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Sectes, terrorisme : la funeste erreur d’analyse de l’État français

Pourquoi la lutte « antisecte » n’a pas empêché la multiplication des groupes spirituels ni la profusion des actions terroristes ? Parce que sa doctrine et, en conséquence, ses analyses, sont erronées.

> Par Julien Massenet, sociothérapeute.

Quand un médecin pose un diagnostic inapproprié, il ne faut pas s’étonner que son traitement soit inefficace. La France, trop confiante en sa capacité de raisonner, qui l’a conduite notamment à promouvoir ce bel outil qu’est la laïcité, a fini par penser qu’elle détenait la vérité sur le « vivre ensemble » : tout citoyen est libre de penser ce qu’il veut, mais nul ne peut imposer sa conception des choses. C’est pourquoi, par exemple, elle est (presque) parvenue à décoller la religion des affaires de l’État.

Excellent principe.

L’ennui, c’est que cette distinction nécessaire s’est muée en une hostilité plus ou moins patente envers les fois, les convictions, les croyances « différentes ». Une hostilité insufflée du plus haut niveau de l’Etat (Miviludes, Fecris) et entretenue par les médias et des groupes d’influence privés (Unadfi, CCMM, etc.) financés par le gouvernement.

Une politique spécifique a été crée en France, cas presque unique dans le monde, pour contrer les minorités spirituelles par la diabolisation et la poursuite judiciaire.

Bouc émissaire

Mais comment le pouvoir (de droite comme de gauche) a-t-il pu faire admettre une telle discrimination de fait  au peuple qui se souleva pour défendre pour les droits de l’homme ? Il utilisa simplement la vieille recette du bouc émissaire qui marche tellement bien. Il désigna donc une source du mal contre laquelle la lutte pouvait apparaître rationnellement justifiée et socialement acceptable : la secte !

Alors que les différentes minorités présentes en France ne posaient pratiquement aucun problème, le massacre de l’Ordre du Temple solaire (OTS) fournit en 1995 un très opportun prétexte (alors même que l’affaire n’est toujours pas élucidée, mais passons, ce n’est pas ce qui nous intéresse ici). Ce qui nous intéresse, c’est de constater que la peur fut le principal outil du pouvoir et de la presse pour empêcher divers mouvements comme les Krishna, les Moon, les raéliens, les Témoins de Jéhovah, etc., de vivre normalement dans la société avec leurs différences.

Envoûtés

Faire peur est une chose, mais expliquer est autre chose. On a alors réussi à convaincre les Français que les membres de ces mouvements ne pouvaient qu’avoir été en quelque sorte « envoûtés » par des gourous. On ainsi émergé différentes expressions qui ont fait florès : viol psychique, manipulation mentale, emprise, etc.

Il était impossible, pensait-on et clamait-on partout, que « nos » enfants, élevés dans la sainte religion ou selon les sains principes de la raison, puissent tout d’un coup changer leurs habitudes de se nourrir et de se vêtir, vouloir prendre des distances avec leur famille (cellule sacrée de la société !), professer des idées extravagantes comme le pouvoir de guérir par la prière, ou plus récemment, la nécessité de se faire exploser en public pour tuer un maximum de gens, etc.

Ces étonnantes modifications étaient forcément involontaires et donc ne pouvaient que résulter d’actions hypnotiques entreprises par des groupes et des personnes aux pouvoirs diaboliques. Aussi incroyable que cela puisse paraître aujourd’hui, c’est bien ce qui s’est passé dans la France du XXe et qui se passe toujours dans celle du XXIe.

État de sujétion

Comme nous sommes un pays de gens rationnels et intelligents, nous sommes parvenus à « expliquer » ce phénomène magique. C’est là que les psychiatres sont entrés en jeu. Ce sont eux qui ont fourni le concept clé qui a permis l’acceptation sociale, médiatique et juridique. Une acceptation qui fut même inscrit dans notre droit par la loi About-Picard de 2001 qui a consacré « l’état de sujétion ».

Grâce à cet artifice (car ce concept n’a aucune validité scientifique ni médicale), la victime d’une pression psychologique est entièrement dédouanée de TOUTE responsabilité dans la situation qu’elle a connue. Car un manipulateur, quel qu’il soit, a pu entrer dans for intérieur et prendre les commandes de sa volonté.

Or, ceci est impossible ! La rationalité, l’intelligence, l’autonomie de pensée ne peuvent être appropriées par un autre. Au pire, elles peuvent être trompées, orientées, abusées. Cela, certes, existe. Mais le pilotage total d’un moi de quelqu’un par quelqu’un d’autre est impossible, même sous hypnose. La conscience (le « je » d’une personne) n’est accessible qu’à cette seule personne, chacun peut en faire lui-même l’expérience intérieure !

Monade

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Le point encerclé a été utilisé par les Pythagoriciens pour représenter le premier être métaphysique, la monade.

Le sujet n’est jamais « objet » pour un autre ; il n’est toujours que sujet. Il ne peut jamais être perçu, touché et encore moins manipulé par quiconque. Tout ce que peut faire une personne extérieure, c’est bien sûr l’influencer, l’effrayer, le contraindre physiquement, le duper, etc.

Tout cela est possible, mais EN AUCUN CAS, cette personne ne peut lui ôter son autonomie, mettre son moi en esclavage, etc. Il y a toujours de la part du sujet ou de la victime une liberté qui adopte ou refuse la proposition extérieure, en fonction de ses critères, de ses connaissances, de ses croyances, de ses illusions, de ses attentes, de ses forces, etc. Car un sujet (une conscience) est une monade (au sens leibnizien du terme) maîtresse en sa demeure et intangible DE L’EXTERIEUR.

Cette chosification, cette objectivation de la conscience de l’homme par un autre que suppose la notion d’état de sujétion constituent une aberration très dangereuse individuellement et socialement parlant.

Fortifier le citoyen

C’est parce que l’Etat ne comprend pas cela que son combat contre les «soi-disantes « sectes » et le terrorisme est engagé sur une bien mauvais voie. Car il se limite essentiellement à combattre les groupes, les gourous jugés dangereux, etc. Certes, il faut réagir contre les profiteurs et les criminels. Mais, pour ce qui est des croyances, la seule véritable prévention, le seul moyen efficace de lutter contre les influences néfastes, c’est l’éducation, l’attention portée aux souffrances et aux situations de faiblesse (économiques comme psychologiques), c’est l’apprentissage du débat constructif et la formation à l’esprit critique.

Bref, c’est fortifier le citoyen, c’est accroître son degré de liberté par une politique – non plus une politique paternaliste de protection, comme c’est le cas essentiellement aujourd’hui –, mais d’information, de débat, de courage (ne pas craindre de prendre des risques), de confiance (vigilante) et – mais c’est sans doute beaucoup demander – de fraternité.

 

Quinze ans de loi About-Picard : coup de projecteur sur la « manipulation mentale »

Pour « fêter » les 15 ans de la loi sur les « mouvements sectaires » (loi About-Picard), nous avons voulu apporter un éclairage original sur son concept central, l’emprise mentale, nommée juridiquement « abus de faiblesse de personne en état de sujétion psychologique ou physique ».

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Au 10e anniversaire de la loi. De gauche à droite : Philippe Vuilque (Groupe d´études sur les sectes/Assemblée nationale), Catherine Picard (présidente Unadfi et co-auteure de la loi anti-sectes de 2001), Geogres Fenech (président Miviludes), Alain Gest (député, rapporteur de la commission d'enquête 1995) et André Fédéric (député fédéral belge, intiateur d´une loi contre les sectes inspirée de la loi française). Photo : Ouvertures.

En fait, « l’état de sujétion psychologique » n’existe pas. Cette formulation a été employée pour éviter les termes de « manipulation mentale ». C’est un crime inventé de toutes pièces par le législateur français le 12 juin 2001 pour pouvoir agir contre ce qu’il appelait alors les « sectes » ou les « mouvements sectaires » sans que ceux-ci aient rien judiciairement à se reprocher.

Ce crime n’a absolument aucun fondement scientifique et constitue une escroquerie sur le plan philosophique. C’est ce que nous allons développer dans cet article.

Cet énorme scandale judiciaire et humain, la société l’a pourtant facilement accepté et en nourrit même constamment le fantasme.

Énorme duperie

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Produit iconographique typique du fantasme "antisecte" français qui recouvre la plupart du temps une peur ou une haine de la spiritualité.

Les médias sont au troisième rang des instigateurs de cette énorme duperie derrière le gouvernement (parlementaires, Miviludes, ministères) et les innombrables lobbies de l’intolérance spirituelle et thérapeutique : Unadfi, CCMM, Gemppi, Sentinelle, Vigisectes, Prévensecte, PsyVig, Conseils de l’ordre des médecins et de la pharmacie, etc.

Avant d’apporter la lumière sur cette incrimination nouvelle dans le droit français, une précision importante. Nous ne nions pas qu’il y ait des dérives dans certains groupes religieux ou de la part de praticiens des médecines non conventionnelles. Ces dérives occasionnent des préjudices et des souffrances que la société se doit de repérer, de sanctionner et d’empêcher.

La société doit s’organiser pour ce faire, notamment en créant des lieux d’écoute des victimes éventuelles liés à des procédures de médiation (et non d’inquisition comme aujourd’hui). Les actions de répression ne devraient intervenir que dans un deuxième temps.

Ensuite, cette organisation doit toucher tous les secteurs de la société (entreprises, partis, religions, associations mais aussi familles) et non seulement les mouvements dits « sectaires », cette spécification constituant déjà à notre sens une discrimination interdite pourtant par la loi.

Gardiens du système matérialiste

Il n’était nullement nécessaire de concevoir une loi ad hoc « antisecte », comme cette loi About-Picard du 12 juin 2001 qui crée précisément la notion de sujétion mentale. Ce texte a quand même vu le jour car les « gardiens du système » matérialiste[1] avaient besoin de pouvoir condamner des personnes ou des groupes qui n’avaient commis d’autre délit que celui de penser, soigner, éduquer « autrement ».

Ces forces conservatrices ont réussi à faire admettre cette idée absurde que les personnes qui se convertissent, qui épousent une pensée différente de la leur, ne peuvent le faire que contraintes et forcées, et dépossédées de tout libre arbitre par les « sectes ». Mais comme le droit interdit de discriminer n’importe quel groupe humain, le terme de « secte » a dû être abandonné.

C’est alors que le génie administratif français a inventé le terme de « dérive sectaire », même s’il n’a pas pu lui donner de définition juridique foncière. Il s’est contenté de le caractériser par l’addition d’un certain nombre de critères pratiques, comme les « techniques propres à altérer le jugement pour conduire les personnes à un acte gravement préjudiciable pour elles ».

Qui veut noyer sa « secte »

Cela favorise tous les abus de pouvoir contre des personnes ou des groupes actifs. En effet, le gouvernement ou la justice peut à loisir se choisir une cible et l’accuser de dérive sectaire. N’importe quel comportement peut être considéré comme technique propre à altérer le jugement. Il n’existe pas d’échelle scientifique pour distinguer entre l’influence, le charisme, l’empire, l’ascendant, l’autorité, la pression, la domination, le magnétisme, etc.

Quand on veut noyer sa « secte », il suffit de parler d’emprise et le tour est joué ! Tout le monde alors prend peur, se scandalise et applaudit à la répression.

Tout le monde a peur parce que tout le monde croit au fantasme de la « captation de la pensée » par autrui. Cette locution se trouve textuellement dans des jugements pour dérive sectaire.

"L'instance qui choisit"

La captation de la pensée par un mouvement quel qu’il soit est un fantasme car il est impossible d'atteindre de l'extérieur "l'instance qui choisit" à l'intérieur d'autrui. Il est impossible non plus de distinguer de l’extérieur la frontière entre consentement légitime et consentement illégitime d’une personne à une idée. Il y a tellement de paramètres (psychologiques, moraux, politiques, sociaux, philosophiques, religieux, etc.) à prendre en compte !

De même, et surtout, nul ne peut être dépossédé de son libre arbitre. Il peut le déléguer, l’abandonner, le faire dépendre d’autrui, oui. Mais c’est un acte de sa part, un acte sur lequel il peut toujours revenir, pour peu qu’il reprenne conscience des choses. Ôter cette responsabilité à un individu, ce que fait la justice quand elle consacre une victime d’emprise mentale, c’est l’assassiner philosophiquement et spirituellement. Car il lui est alors impossible de retrouver totalement son autonomie intérieure, celle-ci lui ayant été rendue « de l’extérieur » et n’ayant pas été reconquise par elle-même. Seul moyen pourtant d’épanouir pleinement son humanité.

[1] Ce système comprend également des représentants des religions « reconnues » qui cherchent à protéger leur pré carré.

15 – L’imposant arsenal français contre les « sectes » est unique au monde

La France est en pointe dans la lutte contre les « dérives sectaires ». En effet, l’imposant dispositif institutionnel et législatif qu’elle a mis en place est unique au monde. Dommage qu’il soit utilisé dans l’arbitraire et la partialité. Même les faits sont manipulés pour justifier l’intolérance et la discrimination.

Dans la plupart des pays du monde, la lutte contre ce qu’on appelle en France les « dérives sectaires » entre dans le droit commun. L’action publique sanctionne les abus de groupes ou d’individus qui abusent de la crédulité des gens et commettent des infractions caractérisées. Mais, en règle générale, elle respecte les minorités de conviction. En France, celles-ci sont très mal vues et qualifiées de « sectes », ce qui permet de les persécuter du seul fait de cette étiquette, sans attendre qu’elles aient commis de délits manifestes.

A titre préventif, en quelque sorte. Alors que nul, selon la loi française, ne devrait être inquiété pour ses opinions, ses croyances ou ses convictions.

Ce n° du département Recherche & Documentation de l'ENM est consacré au thème des "dérives sectaires" en lien avec le droit et la justice.

Ce n° du département Recherche & Documentation de l'ENM est consacré au thème des "dérives sectaires" en lien avec le droit et la justice. Bien que l'emploi du terme de "secte" soit contraire au droit français, le mot est constamment utilisé dans ces colonnes.

Pour ce faire, depuis plus de vingt ans, toute une série de décisions ont été prises pour surveiller les contestataires et les originaux qui professent une foi ou une pratique « pas catholique ».

Dans cet article, nous vous présentons l’arsenal mis en place dans notre pays, arsenal qui suspend une épée de Damoclès au dessus de tous les mouvements « différents » liés à la spiritualité, au naturel ou à la santé. Des instances ad hoc ont même été crées pour mettre le territoire sous surveillance et influencer dans un sens d’intolérance la plupart des administrations et notamment la justice.

Nos informations sont tirées d’un document récent, le n° 8/2013 de la revue Justice Actualités, réalisée par le département Recherche et Documentation de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) et consacrée aux « dérives sectaires ».

« L’offensive française » contre les « sectes » a réellement démarré fin 1995 avec la publication d’un rapport de l’Assemblée nationale, intitulé « Les sectes en France ». L’événement connait un retentissement international.

Dans leur rapport, les parlementaires dressent, sur la base des informations collectées par les renseignements généraux, une liste de 172 « sectes » et définissent dix critères permettant de les identifier. Parallèlement, l’Observatoire interministériel sur les sectes est créé le 11 mai 1996.

Face aux véhémentes critiques « suscitées par son caractère arbitraire », la liste des 172 organisations sectaires a progressivement été abandonnée, abandon officialisé par une circulaire du 27 mars 2005.

Quatre commissions d'enquête parlementaires !

A partir de la fin des années 1990, les commissions d’enquête parlementaires se succèdent, sur les sectes et l’argent, les sectes et les mineurs et, très récemment, les dérives sectaires en matière de santé. A la notion de « secte », se substitue celle de "dérives sectaires ». Parallèlement, l’Observatoire interministériel sur les sectes, devenu en 1998 la Mission interministérielle sur les sectes (MILS), laisse place en 2002 à la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes).

L’attention des pouvoirs publics portée aux « dérives sectaires » s’est aussi concrétisée par le vote de la loi About-Picard, le 12 juin 2001, qui ajoute à l’arsenal répressif français un article 223-15-2 et une nouvelle catégorie d’abus de faiblesse, l’abus de faiblesse par sujétion psychologique.

Au fil des années, la France s’est ainsi dotée d’un dispositif complet de lutte contre les « dérives sectaires ». Elle a créé un réseau institutionnel chargé de détecter les pratiques à risques et de les signaler aux institutions judiciaires à la disposition desquelles elle met des moyens juridiques diversifiés. Spécificité française, ce dispositif n’a pas d’équivalent à l’étranger.

Le dispositif mis en place au niveau national

Des correspondants « dérives sectaires » au sein des ministères

La circulaire du 27 mai 2005 du premier ministre enjoint chaque ministère à se doter de correspondants chargés des « dérives sectaires ». Au sein du ministère de la justice des référents ont été nommés dans les différentes directions du ministère (DACG, DACS, DAP, DPJJ).

Une mission interministérielle : la Miviludes

MiviludesLa Miviludes a une mission d’information, d’alerte et d’animation du réseau des acteurs intervenant dans la lutte contre les « dérives sectaires ». Elle publie chaque année un rapport d’activité et, périodiquement, des guides pour "sensibiliser" les différents acteurs sociaux (collectivité territoriales, entreprises, santé, formation professionnelle, mineurs, finances, etc.)

Elle dépend du premier ministre.

Serge Blisko a succédé à Georges Fenech à la présidence de la Miviludes.

Serge Blisko a succédé à Georges Fenech à la présidence de la Miviludes.

Sous l’autorité d’un président nommé pour trois ans [actuellement un médecin, Serge Blisko], la Miviludes est constituée d’une équipe permanente interdisciplinaire dirigée par un secrétaire général qui est un magistrat de l’ordre judiciaire. Elle est composée de conseillers mis à disposition par les ministères concernés par la lutte contre les dérives sectaires : intérieur, justice, santé, éducation nationale, affaires étrangères, économie et finances. Elle dispose par ailleurs de correspondants régionaux sur l’ensemble du territoire.

Fait notable, elle intervient dans les formations de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM).

La Miviludes a également établi différents partenariats avec l’Ecole des hautes études de la santé publique de Rennes, la Protection judiciaire de la jeunesse, les écoles de formation des officiers de gendarmerie et de police.

Elle a même passé une convention avec La Chaîne Parlementaire (LCP) [pour s’assurer que les journalistes comprennent bien comment il faut parler des « dérives sectaires »].

Elle intervient aussi auprès de l’Institut national de lutte contre le cancer, la Mutualité française, les unions régionales interfédérales des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux, notamment auprès des maisons de retraite dans le cadre d’actions de prévention en direction des personnes âgées...

La revue Justice Actualités précise que « les conseillers de la Miviludes n’ont pas la qualification d’« experts » au sens juridique du terme, mais peuvent être considérés comme des «sachant».

La Miviludes est informée par les administrations des données qu’elles détiennent sur les « mouvements à caractère sectaire » [périphrase inventée pour pouvoir nommer les « sectes » sans dire le mot, ce que serait une discrimination de fait]. Elle peut parallèlement demander des études ou de recherches aux services centraux des ministères.

Dans l’autre sens, la Mission signale aux administrations les agissements des « groupements sectaires » portés à sa connaissance. Elle dénonce aux services des procureurs les faits qui lui paraissent susceptibles de revêtir une qualification pénale et en avertit le garde des sceaux.

Interviewé, Serge Blisko remarque que « certains magistrats, juges d’instruction notamment, se refusent absolument à solliciter la Miviludes, au nom du secret de l’instruction et du lien existant entre la Miviludes, mission rattachée au premier ministre, et le pouvoir exécutif ».

Bien malheureusement, beaucoup d’autres juges ne sont pas gênés par ce lien effectivement très contestable.

Enfin, le président de la Miviludes annonce qu’il va « réfléchir à un partenariat avec l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc). De nombreux dossiers de dérives sectaires ont une dimension financière extrêmement importante et cet aspect des procédures ne doit pas être négligé ». En passant, il suggère d’affecter les sommes saisies… à la Miviludes.

Des services d’enquêtes spécialisés

La direction de la police nationale

Dans le domaine du renseignement, une sous-direction de l’information générale (SDIG) a été créée au sein de la direction centrale de la sécurité publique. Mission : informer les services de l’Etat de toutes matières susceptibles d’intéresser l’ordre public, parmi lesquelles les « dérives sectaires ».

Les dossiers sont transmis à la Cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires (Caimades), qui dépend de l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) de la police judiciaire. Créée en2009, la Caimades est actuellement composée de six enquêteurs spécialisés dans les « dérives sectaires ».

L’objectif principal de cette nouvelle police spécialisée était de trouver des affaires en correspondance avec la loi About-Picard. Elle fournit également une assistance aux services territoriaux saisis de faits de nature « sectaire ». Elle coordonne les procédures judiciaires en cours et les informations en lien avec les « groupes sectaires ».

70 gendarmes pour envahir un petit centre de formation au biodynamisme, dangereuse dérive sectaire, c'est bien connu...

70 gendarmes, accompagnés d'"experts" de la Caimades, ont envahi en 2011 un petit centre de formation au biodynamisme, dangereuse dérive sectaire, comme chacun sait...

La Camaides avait été fortement mobilisée pour "prévenir les risques de suicide collectif" avant le 21 décembre 2012 (date d'une fin du monde annoncée à Bugarach). C'est encore la Caimades qui accompagne quelque 70 gendarmes en descente dans un centre de formation au biodynamisme à Nyons en 2011 (voir la vidéo du Cicns).

A quoi servent nos impôts, quand même !

Le professeur Philippe-Jean Parquet, professeur de psychiatrie et d’addictologie, a construit pour elle un « canevas d'audition d'une personne sortie de l'emprise psychologique et souhaitant dénoncer les faits ». Ce canevas reprend les différents critères de « l'emprise mentale » (selon la Miviludes), pour pouvoir « matérialiser l'état de sujétion psychologique ».

La direction de la gendarmerie nationale

La gendarmerie nationale dispose de différentes structures spécialisées dans des domaines susceptibles d’être concernés par les dérives sectaires. Deux services sont par ailleurs spécifiquement en charge des dérives sectaires.

Les structures spécialisées de la gendarmerie nationale intervenant dans la lutte contre les dérives sectaires

- L’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp) travaille sur tout ce qui touche aux pratiques non conventionnelles à visée thérapeutique, « terrain propice aux dérives sectaires ».

- L’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) peut apporter son appui lors d’enquêtes liées aux « dérives sectaires » dans lesquelles apparaissent des faits de travail illégal.

- Le Service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD) dispose :

- d’une cellule « dérives sectaires » qui assure le suivi global des enquêtes diligentées par les services de gendarmerie ;

- d’un département des sciences du comportement qui peut appuyer les enquêteurs avec son équipe constituée notamment d’analystes comportementaux spécialisés dans les atteintes aux personnes ;

- d’une division de lutte contre la criminalité qui effectue la veille des sites internet "sectaires" jugés les plus dangereux.

La Miviludes, qui accuse les "sectes" de faire de l'entrisme dans les rouages de l'Etat, est partout dans le système administratif. Elle a même réussi à diffuser sa propagande (qu'elle présente comme une "information") au sein de l'université Paris Descartes.

La Miviludes, qui accuse régulièrement les "sectes" de faire de l'entrisme dans les rouages de l'Etat, est présente dans la plupart des grandes administrations françaises. Elle a même réussi à diffuser sa propagande (qu'elle présente comme une "information") au sein de l'université Paris Descartes.

L’officier référent national est secondé dans sa mission par deux sous-officiers de la cellule « dérives sectaires » du département « atteintes et trafic de personnes ». A noter que ces personnels doivent avoir suivi le diplôme universitaire de 3ème cycle « Emprise sectaire et processus de vulnérabilité » mis en place en décembre 2011 à l'université Paris Descartes, à l'initiative de… la Miviludes. Cette cellule est chargée du suivi des affaires judiciaires impliquant un mouvement sectaire, de l’analyse et du classement des fiches de renseignements émanant des référents « dérives sectaires » placés au sein des cellules de renseignements de la gendarmerie, des fiches du Service central de renseignement territorial (ex-SDIG), en source ouverte sur Internet, dans les magazines, etc.

- Le groupe national de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (GNVLDS) est chargé de la mise en cohérence des pratiques locales à l’échelon national de la gendarmerie.

La cellule est en contact permanent avec les institutions judiciaires, les référents «dérives sectaires» placés dans les groupements et régions de gendarmerie, les conseillers du pôle « sécurité » et les conseillers du « pôle santé » de la Miviludes, les services de renseignements de la police nationale, la Caimades, mais aussi avec les associations de défense des victimes de « dérives sectaires » tels l’Unadfi, le CCMM et l'Afsi (Association des faux souvenirs induits), etc.

Les éléments du dispositif à l’échelon local

Un référent « dérives sectaires » au sein de chaque parquet général

Il coordonne au niveau régional l’action de la justice avec les autres services de l’Etat (police, gendarmerie, direction régionale du travail, direction départementale de la PJJ, rectorat, direction départementale de la jeunesse et des sports, direction régionale des services fiscaux, procureurs du ressort, conseil général). Il articule leur action avec celle des préfectures et de fait remonter les informations à son homologue au sein de la DACG.

Des groupes de travail au sein des préfectures

La question des « dérives sectaires » peut être envisagée dans différentes instances préfectorales :

- Les groupes de travail des conseils départementaux de prévention de la délinquance, d’aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les dérives sectaires et les violences conjugales

- Les réunions des états-majors de sécurité

- Les conférences départementales de la liberté religieuse et de la laïcité.

Le réseau associatif

Différentes associations prennent en charge les victimes de dérives sectaires. Les deux principales sont l’union nationale des associations de défense des familles et de l’individu (Unadfi) et le Centre contre les manipulations mentales (CCMM). La première est reconnue d’utilité publique et peut donc se porter partie civile [elle est souvent déboutée en fait]. Elle regroupe 29 ADFI dans toute la France avec 55 salariés dont 4 documentalistes et des bénévoles.

Le réseau associatif fait remonter les informations [les fameux « signalements] qui sont portées à sa connaissance à la Miviludes, à la DACG ainsi qu’aux parquets de leurs ressorts. Les associations sont en lien avec l’ensemble des partenaires en charge de la lutte contre les « dérives sectaires ».

Ce réseau prétendûment "associatif", auquel il faut ajouter une pléthore de petites structures (dont une européenne financée par la France, la Fecris), est en fait essentiellement financé par l’Etat et animé par des farouches militants "antisectes" et quelques représentants des familles déboussolées par le choix de leurs enfants ou ou de leurs conjoints devenus "adeptes"...

« Sectes » et justice

« Ne pouvant être définies, les sectes ne peuvent être prises en compte en tant que telles par le droit. Seuls les comportements qu’elles suscitent et les conséquences qu’elles entraînent peuvent entrer dans le champ du droit. Comportements et conséquences qui constituent les « dérives sectaires ». Ces dérives sont en très grande majorité régies par le droit commun, qui ne les prend en compte qu’à travers les concepts généraux auxquels elles portent atteinte. Seule la matière pénale prévoit une répression spécifique par le biais de l’article 223-15-2 du Code pénal. (…) cet article ne vise pas uniquement les dérives sectaires et n’est pas le seul outil de leur répression. »

Une infraction spécifique : l’article 223-15-2 du Code pénal

• L’incrimination :

« L’article 313-4 du Code pénal réprimait l’abus de faiblesse concernant « soit un mineur, soit une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente et connue de son auteur ». L’article 223-15-2 alinéa 1 est venu préciser que, désormais, la victime peut aussi être «une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement ». Ces pressions ou techniques doivent avoir été mises en œuvre « pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ».

Le deuxième alinéa de l’article 223-15-2 prévoit une circonstance aggravante « lorsque l’infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d’un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ses activités ».

Ce texte vise, notamment mais pas exclusivement, les groupements à caractère sectaire dont il permet de pénaliser les comportements répréhensibles sans jamais recourir à la notion de « secte »

Un très petit nombre de condamnations

La circulaire du 19 septembre 2011 a précisé les éléments constitutifs de l’infraction dont il conviendra de rapporter la preuve.

Malgré cette mobilisation des pouvoirs publics et de la justice, le nombre de condamnations en lien avec une « dérive sectaire » est resté ridiculement bas. Soit que le dispositif soit inopérant, soit que la réalité du fait « sectaire » soit très différente des clichés véhiculés par la presse et les autorités…

En effet, entre 2006 et 2012, seuls 95 dossiers en lien avec les « dérives sectaires » ont été identifiés et signalés à la direction des affaires criminelles et des grâces.

Parmi ces dossiers, 17 dossiers ont fait l’objet d’un classement sans suite ou d’une ordonnance de non-lieu, la moitié des procédures a fait l’objet d’une ouverture d’information judiciaire, les deux tiers du chef d’abus de faiblesse. 57 procédures ont entraîné une condamnation du chef d’abus de faiblesse, sans qu’il soit possible d’établir que les faits avaient été commis dans un contexte de « dérives sectaires »…

> Rappelons ici que nous reconnaissons l’intérêt, bien évidemment, d’une veille sur les abus de pouvoir commis par des personnes ou des groupes, mais nous déplorons les partis paris, les clichés, l’arbitraire et le fonctionnement anti-démocratique de cette politique et cette police spécialisées.

> A suivre :

16 - Du positif dans la chasse aux sorcières/sectes française

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