Comment l´Etat s´organise et lutte contre les approches naturelles


Par Jean-Luc Martin-Lagardette

Le « système » (Etat, finances, industries pharmaceutiques et agro-alimentaires, médias, etc.) combat le « naturel » au nom, bien sûr, de l’intérêt général et de la science, mais, en réalité, pour préserver ses prérogatives. Tel est le thème que j’ai développé le 22 août 2013 à Saint-Martin-d’Arcé (Maine-et-Loire), dans le cadre de l’université d´été du Mouvement des écologistes indépendants (MEI).

 


Au cours de l´université d´été du MEI, son président Antoine Waechter a exposé les avantages d´avoir
conservé son caractère sauvage au fleuve Loire.
Photo : JL ML.

 

Si les citoyens à l´âme écologiste savaient ! Certains croient encore qu’il est possible de convaincre le pouvoir d´adhérer en profondeur à une approche plus humaine et plus respectueuse de la nature. Ils ignorent (de moins en moins, j’espère) combien ce pouvoir est en fait verrouillé par les représentants d’un système qui profite à quelques lobbies et corporations.

Il suffit pour s’en convaincre de scruter attentivement les politiques publiques et d’analyser qui fait quoi : les "juges et parties", les conflits d’intérêt, sautent alors aux yeux. Pour l’illustrer, voici comment l’Etat s’arrange pour barrer la route aux approches naturelles.

 

Les initiatives non productivistes, le vivre autrement et plus proche de la nature, notamment dans le domaine de l’alimentation et de la santé, sont en effet dans le collimateur des gouvernements, de droite comme de gauche : affaires Beljanski, Gardénal, Morel, Guéniot, diabolisation des citoyens qui réclament la liberté vaccinale, herboristerie (Michel Pierre, société Cailleau), semences Kokopelli, purin d’ortie, affaire Joachim, compléments alimentaires, naturopathie vétérinaire (Philippe Labre, J-L Tournaire), descentes de gendarmerie dans les communautés (le Centre de biodynamisme de Nyons, la plate-forme culturelle Terre du Ciel, Château de la Balme, Mandarom, monastère œcuménique du « Moulin des Vallées », Tabitha’s Place), etc.

 

Le pouvoir déploie une somme d’efforts considérables (juridiques, administratifs et policiers) pour calomnier, freiner, voire les interdire ces approches « différentes ». Il a mis en place, au cœur même de l’Etat, toute une organisation chargée de diffuser une propagande spécifique : instance officielle - unique au monde ! - de discrimination (Miviludes), associations de discrimination subventionnées et illégalement reconnues d’utilité publique (Unadfi, CCMM, Fecris, etc.), correspondants « sectes » dans les administrations, police spécialisée, lois ad hoc (About-Picard, ou contre la liberté de vaccination), etc.

Les « gardiens du temple » contre un nouveau monde naissant

Mais c’est en vain, car un nouveau monde est en train de naître, un monde plus respectueux de la nature et de l’homme. Un monde dans lequel la sensibilité, l’intuition, le spirituel, la créativité sans norme, la fraternisation, ont toute leur place, au contraire du « système » qui les rejette, leur préférant les statistiques, la rentabilité, le profit, les données scientifiques (en vérité le « scientisme »), les normes administratives et techniques, la sauvegarde des lobbies, le bien de l’oligarchie, etc.

Ce système a ses « gardiens du temple », en l’occurrence, pour le thème développé ici, les « représentants du peuple », et particulièrement les sénateurs, qui ont pondu un rapport instructif sur le thème « dérives sectaires, dérives thérapeutiques ». Il s’agit en réalité d’une mobilisation sans précédent pour dénigrer les médecines douces et pour justifier la répression actuellement menée contre elles. Répression que nos parlementaires ont proposé de rendre encore plus sévère à la fin de leur rapport !

Protéger le monopole médical

Cette répression, qui vise surtout à protéger le monopole médical (industriel, institutionnel et corporatif), agit ainsi contre l’intérêt des patients, constituant une vraie "perte de chance" pour des milliers de malades qui pourraient mieux profiter, à l’instar de ce qui se fait à l’étranger, de ces approches moins coûteuses et souvent plus respectueuses du « terrain » de chaque individu.

Les acteurs de cette répression sont juges et parties. Responsables législatifs et exécutifs du système politico-administratif sanitaire, ils peuvent dire et faire ce qu’ils veulent, y compris des lois liberticides.

Cette politique, qui fuit l’information et le débat contradictoires (vous n’aurez jamais de débats dignes de ce nom sur ces sujets dans les « grands » médias), est truffée de conflits d’intérêt politiques et manque de transparence.

Ne comptez pas sur la presse pour vous les révéler. Continuez simplement votre lecture ici…

Sénat : une commission d’enquête sénatoriale très orientée

Le citoyen attend d’une enquête menée par les pouvoirs publics qu’elle soit impartiale et menée de façon rigoureuse. Or, cette commission d’enquête sénatoriale « Dérives thérapeutiques et dérives sectaires » fut tout le contraire : partisane et grevée de conflits d’intérêt (précision : la notion de conflit d’intérêt n’est pas entendue ici comme synonyme de corruption. Elle ne s’analyse pas sur le plan juridique ou pénal, mais sur le plan politique).

Sur les 19 membres de cette commission, 6 étaient des médecins (soit près des deux tiers), dont le président de la commission. Représentant la médecine académique et institutionnelle, ils ne pouvaient juger de façon impartiale des approches nouvelles ou différentes qui venaient directement les concurrencer et les remettre en question.

Plusieurs sénateurs avaient de nombreuses casquettes dans le système sanitaire, certains étant même membres ou soutiens de la Miviludes, d’où un conflit d’intérêt patent, dans le sens où les enquêteurs étaient des personnalités déjà connues pour leur défense du monopole médical et leur lutte contre les médecines non conventionnelles.

L’objectif de la commission n’était pas d’enquêter à charge et à décharge sur les approches non conventionnelles, ni de faire la lumière sur les méthodes qui sont efficaces ou non, à risque ou non, mais bien d’instituer un lien direct entre la pratique d’une méthode « non validée par la science » et l’escroquerie charlatanesque.

Médecines douces = détournent les patients de la vraie médecine = perte de chance car non validée par la science. On n’étudie pas la réalité des nombreuses guérisons ou bienfaits. On occulte le fait que c’est le choix de la plupart des patients et que les patients y viennent souvent après l’échec des traitements classiques.

Les questions posées par les sénateurs ont dénoté une hantise du détournement du système institutionnel et notamment de la vaccination, seul moyen déclaré acceptable de prévention.

L’essentiel des témoignages fut le fait des représentants du système sanitaire plus les adversaires traditionnels des « sectes ». Seules les auditions des détracteurs des médecines douces se sont tenues en public.

L’enquête parlementaire, c’est facile à vérifier, a été conduite avec un parti pris de dénigrement.

La commission d’enquête : un tiers des membres sont des médecins

Son président, Alain Milon, est un acteur clé du système médical institutionnel. Il est membre de la commission des comptes de la sécurité sociale ; du conseil d´orientation de l´Agence de la biomédecine ; du Haut conseil du financement de la protection sociale ; de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé ; de la commission des affaires sociales ; du Haut Conseil du financement de la protection sociale. Il est aussi membre du conseil d’administration de la Fondation Fondamental (tournée vers la recherche scientifique des maladies mentales) financée par le groupe Dassault et les laboratoires pharmaceutiques.  

Alain Milon fait aussi partie du « Club Hippocrate », un « groupe d’influence » dans le domaine de la santé, composé de parlementaires et financé par l’industrie pharmaceutique (en particulier par GlaxoSmithKline).

Laurence Cohen, orthophoniste, est par ailleurs membre du conseil d´administration de l´Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

Dans le bureau de la commission d’enquête, quatre médecins :
- Catherine Deroche, médecin
- Catherine Genisson, médecin anesthésiste
- Alain Houpert, médecin radiologue,
- Gérard Roche, médecin.

Ces médecins, pour beaucoup d’entre eux, participent aussi à des groupes d’études sur la filière viande, sur l´économie agricole alimentaire et la trufficulture, la vigne et le vin, la chasse et la pêche, etc. Ils y défendent là des intérêts de lobbies pas franchement réputés pour être favorables à l’écologie…

La Miviludes infiltrée dans les rouages de l’Etat

Mais ce n’est pas tout. Sous la présidence de Georges Fenech, la Miviludes s’est infiltrée ouvertement dans de nombreuses administrations françaises pour y diffuser sa propagande. Plusieurs membres de la commission étaient en étroite relation avec elle. Le rapporteur de la commission d’enquête, Jacques Mézard, est par ailleurs l’auteur d’une proposition de loi (Sénat le 18 décembre 2012) visant à instituer l’immunité juridictionnelle des membres de la Miviludes. Objectif : que celle-ci puisse continuer à diffamer les minorités thérapeutiques ou spirituelles sans pouvoir être attaquée en justice.

De même, le sénateur Jean-Pierre Michel, membre du bureau de la commission d’enquête, avait déposé un rapport le 21 décembre 2011 dont un article instituait lui aussi une immunité pour les membres de la Miviludes.

La sénatrice Nicole Bonnefoy, membre de la commission d’enquête, est également membre du Conseil d’orientation de la Miviludes. Cerise sur le gâteau, Serge Blisko, nouveau président de la Miviludes, est… médecin généraliste.

Pour qui sait lire, il apparaît clairement que la médecine « officielle » et la Miviludes agissent d’étroit concert pour tenter de barrer la route aux médecines douces et aux modes de vie « différents » qui mettent à mal le système basé sur la consommation, le profit et la préservation des monopoles.

New Age, alimentation bio, médecines douces, écologie : attention danger !

Voici ce qu’on peut lire, par exemple, sur le site de la Miviludes : « La dérive thérapeutique devient sectaire lorsqu’elle essaie de faire adhérer le patient à une croyance, à un nouveau mode de pensée. (…) Le gourou thérapeutique propose non seulement de soigner, mais aussi de vivre autrement. (…) » Il s’agit là, pour cette mission interministérielle d’un genre particulier, d’un « mécanisme d’emprise mentale destiné à ôter toute capacité de discernement au malade et à l’amener à prendre des décisions qu’il n’aurait pas prises autrement ». (…) Une répression de la part de l´Etat est donc nécessaire si un certain nombre de critères doivent être satisfaits, comme celui-ci : une ou plusieurs personnes commencent à croire en certaines idées qui s´écartent de celles généralement acceptées par la société. »

Parlant de la kinésiologie, par exemple, la Miviludes écrit : « Mouvance née dans le sillage du New Age, ses adeptes et sympathisants prônent de manière plus ou moins radicale la rupture avec des habitudes de vie jugées néfastes, au profit de choix naturels et authentiques comme l’alimentation biologique, les médecines douces, les thérapies non médicamenteuses ou encore l’écologie ».

Diable, il serait temps d’envoyer les gendarmes !

L’agriculture « productiviste » aide à combattre les soi-disantes « sectes »

Selon la journaliste et écrivain Sylvie Simon, « certains se sont étonnés de découvrir dans le dernier rapport de la Miviludes le nouveau cheval de bataille de cette dernière : le prétendu danger des “nutritionnistes”, un phénomène qui “peut faire énormément de victimes” selon elle. D’autant plus dangereux que ces nutrionnistes progressent à l’aide de “microgroupes”. On comprend mieux lorsque l’on sait que le président de la Miviludes, M. Georges Fenech, déjà surmené par ses multiples casquettes, fait partie des fondateurs de Momagri, Mouvement pour l’organisation mondiale de l’agriculture, un groupement d’intérêts privés créé en 2005 par les grandes firmes agro-industrielles, des producteurs de semences, des banques et des labos ».

On comprend pourquoi Georges Fenech avait déclaré, à l’occasion de la sortie du rapport 2010 de sa mission : « Tout ce qui est naturel peut cacher des dérives sectaires ». Et pourquoi il envoyait ses agents sur les salons de bien-être et de médecines douces… Habitude que son successeur ne devrait pas abandonner de si tôt…

L’Unadfi, la principale association « antisecte », est elle-même soutenue par des lobbies agricoles. Le public ignore qu’elle n’est pas financée par les familles de victimes ou de sortants et de sectes mais essentiellement par nos impôts. Elle a été financée, en 2006 à hauteur de 30 436 €, par un organisme d´Etat, le Cnasea. Ce Centre national pour l’aménagement des structures des exploitations agricoles était un établissement public placé sous la tutelle du ministère de l´agriculture (restructuré et appelé Agence de services et de paiement depuis 2009).

Cette structure était basée à Limoges et regroupait 1800 salariés. Elle assurait la gestion les subventions des programmes agricoles de l´Etat et de l´Union européenne. En gros, c´était le bras financier du « Big-Agro » français. Cette subvention accordée à l´Unadfi s´est étalée sur une période de 13 ans pour un montant total estimé à 320 000 € !

 

Toute action pour une France plus écologique qui se voudrait efficace devrait prendre en compte cet aspect de la réalité économique, politique et institutionnelle de notre pays...

 

Précisions

> J’ai volontairement omis de sourcer ces informations avec des liens hypertextes : il y en aurait eu trop. J’invite le lecteur désireux d’approfondir sa connaissance du dossier à consulter les autres articles de ce blog, notamment la rubrique « Du bon usage des sectes », le site d´information Ouvertures, les sites de Cap LC, du Cicns et de Sylvie Simon. Quant aux adresses du Sénat et de Miviludes, elles sont partout.

> Pour la xième fois, je ne critique pas la Miviludes, l’Unadfi et le gouvernement sur le principe d’une vigilance sur les risques de charlatanisme ou de dérives. Ce que je réprouve, c’est l’hypocrisie de cette lutte (masquant la protection des lobbies), sa partialité (visant seulement certains groupes ou certaines démarches à priori, toujours à charge, évitant le contradictoire) et son manque de professionnalisme (la plupart des acteurs sont des spécialistes autodéclarés).

 

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