Où te caches-tu, info rebelle ?


Par Jean-Luc Martin-Lagardette

 

 

Le krach a bon dos. Rebondissant sur la crise, le Forum économique mondial, le WEF pour les intimes, promet une affluence record à Davos. Le WEF, pourtant, n´a jamais fait preuve de claivoyance en matière économique ou politique.
Il n´a pas prévu l´effondrement boursier de 1987, la guerre du Golfe, le krach russe, la fin de la bulle internet, l´invasion de l´Irak, encore moins la débâcle des prêts hypothécaires à risque. Davos gagne beaucoup d´argent mais Davos n´a jamais mauvaise conscience. Camp retranché, le WEF pêche en outre par son manque de transparence, pire, il mène en bateau des journalistes souvent trop complaisants. Quand il ne pratique pas la ségrégation pure et simple.
Synonyme de sésame passe-partout, un badge blanc est réservé à CNN et aux chaînes à la dévotion du WEF. La presseécrite se contente des miettes et, ce qui est plus grave, ne se révolte même pas.

Ces journaux font fi de leur dignité car ils oublient que le WEF doit avant tout son succès à la presse. Sans elle, le WEF ne serait jamais devenu ce qu’il représente aujourd’hui, un rendez-vous incontournable pour les grands de ce monde. Ils oublient aussi que leur  silence  cautionne le déficit démocratique du WEF. Une organisation à caractère privé pour laquelle la cause citoyenne est le moindre des soucis. Le WEF défend les intérêts d´obscures transnationales mais engage l’argent du contribuable. Le coût de la sécurité s’élève à plusieurs dizaines de millions de francs, à charge des collectivités publiques helvétiques.

On peut parier qu´une fois encore les médias tomberont dans le panneau. Le WEF n´a pas anticipé le krach mondial ? Qu´à cela ne tienne, le WEF met le krach au menu des discussions de l´édition 2009. Parallèlement, les médias relègueront Belem, où se tiendra au même moment le Forum social mondial, au rang de sympathique rendez-vous folklorique. Parce qu´il constitue une nébuleuse difficilement identifiable en termes politiques, l´altermondialisme n´a pas bonne presse. Identifié à une horde de casseurs après les débordements anti-G8 en 2001 et 2003, il a été transformé en ennemi imaginaire justifiant l’engagement de gros moyens dans des croisades qui ne verront jamais le jour. Rien de tel que des boucs émissaires pour pimenter un enjeu qui relèverait autrement de l’économiquement correct le plus éculé. Pourtant les idées altermondialistes ont plusieurs succès à leur actif : l´annulation de la dette du tiers-monde et l´échec de l´Accord général sur le commerce des services qui prévoyait la privatisation de l´eau, notamment.

A la télévision, dans les journaux, le forum social n’a pas droit de cité car il ne rapporte pas d’argent. Les paillettes du showbiz ne s’accomodent que de slogans insignifiants, pâles copies des saines et défoulantes vociférations des contestataires, façon années septante. Où êtes-vous, disciples de Lennon et  Balavoine ? Où te caches- tu, info rebelle ?

Christian Campiche

Journaliste, écrivain à Lausanne (Suisse)
Auteur de l´ouvrage "Le Krach mondial - Chronique d´une débâcle annoncée - Et après ?" Editions de L´Hèbe, 2009.

 

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