais pas exclusivement, les groupements à caractère sectaire dont il permet de pénaliser les comportements répréhensibles sans jamais recourir à la notion de « secte »

Un très petit nombre de condamnations

La circulaire du 19 septembre 2011 a précisé les éléments constitutifs de l’infraction dont il conviendra de rapporter la preuve.

Malgré cette mobilisation des pouvoirs publics et de la justice, le nombre de condamnations en lien avec une « dérive sectaire » est resté ridiculement bas. Soit que le dispositif soit inopérant, soit que la réalité du fait « sectaire » soit très différente des clichés véhiculés par la presse et les autorités…

En effet, entre 2006 et 2012, seuls 95 dossiers en lien avec les « dérives sectaires » ont été identifiés et signalés à la direction des affaires criminelles et des grâces.

Parmi ces dossiers, 17 dossiers ont fait l’objet d’un classement sans suite ou d’une ordonnance de non-lieu, la moitié des procédures a fait l’objet d’une ouverture d’information judiciaire, les deux tiers du chef d’abus de faiblesse. 57 procédures ont entraîné une condamnation du chef d’abus de faiblesse, sans qu’il soit possible d’établir que les faits avaient été commis dans un contexte de « dérives sectaires »…

> Rappelons ici que nous reconnaissons l’intérêt, bien évidemment, d’une veille sur les abus de pouvoir commis par des personnes ou des groupes, mais nous déplorons les partis paris, les clichés, l’arbitraire et le fonctionnement anti-démocratique de cette politique et cette police spécialisées.

> A suivre :

16 - Du positif dans la chasse aux sorcières/sectes française

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