Philosophie

Je propose de réserver le mot « penser » à l’espèce humaine (2/2)


Par Jean-Luc Martin-Lagardette

Cet article rend compte des échanges entre quelques internautes et moi après que j’ai contesté le titre de Sciences & Vie affirmant : « Les plantes pensent ! » et affirmé la nécessité de réserver le terme de « penser » à l’espèce humaine.

Ce dossier de Sciences & Vie, très intéressant au demeurant, a provoqué ma réaction et le besoin, chez moi, de définir plus précisément ce qui est propre à l'homme (voir article précédent).

Dans l’article précédent, je disais en substance que, selon moi, le choix conscient exige un moi réflexif, donc un ego (je + moi). Tout le reste, toutes les modifications ou évolutions ou réactions que nous observons dans le « vivant », tout ce qui peut apparaître comme un choix n’est en réalité que le fonctionnement des organismes en raison du « hasard et de la nécessité » (Darwin, Monod, etc.) et de l’homéostasie, système régulateur des êtres pour leur maintien en l’existence.

Victor.- "Le choix implique l'égo" n'est pas défendable, il y a plein de contre exemples.

J-L.- Ces exemples ne sont pas probants. L’animal individuel ne « choisit » pas, il réagit selon son instinct ou, si l’on suit la sélection naturelle, il adopte tel ou tel comportement « par hasard » et/ou « par nécessité ». Le fait de dire qu’un animal ou qu’une espèce « choisit » quoi que ce soit est du pur anthropomorphisme.
Pour moi, l'espèce humaine n'est pas supérieure, elle est à la fois partie du vivant comme toutes les autres espèces, mais avec une spécificité qui la différencie de toutes les autres.
Je connais les travaux en éthologie. Je connais tous ces arguments, mais ils sont extrêmement pollués d’anthropomorphisme et de confusion sémantique. Prendre le mot de penser et l’attribuer pareillement à l'homme, aux animaux et aux plantes est abusif et illégitime. Cela convient peut-être pour des échanges familiers, comme dire que le soleil tourne autour de la Terre, mais cela n’est pas valable pour qui veut être rigoureux et cohérent dans sa pensée comme dans son expression.
Chaque espèce a un certain nombre de spécificités. L'espèce humaine est la seule qui dispose d'une diversité quasi infinie (le monde des possibles) de capacités, dons, aptitudes et dispositions qui ne se trouvent jamais réunies ensemble dans aucune autre espèce.
Aucune espèce, surtout aussi faiblement dotée physiquement comme la nôtre, ne peut parvenir à voler comme et au delà de ce que peut l'oiseau, nager comme et au delà de ce que peut le dauphin, se déplacer plus vite et plus loin que le guépard, etc.
Nier cette particularité de notre espèce, c'est affirmer qu'un cercle n'est pas rond.
Autre exemple, nous sommes capable de faire sauter la planète, ce qu'aucune autre espèce ne peut faire.
La spécificité de mon espèce n’est pas objet de gloire puisque je l’ai reçue à ma naissance (je n’y suis pour rien comme l’amibe non plus).
Mais si cette spécificité n'est pas reconnue, aucune discussion n'est possible.
Il n'y a pas, à mes yeux, supériorité de l'humain : nous sommes tous au même titre des "produits", de Dieu ou de la Nature. Il y a seulement chez l'homme, d’après ce que je vois et comprends, une grande diversité de dispositions et d’aptitudes qu’aucune autre espèce ne réunit comme la nôtre et dont certaines ne sont possédées par aucune autre comme chez nous.
Quant à savoir à quoi sert cette spécificité, c'est une autre question qui mériterait à elle seule un débat.
Mais revenons à la pensée. AFFIRMER, comme le fait Sciences & Vie, "Les plantes pensent" me paraît même un net et dommageable abus de langage. Si encore le magazine s’était interrogé : "Les plantes pensent-elles ?"…
C’est un titre sur-vendeur, bien dans la politique éditoriale de S&V qui cherche à provoquer et n’hésite pas, pour cela, à déformer la vérité qui est que l’on constate de l'intelligence dans les plantes, mais non de la pensée...

Victor.- Pas du tout racoleur : oui, si les plantes font des choix, elles pensent.

Sur cette planche du dossier de Sciences & Vie, les termes utilisés ("entraide", lucidité", etc.) sont pour moi abusivement anthropomorphes car ils font appel à une conscience individuelle que rien ne permet d'affirmer chez les plantes. Il y a confusion entre conscience et intelligence.

J-L.- Les plantes ne font pas des choix, elles sont simplement animées par l'Intelligence (Deus sive Natura, Gaïa) dont témoigne l’homéostasie. Le choix est réservé à l’espèce humaine, seule dotée d'une conscience réflexive (dont l’indice principal est la moralité – au sens philosophique d’éthique).

Victor.- Elles décident où non de vivre, par exemple. C'est une forme de conscience perceptive sophistiquée (elles fondent leur décision selon des critères de variation de température assez incroyables). Le choix est aussi du domaine de l'animal et n'est pas lié au critère moral. Ça c’est indéfendable aujourd'hui. J'ai conclu dans un de mes livres que le seul critère qui différenciait l’homme de toutes les autres espèces vivantes est l'invention du possible.
Ce qui est indéfendable, c'est « le choix lié au seul critère moral ».

Sylvain.- Il ne faut jamais dire jamais ! Il y a par exemple un parc en Inde où les éléphants trop nombreux en ont assez de voir les voitures de touristes et s'attaquent à elles. C'est une révolte, que vous le vouliez ou non...
Quant à dire que seule l'espèce humaine est dotée d'une conscience morale, voilà en effet qui ne peut plus tenir.

J-L.- L’exemple des éléphants constitue une réaction (sans considération morale), non une révolte (qui contient une considération morale). Ce n’est pas du tout la même chose ! Si les éléphants s’étaient réellement révoltés, ils auraient fait autrement plus de dégâts ! Et auraient réagi en bien d’autres circonstances. Et bien d’autres espèces martyrisées par l’homme l’auraient fait. Pour moi, le seul fait que les animaux acceptent d’être exploités (et tués et mangés, etc.) est la preuve qu’ils n’ont pas conscience d’être exploités.
Je maintiens que le critère principal (mais il y en a d’autres) qui différencie l’homme de l’animal est celui de la conscience autoréflexive et, en conséquence, la conscience morale, c-à-d fonctionnant à partir de valeurs (et non seulement de sensations ou même de sentiments).
Il y a longtemps que nous avons aboli le ridicule des tribunaux d’animaux du Moyen Age. Il y a de bonnes raisons à cela…

Florence.- Et la pandémie de la peste noire en 1348/50 qui a fait 50 millions de victimes (pour moitié en Europe), n’est-ce pas une révolte visant à éradiquer une espèce humaine malfaisante ? Tout est sujet à interprétation, construction de théories imaginaires, vous n’êtes pas des animaux, ni des plantes, ni des bactéries pour les juger, savoir ce qu’elles pensent, éprouvent et décident, et vous croire supérieurs à ils ou elles.

J-L.- Ce n’est pas la révolte consciente d’individus ou d’espèces mais la régulation mise en œuvre par Deus sive Natura (ou Gaïa) par le biais d’organismes vivants sans pensée personnelle manifeste.
A la limite, à strictement parler, je ne pourrais dire que je ne puis attester que d’une seule conscience, d’une seule pensée, la mienne, puisque je l’expérimente à l’intérieur de moi et qu'elle est inaccessible à quiconque !
Mais j’ai de bonnes raisons de penser que tu en disposes aussi, toi lecteur, et tous mes frères humains, puisque nous pouvons en partager les représentations et les effets visibles, ce qu’aucune autre espèce ne peut faire comme nous. Demande à ton chat, à ton cactus ou à ton poisson rouge : aucun ne te fera un exposé partageable sur la frontière entre l’homme et l’animal…
De toute façon, tout ce qui se passe à l’intérieur des organismes autres que soi, est affaire d'interprétation.

Victor.- C’est la confusion. Je ne dis pas qu’il n’y a pas invention de la morale chez l’homme, comme d’ailleurs de la non morale, qui s’appelle barbarie. Je dis que le choix n’est pas lié obligatoirement à la morale.
Les éléphants en sont la preuve. Et dire qu’ils ne se révoltent pas n’est pas le sujet : ils manifestent un vrai mécontentement intelligent.
"Le choix implique l'égo" n’est pas défendable, on a indiqué plein de contre-exemples. Je ne comprends pourquoi ces arguments ne sont pas reçus. Le choix peut être est lié au sensible pur à d'autres formes de conscience. L'argument des animaux domestiques est recevable. La question animal homme égal est biseautée grave. Faudrait distinguer les espèces. Ce qui semble vrai, c'est la notion de singularité humaine. L'égo est un problème qui semble spécifique à l'homme.

JL.- Déjà, on est d’accord sur la singularité humaine, je m’en réjouis ! Mais alors, en quoi consiste-t-elle concrètement ? Il me semble important de savoir si notre espèce est la seule ou non à avoir une conscience réflexive, c’est-à-dire un ego comportant un moi ET un je (« je m’interroge »). Je constate que les autres espèces ne manifestent pas un ego comme le nôtre, ou même comme nous.
Je n’en conclus nullement que l’espèce humaine soit supérieure !
Je dis seulement que nous seuls avons cette spécificité, qui conduit d’ailleurs à la responsabilité (du fait de notre conscience et de notre possibilité de choisir dans le flux illimité de nos pensées) de respecter et maintenir toutes les autres espèces en bon état. Aucune autre espèce n’a ni la possibilité ni le « devoir » de respecter ou de s’occuper du maintien de toutes les autres. Elles font ce qu’elles ont à faire et le font d’ailleurs justement mieux que nous, parce que, à la différence de nous, elles n’ont pas la possibilité de « choisir » (ce qui nous est réservé) de déroger aux lois naturelles.
Tu dis : « "Le choix implique l'égo" n'est pas défendable, on a indiqué plein de contre exemples ». Ces exemples ne sont pas probants. L’animal individuel ne « choisit » pas, il réagit selon son instinct ou, si l’on suit la sélection naturelle, il adopte tel ou tel comportement « par hasard ou par nécessité ». Le fait de dire qu’un animal ou qu’une espèce « choisit » quoi que ce soit est du pur anthropomorphisme.

Victor.- J’ai l'impression que tu ne connais pas les travaux en éthologie. As-tu entendu parler du singe qui s’est fait un selfie ? Par hasard, par nécessité ? Les animaux qui se suicident, c'est par hasard ou par nécessité ? Les éléphants qui font des facéties avec leur trompe, enterrent leurs morts : par hasard ou par nécessité ? Les femelles chimpanzés qui choisissent leur partenaire ? Les chiens thérapeutes, as-tu entendu parler ? Les dauphins, les aigles qui font des triples loopings, il y a des centaines d'exemples qui montrent que ce n'est ni le hasard ni la nécessité, mais par la recherche soit de plaisir pur soit d'aider...

Florence.- Choisir, consciencer (verbe manquant à la langue française), éprouver des émotions, agir son corps physique, analyser, se souvenir, se concentrer, avoir foi en soi (encore un verbe manquant), etc., sont des fonctions mentales du vivant, donc de tous les vivants. L'homme n'a fait que développer quelques capacités superficielles comme le langage et la manipulation d'outils, et un pouvoir d'imagination à ses risques et périls. Je suis suffisamment orgueilleux pour admettre être l'égal d'une bactérie !
Chaque espèce possède une spécificité qui la différencie de toutes les autres. Faire de la spécificité humaine une vertu particulière me semble relever du "chauvinisme", voire de l’égotisme, d'un besoin irrépressible de se sentir supérieur aux autres faute de confiance en soi.

J-L @ Victor.- Ces exemples ne sont pas probants. Ils illustrent le fait que l’animal a des comportements qui, ressemblant à ceux de notre espèce, semblent motivés par les mêmes raisons. Mais non, l’animal individuel ne « choisit » pas, il réagit selon son instinct ou, si l’on suit la sélection naturelle, il adopte tel ou tel comportement « par hasard », « par nécessité » (cf. Darwin, Monod). Il est une autre raison, c’est que la Nature (hypothèse Gaïa, Dieu, etc.) met en œuvre une régulation pour favoriser la Vie. Pour nous, elle est aussi un spectacle, un jeu et un enseignement permanents. Tout ce qui s’y passe a pour objet de nous inciter à penser, de nous conduire à notre épanouissement par le respect et l’amour de la Vie.
Le fait de dire qu’un animal ou qu’une espèce « choisit » quoi que ce soit est du pur anthropomorphisme, car il nous est impossible de connaître exactement ses motivations, pas plus d’ailleurs que nous ne pouvons connaître les motivations exactes d’autrui – et même, souvent, de nous-même.
Pour moi, l’espèce humaine n’est pas supérieure, elle est à la fois partie du vivant comme toutes les autres espèces, mais avec une spécificité qui la différencie de toutes les autres.
Je connais les travaux en éthologie. Je connais tous ces arguments, mais ils sont extrêmement pollués d’anthropomorphisme et de confusion sémantique. Je ne dis pas que l’animal est insensible ou pure mécanique, qu’il n’a pas d’émotion, etc. Je dis seulement qu’il n’a pas le même système mental dualiste (moi/je) que l’homme et qu’il n’a donc pas la possibilité d’avoir conscience de sa conscience et, par conséquence, de choisir ses pensées.
Pour moi, prendre le mot de « penser » et l’attribuer pareillement à l'homme, aux animaux et aux plantes est abusif et illégitime. Cela convient peut-être pour des échanges familiers, comme dire que le soleil tourne autour de la Terre, mais cela n’est pas valable pour qui veut être rigoureux et cohérent dans sa pensée comme dans son expression.
Chaque espèce a un certain nombre de spécificités. L'espèce humaine est la seule qui dispose, outre la conscience réflexive et le langage articulé, d'une diversité quasi infinie (le monde des possibles) de capacités, dons, aptitudes et dispositions qui ne se trouvent jamais réunies ensemble dans aucune autre espèce.
Aucune espèce, surtout aussi faiblement dotée physiquement comme la nôtre, ne peut parvenir à voler comme et au delà de ce que peut l'oiseau, nager comme et au delà de ce que peut le dauphin, se déplacer plus vite et plus loin que le guépard, etc.
Nier cette particularité de notre espèce, c’est affirmer qu’un cercle n'est pas rond.
Autre exemple, nous sommes capable de faire sauter la planète, ce qu'aucune autre espèce ne peut faire.
La spécificité de mon espèce n’est pas objet de gloire puisque je l’ai reçue à ma naissance (je n’y suis pour rien et l’amibe non plus).
Mais si cette spécificité n'est pas reconnue, aucune discussion n’est possible.
Il n'y a pas, à mes yeux, supériorité de l'humain : nous sommes tous au même titre des "produits", de Dieu ou de la Nature ou de Gaïa. Il y a seulement chez l'homme, d’après ce que je vois et comprends, le pouvoir de penser ainsi qu’une grande diversité de dispositions et d’aptitudes qu’aucune autre espèce ne réunit comme la nôtre et dont certaines ne sont possédées par aucune autre comme chez nous.
Quant à savoir à quoi sert cette spécificité, c'est une autre question qui mériterait à elle seule un débat (j’en ai dit un mot ci-dessus en disant nous que nous sommes ainsi incités à penser et conduits à notre épanouissement par le respect et l’amour de la Vie.)

Sylvain.- Pour qu'on soit clair, que signifie pour vous " penser" ? Pour vous, un humain pense. Qu'est ce que cela veut dire pour vous ? (Voir ma réponse en début de cet article)

Victor.- Tu n’as dit à aucun moment dit ce que c’était penser pour toi. (Voir ma réponse en début de cet article). C’est toi qui a commencé à disqualifier Science & Vie. Donc c’est toi qui a un problème avec les autres idées que les tiennes. T’as tous les droits de soutenir une position qu’aucun scientifique niveau Nobel que j’ai rencontré ne soutient, mais tu ne peux pas faire comme si c’était évident.
Pour terminer voici ma définition du penser : Penser, c’est pouvoir traiter l’information qui arrive en laissant de la place à des réponses inattendues.
Tout le vivant est sensible, tout le vivant réagit. Les mammifères souffrent, les insectes on ne sait pas, les plantes on en doute, vu qu'on ne voit pas ce que cela leur apporterait, mais l'histoire des acacias de JCB montrent quelles déploient des ruses pour ne pas se faire détruire.

J-L.- Ta définition de penser me semble bien insuffisante. Cela, un ordinateur peut le faire !
Je ne dis pas que le vivant est insensible ni qu’il ne réagit pas, je dit qu’il ne « pense » pas comme l’espèce humaine peut le faire. Je lie « penser » et « morale » car la spécificité du penser humain est précisément d’être dépendant du choix de valeurs, des orientations qu’il prend librement parmi toutes celles qui s’offrent à sa conscience.
Depuis des millénaires que l’homme maintient les animaux en esclavage (élevage) et les tue pour sa satisfaction, qu’il les exploite, avec les plantes aussi, je n'ai vu aucune révolte animale. Que des réactions de peur (fuite) ou de défense (attaque). Si l'animal avait une conscience ou un ego, il ne pourrait accepter tout ce que l’espèce humaine lui fait subir !

Florence.- Il n'a peut être pas été démontré que les plantes souffraient, mais il a été prouvé qu'elles étaient sensibles à la souffrance, ainsi qu'à celles d'autres plantes. Se référer à l'étonnant et excellent livre de Tompkins et Bird, paru en 1975, la vie secrète des plantes. Elles sont sensibles à la musique, aux bruits, etc.

Victor.- Ce qui a fait dire que les plantes étaient douées de sensibilité fait suite à des expériences en branchant des détecteurs de mensonge sur les feuilles de certaines plantes. Des humains arrivaient dans la salle d'expérience, criaient, arrachaient des feuilles et le détecteur réagissait... Idem si on maltraitait d'autres plantes situées dans une pièce à côté, séparée par une paroi de verre. Idem avec une paroi opaque.
Ils ont aussi demandé à des humains d'être calmes et prévenants avec les plantes. Le détecteur réagissait mais plus calmement, avec moins d'oscillations violentes. Plus tard, les plantes réagissaient avant même que ces humains amis n'entrent dans la pièce. Idem avec les humains ennemis ... Expériences avec différents types de musique.
Après, il n'est pas question de douleur, mais de réactivité évidente.
Les auteurs ont pensé à de l'empathie et de la compassion vis à vis des autres plantes, même d'espèces différentes quand elles étaient maltraitées. Mais après bien sûr, il y aura toujours de bons scientistes anthropocentristes qui diront que ce ne sont que des fadaises. Peut-être, mais les expériences ont été menées et continuent de l'être...

Florence.- Bien sûr, l'armée indienne sera sûrement intervenue après ces incidents et aura maté les éléphants récalcitrants... Mais pas sûr, non plus...
Je préfère, en tant qu'être humain dit sensible, ou moral, aha ah, reconnaître aux animaux des formes de sensibilité, même si je mange de la viande, un jour cela ne sera plus nécessaire, je préfère les considérer comme mon égal, et parfois même comme des maîtres, surtout certains chiens et certains chats, mais ça c'est une histoire personnelle.
je n'en veux pas à ce J-L M-L , sa virulence trahit en fait un grand désarroi et une grande ignorance. Un jour peut-être il comprendra. Ce qu'il pense des animaux, certains humains pensent la même chose sur... d'autres humains...

J-L M-L.- L'intelligence dont est animé l'animal n'implique pas du tout qu'il y ait choix de sa part. Le choix, en revanche, implique l'ego, dont seul l'homme est doté. D'où la "morale" non au sens de respect d'un corpus de principes extérieurs, mais au sens de choix de valeur dans les pensées. En philosophie, le mot pour dire "morale" est "pratique" ou "éthique", face au "théorique", connaissance du concret.
Je ne suis nullement virulent ni en désarroi. J'aime les animaux et je vois bien qu'ils sont sensibles, mais il ne faut pas confondre, ce que vous faites, nociception et souffrance.
Vous faites, Victor et Florence, de l’anthropomorphisme. Vous projetez sur les animaux ce que vous vivez en tant qu'humains.

J-L M-L.- Beaucoup disent considérer l'animal comme leur égal. C’est seulement une façon de parler théorique, un abus de langage là encore. En effet si, qu’à Dieu ne plaise !, ils devaient être dans la situation de choisir entre sacrifier un être, entre leur enfant, par exemple, et leur chien, je sais bien quelle serait leur option.
A cette étape de nos échanges, j’avais publié une définition (que j’ai enrichie par la suite) sur Facebook qui disait ceci :
« La philosophie radicale (ou philosophie de l’essence) s'efforce de d'apporter des définitions précises de concepts généralement flous et polysémiques.
Parmi ceux-ci, "penser" est l'une des notions les plus vagues qui soit, à tel point qu'aujourd'hui, tout pense : animal, plante, ordinateur et jusqu'à nos viscères...
On confond la pensée, l'intelligence, l'animation, le sentir, la vie, etc.
Pour la philosophie de l’essence, penser est l'activité d'un sujet (et non seulement d'un individu) qui forme des représentations désignant :
- des objets,
- des perceptions (sensations/sentiments...),
- des concepts,
- des jugements.
Et qui articule ces représentations de façon cohérente et communicable. »

Victor.- Oh la la ! ça part moyen comme on dit ! Il aurait été bien de commencer par dire que le vivant effectivement pense. Puisque s’il est capable d’articuler ce qu’il perçoit de façon communicable et cohérente du point de vue de sa survie. La machine ne pense pas par exemple. Après, on peut s’interroger sur ce qui est spécifique au penser de l’humain.
Je pense que l’homme a la capacité de fabriquer à l’infini des concepts sans à priori les lier à la survie.
En ce sens, le penser de l’homme a une seule différence avec le reste des animaux.
Puis on voit ce que cette différence a produit comme effets bénéfiques et maléfiques.
Penser pour l’homme c’est interagir avec le monde en imbriquant les dimensions sensibles concrètes et conceptuelles de façon novatrice.

Jacques.- Si " je est un autre " (Rimbaud), nous sommes pensés par la vie qui nous anime et nous porte. Autre définition : l'activité du penseur consiste à "comprendre" pour ensuite, deuxième étape, s'harmoniser ou contester ce qu'il appréhende. Autre vue : la pensée étant absolument partout et impossible à endiguer, il vaut mieux s'en faire une alliée en lui donnant l'envergure qu'elle mérite, plutôt que de vouloir la circonscrire pour s'en servir partiellement.

J-L M-L.- Le verbe nous a été donné pour nous aider à y voir clair, à comprendre réellement, justement. Il ne s'agit pas de "circonscrire" la pensée, mais d'être précis ! Cette précision, je l'ai pensée nécessaire après avoir lu le titre de Sciences & Vie de ce mois, affirmant en une : "Les plantes pensent !"
Cette affirmation péremptoire est à mon avis trompeuse et me semble dommageable car elle maintient la confusion. Si tout pense, rien ne pense ! Et parler, communiquer, ne sert de rien.
Mais je vois bien que ça peut convenir à beaucoup...
"Mal nommer les choses, disait Camus en substance, c'est ajouter au malheur du monde". Je crois beaucoup à la nécessité d'être rigoureux et précis, ce qui ne peut nuire à la poésie ni à l'amour, bien au contraire.
Je vois que vous réagissez à ma démarche mais pas sur le fond de la "définition" proposée. Son aspect philosophique ne vous a pas intéressé. C'est votre droit, pas de souci ! Cette démarche n'a sans doute pas sa place sur Facebook...
J'ajoute que, philosophiquement, une définition n'est pas un enfermement mais une base la plus rigoureuse possible pour fonctionner et s'épanouir dans un ensemble harmonieux. C'est un effort pour penser juste.
Par exemple, je n'ai pas employé le mot "sujet" par hasard.

Jacques.- Je te réponds rapidement : j'ai exprimé ce qui me venait concernant le sujet de la pensée, qui m'est cher : la capacité à penser rend certains (la plupart) positionnements compatibles et complémentaires. La pensée nous est offerte pour faire face à toute chose. Rien n'est impensable...
D’où la nécessité de penser correctement, et d'apprendre à le faire mieux selon tous critères offerts à notre portée : observation, livres, paroles surtout par notre réflexion sur les sujets que l'on traite...

J-L M-L.- Je prends bonne note.
Mais accepterais-tu de me répondre sur le plan que je propose, c'est-à-dire celui de la définition philosophique de la pensée ? Comment formulerais-tu précisément et le plus complètement possible la tienne ?

Jacques.- Ma définition philosophique de la pensée ? La pensée c'est l'étrave dont nous disposons pour fendre l'océan de l'inconnu et le réduire à merci. La pensée est la production non pas de notre intellect mais de notre être tout entier, sensibilité, perceptions, intellect et sentimentalité réunis. Elle est la résultante de ce que nous sommes au contact du monde qui nous a vu naître et qui continue de nous voir grandir. Elle est production de notre volonté d'être plus et mieux, sinon elle ne fera que vaticiner, enregistrant lieux communs sur lieux communs, n'osant prendre son envol vers le ciel d'une liberté salutaire et bénéfique lui apportant croissance et beauté. Nous devons penser, non pas avec seulement le cerveau, mais avec notre être tout entier, ce qui permet d'exhaler une pensée vivante et conquérante. Pour cela, il faut savoir définir le " JE " comme étant une somme et non plus un égo sur la défensive.

Je donne ci-dessous trois extraits de ce livre dans lesquels ce célèbre neuroscientifique évoque notamment les différences de conscience entre homme et animal.

Victor.- Un jour j'ai dit "penser, c'est se coltiner avec de l'inconnu" assez proche de ta vision quantique !
Jacques.- Ma définition est plutôt "quantique" et universaliste, ce qui pourrait déplaire (peut-être) aux philosophes trop engoncés dans un système préétabli même si l'on doit allégeance à des principes inaliénables, autant de réalités vivantes à expérimenter.

J-L M-L.- J'essaie de deviner, dans ta définition, comment tu répondrais à l'article de S & V qui proclame en titre " : "Le plantes pensent !". Fais-tu une différence entre la pensée de l'homme, celle du chien, celle du poisson, celle de la plante ? Si oui, quelles sont ces différences ?

Jacques.- Oui, très facilement : les plantes et les animaux font partie du monde sensible et, en tant que tels, sont dotés d'une forme de sensibilité réactive constatée qui nous donne à croire qu'ils pensent alors qu'à mon avis ils pressentent et réagissent ; mais surtout il leur manque l'organe de synthèse, le cerveau, grâce auquel ils pourraient, en tant qu'êtres conscients, organiser une échelle de valeurs et être capable d'aimer, ce qu'ils ne font pas, ou beaucoup moins que nous. Inversement, nous qui sommes dotés de cette capacité, sommes capable de vivre sans la développer, nous rangeant ainsi au niveau d'un mécanisme qui se méconnaît et ne se développe pas (assez).

J-L M-L.- Donc, tu penses comme moi que le titre de S&V est faux ou trompeur ? Les chiens et beaucoup d'animaux ont aussi un cerveau...

Jacques.- Oui , mais ils n'ont pas l'usage du verbe, sinon ça s'entendrait ; ce sont des êtres sensibles mais pas en état de conscience avancée, tel que nous le connaissons, ce qui fait de chacun de nous une entité vivante en capacité de s'autogérer entièrement, si nous le choisissons.

Victor.- Complètement infirmé par les découvertes, les animaux ne font pas que réagir et pressentir.

Emma.- Ces animaux "domestiques" ont une forme d'expression de leurs besoins en fonction de la connaissance de leur environnement (comment nous voient-ils ?) Exemple : Je "parle" avec mon chat qui est capable de "comprendre", d'attendre si je lui dis d'attendre, de s'arrêter si je lui indique d'un interdit, de demander plusieurs choses, de la tendresse, de la nourriture, de sortir (le sens est aléatoire même si l'y a une logique dans ce sens que j'ai écrit). Alors ce n'est pas "penser" au sens d'avoir conscience de soi et de son environnement (+ ou - d'ailleurs ;-)) ni créer, car les animaux ne sont pas créatifs en dehors d'un "programme" génétiquement inscrit, mais c'est communiquer sûrement avec leurs semblables et avec ceux qu'ils côtoient.
Que les plantes "pensent" on en a encore moins la preuve, mais qu'elles soient "touchées" si on les place au bon endroit et qu'elles nous font des fleurs et des fruits, ça c'est de la poésie pour l'instant et c'est très bien comme ça. Ce qui fait frémir c'est que l'homme dans l'absence de progression (c'est à dire régression) ne soit plus capable, replié sur lui-même de penser et d'aimer et de se conduire comme un robot programmé pour consommer.

J-L M-L.- Victor, c'est abusif d'affirmer que c'est "complètement infirmé par les découvertes" car celles-ci sont forcément des "interprétations" humaines (donc toujours plus ou moins justes) et elles sont tirées d’observations partielles et déductions.
Nous projetons sur les animaux ou les plantes ce qui se passe en et pour nous. Il est impossible d'affirmer que leurs qualia sont exactement du même type que les nôtres. Ce serait de l'anthropomorphisme que de l'affirmer. L'intériorité ne se vit que de l'intérieur.
J'ai lu le dossier de S&V. Le texte est beaucoup plus nuancé que le titre qui est clairement survendeur. Par ex., ils disent que la pensée de la plante est "radicalement" et "fondamentalement" différente de la nôtre. Autant dire qu'il s'agit de bien autre chose !
Ils la comparent même à une pensée qu'auraient des extraterrestres par rapport à nous ! Quand on proclame haut et fort "Les plantes pensent !", on est donc bien dans la science-fiction...
C'est pourquoi, du moins si on se veut précis et rigoureux, condition d'une bonne communication, on ne devrait pas employer le même mot.

Jacques.- Le monde sensible, soit existant, dans lequel nous sommes apparu, est issu d'une seule source, ce qui lui donne une unité et des caractéristiques partout semblables. C'est un tout indivisible, et ses composants les plus proches de nous ont une âme, au sens aristotélicien du terme, ce qui signifie qu'ils sont composés d'une substance vibratoire qui est celle qui nous compose aussi, ainsi que le reste des choses : dans le règne minéral, végétal et animal . Dans ce monde de vibrations il apparaît donc normal que les éléments résonnent et se répondent, car entre deux éléments il n'y a pas que du vide ou de l'air, il a aussi et surtout cette substance, invisible mais très active qui régit l'ensemble. C'est par cette substance qu'ont lieu des phénomènes tels que la télépathie et la voyance, ainsi que la guérison à distance. Appelons-la l'esprit, pour simplifier. Incluse en notre nature se trouve la prescience de cette réalité à laquelle nous sommes liés de fait et que nous avons intérêt à rejoindre consciemment. C'est certainement ce qui questionne un certain nombre de personnes qui travaille sur des pistes mais n'ont pas tous les éléments pour établir clairement la vérité sur les phénomènes qu'ils observent.

Victor.- En tout cas, le neuroscientifique Damasio ne soutient pas la position que les animaux ne pensent pas

J-L M-L.- Il soutient dans ses livres que les animaux ne "souffrent" pas de la même façon que nous.
De même, les scientifiques qui travaillent sur la question parlent plus de douleur et de nociception que de souffrance.
A propos de "penser", logiquement et scientifiquement parlant, il serait juste de ne pas se contenter du même mot. Ou alors, à chaque fois, surtout en parlant des plantes, de l'accompagner des différences "radicales" et "fondamentales" qui existent avec le penser humain.
Je suis étonné que tu ne partages pas cette exigence de rigueur.
As-tu vraiment lu le dossier de S&V ?

Victor.- Il parle de formes de conscience chez les animaux. Il dit que l’intestin est le premier cerveau. Ça veut dire quoi si ce n’est que l’intestin pense ?
Car je ne sais plus trop quoi te dire : j’ai l’impression que tu ne veux pas entendre pour des raisons qui m’échappent. Je ne sais pas où cela te dérange, mais c’est étrange.

J-L M-L.- Avoir un cerveau ne veut pas dire qu'il y a pensée au sens réflexif !
Tu englobes plein de notions différentes sous le mot "pensée", ce qui entretient une confusion totale.
La question est facile à régler. Tu as une plante ? Tu as un animal ? Demande-leur de nous dire ce qu'elles "pensent" de l'espèce humaine, ou de l’élection présidentielle. Si tu m'apportes leur réponse claire, cohérente, compréhensible et certifiée venant d'eux, je veux bien reconsidérer ma position.
Je dirai ce que dit Damasio sur la conscience et la souffrance animales, cela t'aidera à comprendre ce que je dis, parce que lui et moi disons à peu près la même chose...

Damasio : Extrait n° 1.

Victor.- Le problème est que tu changes tout le temps de point de départ. Le point de départ de penser (que tu as toi même pris) c'est être capable d'effectuer un choix qui n'est pas le fruit du hasard et de la nécessité. Cela suppose quelque part une forme d'apprentissage et d'intelligence. Il t'a été fourni une palanquée d'exemples ! Une fois que tu acceptes cela, on peut parler du reste de la pensée réflexive de la pensée conceptuelle, de l'apport du langage. Et on sera d'accord. Non, tu ne penses pas comme Damasio et si tu changes de point de départ, alors faut que tu expliques ce qui te fait changer.

J-L M-L.- Mon point de départ était ton post sur le dossier de S&V affirmant en une en grosses lettres : "Les plantes pensent !"
Ensuite, j'ai dit que cette affirmation était abusive, qu'elle amalgamait différentes significations qui contribuaient à faire croire qu'il s'agissait de la même opération, qu'on parle de viscères, de plantes ou d'animaux.
J'ai ensuite donné ma définition.
J'ai expliqué que les exemples par toi fournis n'étaient pas des preuves mais des supputations, certes étayées mais seulement des interprétations humaines de fonctionnements proches mais pas identiques des nôtres.
Tu n'as pas répondu précisément à mes objections. Tu m'as surtout donné des arguments d'autorité du type : les "scientifiques disent que les animaux pensent", en renvoyant à des liens.
Mais la raison te dit clairement que ni ta plante ni ton chien ou chat ne pensent comme nous. Donc, n'employons pas le même mot ! C'est tout ce que je dis.
Damasio : je ne pense pas TOUT comme lui, mais sur la conscience et la souffrance animale, si. Voir un peu plus loin.

Victor.- Non J-L, l’histoire ne s’est pas déroulée comme cela. Le point d’achoppement est ta première définition sur le choix. C’est juste pas possible que tu occultes cela !
Oui il y a un double mouvement pour voir ce qu’il y a de commun à toutes des espèces vivantes sur le choix et la capacité de penser en dehors du hasard et de la nécessité.
Et un autre pour spécifier le penser humain.
Tu fuis littéralement le débat sur le penser du vivant au nom d’une posture que l’on serait vraiment tenté de qualifier d’anthropomorphique.
Tu n’as aucun argument sérieux pour disqualifier le penser du vivant. Strictement aucun.
Tu le récuses c’est tout et je te répète tu es tout seul, il n’y a aucun scientifique sérieux qui te suivra ni Damasio ni Prochiantz en particulier sur ce sujet.
Après on peut imaginer qu’il y ait deux mots un pour désigner le penser vivant et l’autre humain, mais ce n’est pas le cas.
Donc je demande de relire les arguments pour contrer ton objection sur le hasard et la nécessité. Et non de ressasser « gros titres racoleurs ». Car quand tu traites de racoleurs les journalistes, tu éclabousses ceux qui pensent comme eux. Dont d’illustres savants.
Tu peux in fine avoir raison. Mais tu n’as fourni d’arguments.

Damasio : extrait n°2.

Victor.- Je ne fuis pas le débat, je conteste fermement que le vivant ait une pensée identique à celle des humains. Il est animé par une intelligence : oui ! Ce n’est pas la même chose.
Cette intelligence nous anime nous aussi : c’est en cela que nous sommes de même nature que tout le reste du vivant. Ni plus, ni moins. Je ne "disqualifie" donc rien ni personne !
Cela dit, j’affirme que seule l’espèce humaine dispose d’une pensée qui, pour être appelée pensée, doit comporter 4 éléments :
- être individuelle et focale ;
- pouvoir être consciente d’elle-même en temps que pensée propre (concept du sujet) et présente (et non seulement de soi en tant que corps) ;
- pouvoir former des abstractions et des concepts et les articuler en langage ;
- être en même temps volonté, c-à-d capable de choix, c-à-d encore être doté de responsabilité (ce dont les animaux ni les plantes ne sont dotés ; tu n’as pas répondu à mon argument des tribunaux pour animaux).
Ce choix au sens précis diffère du choix que l’on peut croire observer dans la nature ou dans n’importe quel produit de l’intelligence artificielle.
A la limite, à strictement parler, je pourrais dire que je ne puis attester que d’une seule conscience, d’une seule pensée, la mienne, puisque je l’expérimente à l’intérieur de moi et qu'elle est inaccessible à quiconque autre !
Mais j’ai de bonnes raisons de penser que tu en disposes aussi, toi, et tous mes frères humains, puisque nous pouvons en partager les représentations et les effets, ce qu’aucune autre espèce ne peut faire comme nous (demande à ton chat). Tout le reste est teinté d'interprétation.
Je respecte et aime les scientifiques, mais quand ils sortent de leur domaine de compétence et font de la philosophie, je suis en droit de remettre en question leurs affirmations quand elles me paraissent injustifiées.
Enfin, je vois que ma position dérange puisque tu me reproches ( !) de « disqualifier » la pensée du vivant et « d’éclabousser » les savants quand je critique le titre de S&V. Que viennent faire là ces jugements à caractère moral ? A t’écouter, je me sens dans la peau d’un hérétique face à une église…

Victor.- Tu me fais rire J-L, tu as une remarquable propension à déformer subrepticement les étapes des échanges. Au départ, tu fais comme si la définition de penser (et non disposer d'une penser) était évidente, partagée, et t'autorisait à traiter les scientifiques d'abus de langage. Tu fermes dès le départ le débat, au lieu de l'ouvrir, c'est cela que je te reproche et que tu n'acceptes pas et après tu fais de la casuistique, pour quoi ? Pour être certain d'exister, d'avoir raison ? Pour moi, c'est contradictoire avec ce que tu appelles l'écoute. Si tu ouvres n'importe quel dictionnaire, il est écrit au chapitre penser plein de sens différents : envisager, croire estimer juger, réfléchir... Au lieu de partir avec prudence sur une question difficile tu es rentré dans l'échange comme un chien dans un jeu de quille. C'est cela dont je parle. Il est important que tu relises ce que tu as a dit au début (sur un autre post) ou fasse relire par quelqu'un d'autre et accepte de reconnaitre que tu t'es emballé, c'est pas compliqué dès le départ. "Hérétique face à une église" : arrête ton char ! C'est tellement excessif. Pour moi, tu fais du sophisme, c'est-à-dire tu bâtis une définition qui semble ne pouvoir que s'appliquer à l'homme parce qu'au départ tu estimes que seul l'homme pense. Au lieu d'accepter d'explorer l'hypothèse qu'il y a du commun entre tout le vivant sur la façon de traiter l'information qui nous parvient et donc d'en déduire des choses et de faire des choix pour à la fin éclairer le spécifique du penser de l'homme qui, pour moi, relève de la création par l'intermédiaire de l'invention des possibles (c'est ma proposition d'éclairage de la spécificité du penser humain que je veux bien reconsidérer, s'il y a des arguments probants).
Si tu n'acceptes pas d'envisager, dans ta liste ultra longue de la pensée humaine, ce qui est commun aux animaux au vivant, on ne va pas pouvoir poursuivre l'échange parce que j'estime alors que pour des raisons qui m'échappent tu as arrêté de penser ou que tu fais un saut tellement inouï dans la différence entre l'homme et le reste du vivant que cela me tétanise. Prends ce qui t'arrange. PS : Pour terminer, Damasio donne une définition de l'esprit de la conscience, pas toi.

Damasio : extrait ° 3.

J-L M-L.- « Tu me fais rire J-L » Tant mieux ! Ça me change des réactions agressives et indignées que mes propos provoquent parfois.
Je comprends maintenant : c’est le fait que j’ai ma propre définition du penser qui te fait bondir ! Elle te semble intellectuellement inappropriée, « sophistique », indice « d’emballement » ; de cette façon, je « ferme le débat », je « déforme subrepticement les étapes des échanges », je fais de la « casuistique », je veux « avoir raison », j’ai « arrêté de penser », contraire de « l’écoute », « chien dans un jeu de quille », etc. Quel festival !
J’aurais dû, selon toi, partir de ce qui est établi, etc.
Je suis un incorrigible naïf. Je suppose toujours, chez mon interlocuteur, le désir et la capacité à étudier en toute simplicité une pensée « différente » (comme l’est la mienne). J’aurais très bien pu, comme tu le souhaites, faire le lien entre cette pensée et ce qui est dit habituellement, ce qui est établi, mais ça aurait pris un livre entier pour m’expliquer (voir d’ailleurs mes ouvrages sur « Évolution et finalité » ou les « Droits de l’âme », où ce lien est fait). Ici, j’ai préféré partir directement d’une pensée personnelle, originale, non-conformiste, en pariant qu’elle sera reçue comme une PROPOSITION et étudiée sans préjugé, c’est-à-dire pour elle-même.
Comme je l’ai déjà dit, Facebook n’est sans doute pas le lieu approprié pour ça…

Les excès de l'antispécisme

C’est très important de sensibiliser le public à la question de la douleur et bien-être animal ! Malheureusement, le message risque de ne pas passer à cause de certains excès, comme par exemple ceux du titre du livre sur lequel est construite l’émission : "L'animal est une personne. Pour nos frères et sœurs les bêtes", par Marie-Hélène Soenen".
Assimiler totalement l'animal à l'homme, comme le fait souvent l'antispécisme, est abusif et donc contreproductif. Dommage, car il faudra bien malgré tout faire évoluer les mentalités sur cette question.
Sensibilité, souffrance, douleur, nociception, etc., recouvrent des réalités très différentes.
On ne peut pas se contenter de dire : « les animaux souffrent comme les humains ». Chaque espèce a sa façon de ressentir, effectivement. La fourmi aussi ! Où arrêter la frontière ?
L'homme est une espèce particulière, différente mais avec beaucoup de points semblables avec tout le vivant. On ne peut pas dire qu'un éleveur qui tue son porcelet est un assassin comme s'il avait tué un enfant !
Sinon, tout le monde est criminel dès qu'il écrase une fourmi ou même tue un microbe !

Par ailleurs, j’ai parfois l’impression que tu me lis un peu rapidement. J’ai plusieurs fois exprimé que j’acceptais totalement l’unité du vivant et ce qui est commun aux animaux et à nous. Peut-être me comprendras-tu mieux si je te dis que, sur les plans physique, chimique, biologique, physiologique et neurologique, je vois vraiment un pattern commun de fabrication et de fonctionnement.
Nous avons donc bien une base commune pour discuter, non ?
Maintenant, parlons de « la spécificité du penser humain ». Tu crains que je fasse « un saut tellement inouï dans la différence entre l’homme et le reste du vivant que cela [te] tétanise ». Je dirais oui et non.
Non, car – et nous le pensons tous les deux – il y a bien une spécificité du penser humain, qui est à peu près universellement admise.
Oui, car, selon moi, cette spécificité induit une différence de nature (et non seulement de degré) entre l’homme et le reste.
A ce stade de la discussion, tout dépend de ce qu’on nomme « esprit » et « conscience » (au passage, je te signale que, contrairement à ce que tu me reproches, j’en ai bien donné la définition dans mes textes de présentation de la philosophie radicale. Certes, je n’ai pas la prétention d’être aussi connu que Damasio ;-), mais je croyais que toi, au moins, tu les avais lus).
Tu vois cette spécificité humaine dans « l’invention des possibles ». L’esprit n’est-il pas ce qui permet en nous cette créativité ? Et cela change tout ! Car nous n’avons alors que les limites que nous nous imposons à nous-mêmes. Il y a bien là la possibilité d’un « saut inouï », comme tu dis.
Après, il serait intéressant de savoir comment tu expliques l’apparition de cette spécificité (puisqu’il ne s’agit plus seulement de survie au sens évolutionniste du terme) et surtout ses contours et fonctionnement…

Victor.- Rien ne fait bondir, surtout sur un sujet aussi difficile. Tu fais trop d'interprétations sur ce que j'ai dit de façon récurrente. Tu m'avais dit que tu lirais Science et vie [je l’ai fait]. Il est hors de question de répondre à la question pourquoi les façons de penser de l'homme ont pris cette forme. Je te renvoie à ces propos sur Prochiantz A. Prochiantz développe l’argument suivant : si un crabe regardait un calamar face à un prédateur, que pourrait voir ce crabe : un mouvement de recul, une agitation des tentacules, un jet d’encre, une mise à profit des quelques secondes obtenues par l’aveuglement du prédateur pour une fuite et la recherche d’une cachette. Le crabe pourrait se dire « pas con le calamar ». Et A. Prochiantz d’ajouter : « ne dirait-on pas que ce calamar pense ? ».
Prochiantz se situe dans la lignée du physiologiste Claude Bernard. Celui-ci fut un des premiers physiologistes dans les années 1850, à démontrer que le corps n’était pas un simple réceptacle passif, mais constituait une organisation ayant une capacité d’autorégulation. A. Prochiantz propose de définir la pensée comme un acte inhérent au processus du vivant. Ce serait l’engagement dans l’environnement immédiat par la mobilisation de toutes les potentialités intrinsèques disponibles. Ainsi l’acte de penser devient l’interprétation de la situation et la production d’un ajustement qui transcendent le seul ajustement instinctif et adaptatif. Le terme interpréter est à entendre dans le sens de la proposition d’H. Wallon lorsqu’il écrivait que nous n’agissons pas dans le monde mais que nous l’interprétons par une mélodie kinétique. La pensée s’envisage ainsi comme un mouvement d’engagement dans la situation.
Penser au sens général regroupe un ensemble d’activités telles qu’évaluer, apprécier, réfléchir, estimer, s’émouvoir, ressentir, agir…
Les aborigènes diront eux que penser c’est danser la relation au monde.

J-L M-L.- Les propos de Prochiantz sont encore teintés d'anthropomorphisme ! Oui, bien sûr, je l'ai déjà dit, il y a de l'intelligence à l’œuvre dans le comportement du vivant, de TOUT le vivant. Ce n'est pas pour autant que TOUT pense. Au mieux, on pourrait dire que tout "est pensé", l'homme compris.
Mais, dans le cas du calamar, il nous est impossible de lier cette intelligence à un "sujet", une conscience réflexive, etc. Or parler de la pensée sans parler du moi qui pense, c'est comme parler de l'esprit sans considérer le corps par lequel il se manifeste. Ou de la lumière sans considérer la lampe qui l’émet.
Le vivant devient un terme fourre-tout où l'intelligence est partout, où rien n'est précis.
En fait, la question, à mon sens, peut se focaliser autour de cette alternative : l'espèce humaine dispose-t-elle d'une différence d'avec les autres espèces, une différence telle qu'elle en fait une différence par nature, comme le pensait Wallace, le co-découvreur avec Darwin de la sélection naturelle, et non seulement par degrés ?
Mais, même dans ce dernier cas, il serait contraire à nos connaissances de dissoudre les particularités des différentes espèces dans une seule et même réalité et de projeter nos vécus sur toutes les autres espèces !

Emma.- Très bonne synthèse et bel échange ! Quand on n'arrive pas à "penser" l'idée d'un dieu (ou d'une entité organisatrice), forme à mon avis d'anthropomorphisme on "pense" plutôt à des causalités et des conséquences liées, on n'a pas trouvé mieux à mon avis que "le hasard et la nécessité". Pourquoi cette "conscience" (et l'inconscient qui perturbe derrière) ne serait-elle pas une émanation chimique et physiologique modelable ? Le nouveau-né est du nouveau modelable : si physiquement il était élevé par des animaux serait-il humain ? Il ne disposerait que de la reproduction du langage animal, inventerait-il un langage différent, ses neurones n'ayant pas été stimulés par ses semblables ? C'est notre "civilisation" qui nous a fait progressivement + ou - humains... Il y a sans doute une ébauche de réflexion chez certains animaux, comme les singes par exemple.

J-L M-L.- Tu écris : "Pourquoi cette "conscience" (et l'inconscient qui perturbe derrière) ne serait-elle pas une émanation chimique et physiologique ?"
Parce qu'il y a un fossé insurmontable entre esprit et matière et que personne n'a donné d'explication satisfaisante sur leur lien ou interaction dans une démarche seulement matérialiste.
De même, "hasard et nécessité" sont insuffisants à tout éclairer. Que ce soit Newton, Darwin ou Monod, les grands "évêques" de la science moderne, ils n'ont pu éviter de parler de cause première ou de téléologie à un moment ou à un autre de leurs théories.
J’ajoute, et c’est sans doute le point crucial, que, pour parler de pensée et de conscience et comparer avec nous, il faut aussi avoir un certain travail intérieur. Victor, as-tu observé sur toi-même l'origine de ta propre conscience ? Connais-tu sa nature ? Son fonctionnement ? Qu'en dis-tu ?
Et quelle comparaison fais-tu alors avec la conscience des autres espèces ?

Jacques.- J'attire votre attention sur le fait que nous savons ce qui se passe dans la tête des animaux que nous côtoyons car il suffit de se le représenter à partir d'un visuel et d'un affectif ; cela donne une évidence sur laquelle on ne peut pas se tromper : prenez un chien : il a besoin de la compagnie humaine et ne sait pas vivre seul comme une hyène ou un loup, dont il est le descendant. Cela suffit à le caractériser à notre entendement et d'une façon convenable. Prenez un chat : même chose : distant mais intéressé, affectueux mais pour le profit qu'il en retire. Il est resté plus sauvage ; on parle là de comportements que l'on peut définir et c'est quelques signes, toujours les mêmes, que l'on retrouve, propres à chaque espèce ; alors on se dit que les animaux sont limités à des codes, comme des automates. Le changement arrive avec le singe qui sait faire des grimaces de toutes sortes, prémisses de l'homme qui lui, surplombe l'ensemble des races en imitant tout, y compris ses congénères, dans leurs affects. Alors, maintenant que je sais ce que chacun vous pensez je peux vous imiter et devenir " vous " tour à tour, vous jouant de la sorte un mauvais tour, ce qui vous alerte sur le fait qu'être imitable est une invite à se transformer pour devenir plus large et contenant de la dimension des autres au point de les phagocyter, mentalement seulement bien sûr. Nous nous sommes livrés, et donc imprimés en les autres, caractéristique purement humaine, révélatrice de la capacité que nous avons de tout assimiler, soit penser et vivre. Ceci nous appartient en propre...

J-L M-L.- Comme promis, voici (en illustration dans le texte) des extraits de livres de Damasio, extraits avec lesquels ma pensée est en phase.
Il y en a 3, tirés de "Le Sentiment même de soi – Corps, émotion, conscience", Odile Jacob, 1999 :
1 - La conscience-étendue, spécifique à l'homme.
2 - L'importante différence entre émotion et sentiment. Et l'idée énoncée, qui rejoint mon souhait, que "nous devrions avoir un terme pour « sentiments qui ne sont pas conscients », mais il n'y en a pas". C’est là-dessus que je base mon idée de réserver le mot « penser » à l’activité de penser qui est consciente d’elle-même.
3 - Pourquoi on "anthropomorphise" facilement le vivant.

 

 

2 thoughts on “Je propose de réserver le mot « penser » à l’espèce humaine (2/2)

  1. Patrick Jakubowski

    Très bel échange parce que productif, dans lequel je fus « Jacques  » ; je ne me renie pas ni ne renie mes propos, qui sont en accord avec ceux de JLML ; je pense que dans cet univers lorsque quelque chose de vivant , végétal ou animal, voir même humain, n’est pas en mesure de se prendre en charge au plan conscient, son créateur ( l’Esprit ) prend le relais , ou le gère dès le départ à sa place, ce qui fait penser que l’élément isolé pense et agit par lui-même, en fonction de ses ressources internes, alors qu’il ne fait que réagir ou s’harmoniser au contexte dans lequel il se trouve placé. Patrick

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  2. assiseeducation

    Je reste sur ma faim, car cela et je tente de dire pourquoi. Oui j’estime je pense, je crois, qu’il est impossible d’infirmer que penser est une caractéristique du vivant. Au moins au sens de faire des choix qui ne sont pas de purs automatismes. Selon les espèces, l’ampleur des choix bien entendu varie. Je suis donc, il me semble d’accord avec Prochiantz. je ne crois pas que le « penser  » soit de la matière arrivée à un niveau de sophistication. Et je ne trouve pas une seconde que tu aies donné un argument convainquant. Je ne suis si anthropomorphiste ni antispéciste. La seconde question c’est quoi la spécificité du penser humain, elle n’est pas encore claire à mon humble avis. Antoine-Victor

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