La Miviludes, ou comment discriminer un mouvement spirituel en prétendant le contraire


Par Jean-Luc Martin-Lagardette

Alors que la Miviludes prétend ne vouloir « stigmatiser aucun mouvement », des sessions de formation données aux magistrats désignent nommément la scientologie comme secte dangereuse, alors que ces mêmes magistrats instruisent le procès contre la scientologie... Bonjour l´impartialité de la justice !

 


Dans le Monde du 2 mai 2012.

 

Une centaine scientologues ont manifesté mercredi 2 mai à Paris contre « l´instrumentalisation des magistrats par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires [Miviludes] ». Regroupés devant l´École nationale de la magistrature (ENM) à Paris, les manifestants ont dénoncé la nouvelle session 2012 de formation des magistrats sur les "dérives sectaires".

 

Dans l´article du Monde, le porte-parole de la scientologie, Eric Roux, dénonce le fait qu´un ancien policier des renseignements généraux, « particulièrement hostile envers la scientologie, » ait dispensé une session de formation en octobre 2002, « en plein cœur de l´instruction concernant l´affaire actuellement pendante devant la Cour de cassation ».

 

En effet, les deux principales structures françaises de l´Église de scientologie, qui ont fait appel de cette décision, ont été récemment condamnées pour « escroquerie en bande organisée ».

 

Le secrétaire général de la Miviludes, Hervé Machi, a déclaré à cette occasion que « les sessions de formation ne stigmatisent aucun mouvement, mais visent à caractériser l´infraction d´abus de faiblesse et comment l´appréhender en droit et en pratique ».

 

Déclaration contredite par l’ancien RG lui-même, qui affirme que, tout au contraire des affirmations de la Miviludes, la scientologie était bien nommément visée dans cette formation, ainsi d’ailleurs que le mouvement raëlien et les Témoins de Jéhovah.

 

En effet, le 7 février 2012, Arnaud Palisson, le policier des RG en question, a publié sur son blog un billet éclairant son rôle auprès de la justice dans cette affaire : non seulement il avait formé la juge d’instruction en question pendant près de trois heures sur les moyens qu’il préconisait pour faire condamner la scientologie, mais de plus, il lui avait remis un document de plusieurs centaines de pages pour ce faire, document qui, d’après lui, ne quittera plus le bureau de la juge d’instruction et sera la base de toute la procédure actuellement pendante devant la Cour de Cassation.

 

 

Confirmation est aussi apportée par le document présentant le contenu du séminaire sur « Les sectes » organisé en 2002 pour les magistrats dans le cadre de leur formation continue  :

 

 

 

Le document ci-dessus, présentant la formation à l´Ecole nationale de magistrature, a été obtenu par la scientologie qui, face au refus de l´administration, a dû faire une requête auprès de la Commission d´accès aux documents administratifs (Cada) pour le récupérer. Celle-ci lui a donné raison et a enjoint le propriétaire du document a le lui communiquer...

 

On est ici au cœur de l’hypocrite « lutte contre les dérives sectaires ». En réalité, il ne s’agit pas d’une lutte contre des « dérives sectaires » mais bien d’une lutte contre des mouvements considérés comme « sectes ». Mais comme ceci est impossible en droit, on prétend, très officiellement, respecter toutes les croyances et ne s’attaquer qu’aux abus et excès. Mais en fait, on attaque des groupes précis, nommément désignés, mais sans assumer cette chasse qui est contraire au droit.

 

D’où le déni de la Miviludes, qui peut dire, sans que personne ne la contredise, à part les scientologues et les documents (pour qui prendraient la peine de les étudier), que les « sessions de formation ne stigmatisent aucun mouvement »…

 

Autre élément intéressant, en rapport avec l’actualité. On sait que le Conseil constitutionnel vient de décider purement et simplement l’abrogation de la loi sur le harcèlement sexuel, sous prétexte que les éléments constitutifs de l´infraction y étaient « insuffisamment définis ».

 

Or, le secrétaire général de la Mivildes indique que « les sessions de formation visent à caractériser l’infraction d’abus de faiblesse et comment l’appréhender en droit et en pratique ». Cela signifie donc qu´aujourd´hui cette infraction d´abus de faiblesse n´est pas suffisamment ou pas du tout caractérisée.

 

Qu’attendent donc nos prétendus « sages » pour déclarer « non constitutionnelle » la loi About-Picard dans laquelle figure cette infraction floue  ?

 

> Encore une fois, je précise que je ne remets nullement en cause le principe d´une veille active sur les risques de dérives manipulatoires pouvant exister partout. En revanche, il me semble important de montrer que l´organisme chargé de cette veille, la Miviludes, emploie des méthodes arbitraires, discriminatoires, irrespectueuses du droit de la défense qui devrait pourtant, en démocratie, bénéficier à tout citoyen, y compris, à ceux que la société a pris en grippe... Si la justice est "endoctrinée" par la Miviludes, quel recours reste-t-il à un mouvement discriminé pour se justifier  ?

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